Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

348

NOTICE SUR M. MAUGUIN.

<< Aussi, lorsque le National, à peine créé, eut à subir «<les premières rigueurs du ministère public, ce fut «< à lui qu'on s'adressa, comme s'il eût dû connaître <<< mieux que personne le secret de ses intentions et << de ses pensées...... >>

La révolution de 1830 venait de s'accomplir. M. Dupin était alors bâtonnier de l'ordre des avocats; ayant été nommé procureur-général près la Cour de cassation, M. Mauguin fut élu bâtonnier à sa place, ainsi que l'année suivante, à une grande majorité.

Terminons cette notice par les réflexions suivantes, que nous empruntons à l'ouvrage déjà cité de M. Pinard sur les Orateurs du Barreau français. « La révo<«<lution, en précipitant M. Mauguin dans les immenses « embarras de la vie politique, eut pour résultat de << fermer pour lui une carrière où son talent, arrivé à << sa plus entière maturité, lui réservait des triom<< phes nouveaux.

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

<< M. Mauguin n'a reparu depuis, au Barreau, qu'à de << rares intervalles, et dans des circonstances qui sem<< blent plutôt appartenir à l'histoire publique qu'à <«<l'histoire judiciaire des dernières années. Encore « quelque temps, et la génération qui s'élève ne con<< naîtra plus que comme une précieuse tradition cette <<< diction brillante et étudiée, ce geste cicéronien, cette << ironie spirituelle tempérée par un goût parfait dont <«< M. Mauguin, héritier en ligne directe des grands << avocats du dix-huitième siècle, devait être, au mi<< lieu de nous, l'un des derniers et des plus fidèles « dépositaires. »

H.

MAUGUIN.

PLAIDOYER (1)

Pour M. le colonel FABVIER;

Contre M. le général CANUEL.

Police correctionnelle. (Audience du 26 décembre 1818.)

MESSIEURS,

Des fonctionnaires publics, divisés d'opinions sur le principe, sur la nature d'un événement qui a frappé de douleur la France tout entière, viennent vous soumettre une cause que le gouvernement seul aurait les moyens et peut-être le droit de décider. D'un côté, le général Canuel se présente, affichant des doctrines qui sont pour lui toutes nouvelles ; et en même temps qu'il parle de son respect, de son attachement pour la personne du souverain, il attaque avec amertume tous ceux de ses actes qui n'ont pas eu pour but l'intérêt

(1) Voyez tome V, Barreau moderne, p. 235 de cette collection, l'exposé exact des circonstances qui ont donné lieu à cette célèbre affaire.

exclusif d'une faction. D'un autre côté, dans une plus noble attitude, provoqués par leurs adversaires, dévoilant avec courage de criminelles actions, dont plus d'une fois le seul récit vous a fait frémir, se présentent aussi MM. Fabvier et Sainñeville, et derrière eux un maréchal de France; un homme qui fut chargé de représenter le monarque, qui reçut un instant presque tous ses pouvoirs, et dont la mission salutaire a rendu la paix aux rives désolées du Rhône.

[ocr errors]

Ils sont couverts aux yeux de tous, de l'égide des intérêts nationaux et de ceux du gouvernement même. Cependant, ce sont eux qu'on attaque. Le général Canuel ose calomnier les pensées de MM. Fabvier et Sainneville. Il fait plus singulier délire dans un homme dont le dévoûment fut au moins contesté à une époque toute récente! I ose jeter des doutes sur les sentimens de celui qui veille à la garde du palais, de celui à qui le roi lui-même a confié le dépôt de sa personne sacrée.

Ne nous étonnons pas de ce langage; qui pourrait ignorer que c'est celui du parti dont le général Canuel se fait gloire d'être l'organe? Nous savons quels sont ces hommes monarchiques, dont on a parlé à votre dernière audience. Nous savons ce qu'ils ont fait et ce qu'ils voudraient faire; cette cause est la leur; ils craignent que leurs intrigues ne soient dévoilées, ils s'agitent, ils s'inquiètent, ils redoutent le jour qui les menace. Efforts impuissans! cris inutiles! Encore quelque temps et la vérité se montrera tout entière; et déjà il nous est permis de soulever une partie du voile qui couvre les événemens de 1817 et de 1815. »

[ocr errors]

La faction a été représentée murmurant après l'or

donnance du 5 septembre, attaquant le ministère, cherchant à circonvenir le souverain; et pour l'effrayer sur la route qu'il voulait suivre, s'efforçant de lui montrer une nation révoltée, et des conspirations éclatant de toutes parts. Le but évident était de démontrer que la France ne saurait s'accommoder du régime constitutionnel; qu'elle ne peut être gouvernée que par un système de terreur. Chaque fois que la faction s'est trouvée en danger, on l'a vue, nouvel Antée, prendre des forces nouvelles, semer partout des inquiétudes, et soit qu'une loi nouvelle ouvrît au peuple le droit de choisir ses députés, soit qu'une autre loi appelât tous les citoyens à l'honneur de défendre la patrie, on l'a vue se montrer menaçante, non de sa propre force, mais des périls qu'elle imaginait, et dont elle plaçait le siége dans les masses nationales.

L'autorité militaire était son principal appui; l'armée, suivant une lettre du préfet de Lyon, composée en très-grande partie de ceux sur qui la révolution pesa si long-temps, ne craignait pas d'intervenir dans les matières politiques; et s'abandonnant à un système qui n'était pas celui du gouvernement, elle envahissait tous les pouvoirs, et neutralisait l'action de l'administration civile. C'est à Lyon surtout, qu'on s'aperçut des abus de cette intervention de la force-armée dans les opérations du gouvernement. L'autorité militaire, inquiète et inquiétante, ridicule par ses soupçons quand elle n'était pas effrayante par ses menaces, s'était emparée de tous les pouvoirs : elle ne respectait ni les droits des citoyens, ni les attributions des autorités civiles.

Ici, M° Mauguin cite plusieurs exemples de visites domici

liaires, d'arrestations illégales, d'empiétemens ou d'abus de pouvoirs. Il parle surtout de la conduite de M. Hue de la Colombe, premier adjudant de place sous le général Canuel.

Cet officier ne connaissait d'autres règles que ses caprices. Il imposait des ordres à ceux des magistrats de l'ordre civil qui n'avaient point à en recevoir de lui, et refusait au contraire d'obéir aux réquisitions de ceux de ces mêmes magistrats qui étaient investis, d'une autorité supérieure. C'est ainsi qu'entr'autres exemples, on le voit presque en même temps donner des ordres à un commissaire de police, nommé Bréjol, et le frapper publiquement parce qu'il refuse d'obéir; et d'un autre côté, requis lui-même par le procureurgénéral, de faire conduire à sa destination par la gendarmerie, un soldat arrêté et condamné pour vol, le remettre tout uniment en liberté, parce que tel était son bon plaisir. Une fois il arrête lui-même deux négocians sur la voie publique, les fait envoyer en prison, et donne pour motif que leur figure lui déplaisait; une autre fois, accompagné de quinze à vingt soldats, il fait une descente chez un sieur Paris, perruquier; il fait cerner la maison, et donne l'ordre de ne laisser sortir personne. Parmi les habitans qui furent ainsi retenus prisonniers dans leurs domiciles, se trouvait un adjoint du maire. On découvrit une livre de poudre chez le sieur Paris; on en dressa procès-verbal, et on ne manqua pas de s'écrier que les factieux faisaient des approvisionnemens de munitions. Une autre descente faite chez madame de Baldône, piémontaise, qui habitait une maison dans le quartier Saint-Just, présente encore des circonstances qui sont à la fois plus ridicules et plus odieuses. Madame de Baldône qui voulait

« ZurückWeiter »