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NOTICE SUR PARENT-RÉAL.

histoire du Barreau ancien et du Barreau moderne, lorsqu'il touchait, sans qu'il dût le penser encore, à la fin de sa laborieuse carrière. Frappé d'un coup d'apoplexie foudroyante, il mourut subitement à Paris, le 28 avril 1834, âgé de soixante-six ans. A ses funérailles, M. Gorre de Gosse, député du Pas-de-Calais, a dignement exprimé les regrets de ce département et de la France entière.

B***

PLAIDOYER

Pour L.-FR. TILLOY, accusé d'assassinat.

MESSIEURS LES JURÉS (1),

Il y a deux questions principales dans tout procès criminel.

Le délit est-il constant? L'accusé est-il coupable? Ici, il s'agit d'un assassinat commis envers Catherine Toupet, femme de Louis-François Tilloy. Or, l'existence de ce délit est reconnue, et sa certitude est complète.

Mais l'accusé, c'est-à-dire Louis-François Tilloy, son mari, en est-il coupable? Non, Jurés; et c'est sur ce point que porte la défense dont je suis chargé..

Le plan que j'ai à suivre est bien simple: il consiste à établir qu'il n'y a point de preuve que l'accusé soit coupable, mais que tout concourt, au contraire, à le faire déclarer innocent.

Pour vous amener à cette conviction, je dois d'abord, Jurés, vous rappeler sommairement les faits, et vous tracer l'histoire de la procédure.

(1) L'exorde manque.

Louis-François Tilloy était marié depuis quinze mois à Catherine Toupet. Sa qualité de compagnon cultivateur, ou garçon de charrue, chez le sieur Prévost, ne lui permettait de venir coucher dans son manoir que tous les quinze jours. La veille du 20 germinal dernier, jour correspondant au dimanche des Rameaux, qui fut celui de l'assassinat, il ne retourna point chez lui, parce qu'il y était allé le samedi précédent, et que c'était le tour à découcher d'un autre ouvrier de la ferme; mais le lendemain il fut libre de s'absenter jusqu'à midi. Il part, son déjeûner à la main, et gagne en mangeant sa chaumière. Il y arrive avant huit heures et trouve sa femme levée, occupée à allaiter un fils de cinq mois, gage chéri de leur tendresse. Tilloy éprouve une nouvelle fois qu'il est heureux par sa femme et par son fils, il les embrasse tour à tour, prend sa bêche et s'en va fouir un enclos éloigné de sa maison et séparé d'elle par une ferme et deux rues garnies de haies vives. A peine une autre heure s'étaitelle écoulée depuis son départ, que pendant qu'il est occupé à disposer son enclos à recevoir la pomme de terre qui doit nourrir son épouse, un quidam, profitant de l'absence de Tilloy, profitant de la circonstance d'une fête solennel, et de l'heure à laquelle les rues et les campagnes sont désertes, parce que les habitans sont réunis pour l'exercice des cérémonies religieuses, un quidam, dis-je, s'introduit dans sa maison et entraîne sa femme dans une chambre voisine, servant depuis quelque temps d'étable à vaches. Quel était son but?.... Catherine Toupet n'était âgée que de vingtquatre ans sans doute elle avait quelques charmes ; elle offrait du moins ceux de la jeunesse. Faut-il d'ail

leurs des appas à la brutalité? En faut-il à l'homme qui, parce qu'une femme refuse de se livrer à lui, l'assassine? En effet, la résistance de Catherine Toupet irrite le brutal qui l'assaille; il aperçoit une cognée, la saisit, et en frappe sa victime. Elle chancelle, elle tombe; mais bientôt la vertu la ranime; elle tire de sa poche un couteau à manche de corne de cerf, elle veut l'employer contre son bourreau, lorsque celui-ci le lui arrache et s'en sert pour l'égorger. Bientôt il fuit, et laisse terrassée la femme qu'il n'a pu tout à fait déshonorer. Catherine Toupet, malgré son état, n'est sensible qu'aux menaces de fureur et de rage de son infâme assassin; elle craint qu'il ne revienne consommer son double crime; elle a le courage de se traîner aux portes de la maison et de les fermer au verrou.

Cependant, vers les dix heures trois quarts, Tilloy quitte son ouvrage, pour la fin duquel il faut l'emploi de deux matinées, et il retourne chez lui. Il se présente à la porte vers la rue; il la trouve fermée; celle du jardin l'est aussi. Il va chez une de ses voisines s'informer si sa femme n'y est point on lui répond que non. Il revient à la fenêtre du jardin, y frappe, et ne tarde point à entendre quelque bruit : c'était Catherine Toupet qui marchait en se traînant. Elle ouvre.... O ciel! quel spectacle pour son époux! Tilloy voit sa femme blessée à la tête, à la gorge, et perdant son sang. Il cède alors aux premiers mouvemens qu'inspirent l'effroi et la douleur ; il pousse des cris, il court chez ses voisins. Bientôt sa maison est pleine, et tout le village s'y trouve.

Tilloy aperçoit sur la table le couteau à manche de corne de cerf de sa femme; l'on verra bientôt qu'il est

probable que ce couteau avait été ramassé par quelqu'une des voisines qui remplissaient la maison, et qu'elle l'avait lavé avant de le remettre sur la table. Tilloy ignorait toutes ces circonstances: il le prit machinalement, sans réflexion, et le mit dans sa poche. L'agent municipal et son adjoint arrivent postérieurement; ils interrogent Catherine Toupet; 'ils en regoivent la déclaration qu'un inconnu est entré chez elle et l'a arrangée de cette manière; qu'il l'a entraînée dans la chambre servant d'étable à vaches, et que c'est là qu'il lui a porté les coups. Elle ajoute que l'inconnu était vêtu d'une veste blanche, et laisse entrevoir qu'il voulait jouir d'elle malgré sa volonté.

Le brigadier de gendarmerie, à la résidence de l'Albret, arrive, accompagné de gendarmes; ils dressent procès-verbal, et reçoivent de Catherine Toupet la meme déclaration; mais elley exprime plus ouvertement l'attentat à sa pudeur.

Le juge de paix du canton se transporte plus tard au domicile de Tilloy, et Catherine Toupet lui tient le même langage.

Cependant le juge de paix, d'après la circonstance que Tilloy avait été trouvé porteur du couteau de sa femme, et sur la déclaration faite par deux gendarmes, a décerné un mandat d'arrêt contre lui, et le jury a prononcé qu'il y avait lieu à accusation.

Je ne relèverai point en faveur de mon client que le juge de paix n'était point autorisé à décerner un mandat d'arrêt. Le directeur du jury a réparé cette nullité.

A Dieu ne plaise aussi que je me permette aucune improbation de l'acte de cet officier de police judiciaire, ou contre la décision du jury. Sur un fait aussi

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