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déterminer le Roi à réunir au corps d'armée de l'Inn tout ce qui se trouvait disponible dans les dépôts; préliminaire d'un nouveau recrutement, ma demande excédait les traités; car les bataillons présents à l'armée sous les ordres du général Raglowich, ajoutés aux troupes de de Wrède, dépassaient le contingent dû par la Bavière.

Le Roi me répondit qu'il avait des nouvelles du prince de Neufchâtel; qu'il n'y était pas question de besoins nouveaux : « Vous savez mieux que personne, me dit-il, que je suis à bout de sacrifices; mon contingent est plus que complet, mes engagements remplis; l'Empereur ne prétend pas, sans doute, que je me défende seul contre l'armée autrichienne. »

Je m'attendais à ces objections; je n'avais entretenu le Roi que sur le refus de son ministre de prendre l'initiative de ce dernier effort

Je fis observer au Roi que l'Empereur ne pouvait penser qu'un allié, sur lequel il comptait, hésitait à prendre quelques mesures décisives à la hauteur du danger commun; qu'une résolution contraire exprimée par le Roi me contraindrait à rendre à ma mission diplomatique la précision des rapports purement officiels avec le Ministre de Bavière, et que cette obligation devenait pour moi plus impérieuse du moment que Sa Majesté ne croyait devoir s'inspirer que de renseignements étrangers à ma légation. Le Roi me prit la main, me pria de ne pas me déshabituer de son cabinet, et, après la vive peinture de ses embarras et de ses inquiétudes: « Voyez Montgelas, me dit-il, qu'il sache par vous que nous sommes convenus de tout, qu'il pourvoie à tout; nous ferons encore, soyez-en sûr, tout ce qu'il sera possible de faire. >>

Ce même corps bavarois, placé sur l'Inn par ordre de l'Empereur, disponible, qui, trois mois durant, ne cessa de réclamer vainement un appui et des ordres, accru de renforts difficilement obtenus, était livré à la merci des

événements; nous allons bientôt le voir sur le champ de bataille de Hanau tourner ses armes contre la France.

IV

Les lettres du prince de Neufchâtel au Roi affirmaient l'apparition prochaine d'un corps d'armée destiné à protéger la Bavière, comme je l'affirmais moi-même, en m'appuyant sur les raisons générales d'un système de défense combiné par l'Empereur, et retardé seulement dans son exécution.

L'alarme avait été vive quand le général de Wrède avait signalé son isolement; mais la gravité des situations les plus compromises consiste dans l'impression plus ou moins durable du danger qu'elle apportent avec elles; dès que l'oeil s'habitue à mesurer la distance du danger lui-même, un moment de calme succède à l'agitation. Wrède avait gardé ses lignes, et on ne parlait plus de départ à la cour de Munich.

Tout allait dépendre de l'attitude ultérieure du duc de Castiglione à Wurtzbourg.

Le Roi s'y procura d'exactes informations, et quelques jours s'étaient à peine écoulés que, me prenant à part, il me dit :

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Que veut donc l'Empereur que nous devenions ici? Que croit-il que je puisse faire pour sa défense et la mienne? Le corps d'observation sous les ordres du maréchal Augereau n'est nulle part. Je sais ce qui se passé à Wurtzbourg; le maréchal y est seul. Loin d'y rassembler une armée, il fait filer les régiments à mesure qu'ils arrivent du côte opposé à celui où sont nos troupes. Je veux continuer, en allié fidèle, à faire tout ce qui dépendra de moi; mais si l'Empereur ne vient à mon aide, je ne puis rien garantir. »

Ministre de France, ma réponse était encore facile.

Envisageant les faits sous un aspect plus général, je mettais le salut de la Bavière au prix d'une bataille gagnée. Le passé pouvait à cet égard répondre de l'avenir, et l'Empereur, par ses marches savantes, avait égalé plus d'une fois la grandeur des résultats à leur rapidité.

Mais ces assurances, empruntées à l'époque des victoires, ne suffisaient plus à la situation.

Sa permanence ramenait incessamment le Roi sur le danger qui menaçait la Bavière; il sentait que si le principe de l'alliance devait être écouté seul, tant que la cause de la France ne serait pas désespérée, son devoir de Roi lui défendait de souffrir que l'existence politique de la Bavière fût entraînée dans la chute du système français.

Tandis que le Roi écartait de ses efforts et de ses vœux le moment où il ne lui serait plus permis de séparer sa politique du mouvement général de l'Allemagne, Wrède, de son côté, supportait impatiemment le rôle inactif auquel sa position isolée le réduisait sur l'Inn.

Profitant du passage de M. de la Blanche, secrétaire de l'ambassade de France à Vienne, il en fit un témoin de son délaissement, et un interprète de ses doléances. M. de la Blanche, arrivé à Munich, me remit pour M. de Bassano une dépêche que je réunis à mes observations réitérées et aux représentations officielles du Roi.

V

L'Empereur nous répondait par la bataille de Dresde. La nouvelle en fut apportée à Munich par un officier de l'état-major général, détaché du champ de bataille par le prince de Neufchâtel. Une lettre de la Reine de Saxe au Roi de Bavière ajoutait de précieux détails qu'il s'empressa de me lire.

Le style de cette lettre accusait l'enthousiasme qu'a

vait produit l'apparition de l'Empereur après la bataille dont on s'exagérait, dans le premier moment, les brillants résultats.

La Reine avait vu l'Empereur sur le pont de Dresde à la tête des escadrons de sa garde, la poussière du champ de bataille empreinte sur son uniforme. Elle mandait le noble accueil qu'il avait fait au Roi de Saxe revenant de Prague,

Cet exemple raffermit le Roi de Bavière.

Il était dans le caractère de ce Prince de passer rapidement de l'excès de l'abattement à l'excès de la confiance.

Déjà il voyait l'armée autrichienne détruite et Napoléon dictant la paix dans les murs de Dresde.

Peut-être aussi puisait-il la joie qu'il éprouvait de cette victoire à des sources plus intimes que les espérances d'une paix favorable à son repos, je veux dire à la satisfaction secrète d'avoir résisté aux insinuations qui, plus d'une fois, avaient marchandé son détachement de l'alliance française.

Je crus voir cette pensée dans l'empressement que mit le Roi à me ramener sur les souvenirs de 1805.

Il voulut me lire une lettre que l'Empereur lui avait écrite du camp de Boulogne. C'était au moment de la campagne d'Austerlitz, qui commença par l'invasion des Autrichiens en Bavière : « Cette lettre, me dit le Roi, fut une prophétie d'un bout à l'autre; voyez si je ne suis pas payé pour avoir confiance dans le génie de Napoléon. »

Je lus cette lettre, si remarquable, en effet 1. L'Empereur, levant le camp de Boulogne pour voler au secours de l'Allemagne, écrivait à l'Électeur de Bavière « qu'il eût à peu s'inquiéter de voir les Autrichiens occuper ses États, même sa capitale, qu'il se retirât devant l'armée

1 Voir Appendice.

autrichienne, qu'à tel jour il serait réintégré dans Munich. Quel texte pour moi de réflexions rassurantes appliquées à l'identité de situation! N'était-ce pas le cas pour le Roi de Bavière de déjouer les projets de l'Autriche, comme il l'avait fait pour l'Électeur en 1805, lorsque, laissant au général Nogarola le soin d'entretenir à Vienne l'espoir d'un traité, ce traité se réalisait à Munich entre la Bavière et la France.

Mais autres temps, autres intérêts, autres jeux de la fortune!

La paix n'était pas signée.

La bataille de Dresde avait eu sa revanche à Culm. Des alternatives de revers sans compensation et de succès trop chèrement achetés ne tardèrent pas à épuiser l'Empereur.

Wrède était resté sur l'Inn; mais on ne songeait plus à s'y battre loin de là, des patrouilles d'avant-postes s'étant rencontrées, quelques soldats bavarois tombés au pouvoir des Autrichiens avaient été renvoyés à leurs corps avec cette déclaration que l'Autriche ne se battait pas contre la Bavière. Ainsi se préparait déjà entre les troupes bavaroises et autrichiennes une fusion qui n'attendait plus que le ciment des traités.

VI

On n'avait jamais ignoré au quartier général de l'Empereur aucune des circonstances propres à répandre un jour utile sur l'état moral de la Bavière. Les dispositions de la cour, le peu de confiance du général de Wrède dans sa situation et dans ses forces; en dernier lieu, ces ménagements trop significatifs du général autrichien envers les avant-postes bavarois, tout avait pris place dans mes dépêches et j'avais apporté d'autant plus d'insistance à préciser les moindres indices que la défecfion

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