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1815, les Agents de l'armée prussienne les enlevèrent; et comme, à cette époque, Paris était occupé par des troupes de toutes les nations, chacune fit valoir à son tour des réclamations de la même espèce. Ainsi il est permis de croire que la capitale de la France perdit plus de monuments qu'elle n'aurait été dans le cas de rendre, si on avait prévenu, par une exécution prompte des premiers engagements, cette espèce d'exécution militaire à laquelle on procéda en 1815.

On ignore, au reste, si, parmi les Puissances qui signèrent le Traité de Paris, il y en avait plusieurs qui eussent des réclamations à former à la charge de la France pour contrats et fournitures. La Prusse était dans ce cas. La troisième convention spéciale, du 24 février 1812, avait autorisé les administrateurs et commandants français à faire des réquisitions en Prusse, la valeur des fournitures faites en conséquence devant être imputée sur le solde des contributions que la Prusse avait encore à payer. Les commissaires français usèrent largement de cette faculté. La somme due par la Prusse sur les 220 millions de contributions qu'on avait imposés à quatre millions et demi d'habitants qui lui restaient fut bientôt épuisée; mais les réquisitions ne cessèrent pas, et les habitants continuèrent à faire des fournitures tant qu'ils en conservèrent les moyens.

L'article 19 dit : « Le Gouvernement français s'engage à faire liquider et payer les sommes qu'il se trouverait devoir d'ailleurs dans des pays hors de son territoire, en vertu de contrats ou d'autres engagements formels passés entre des individus ou des établissements particuliers et les autorités françaises, tant pour fournitures qu'à raison d'obligations légales. »>

Les particuliers aussi avaient été les victimes des actes arbitraires des anciens Gouvernements français.....: auront-ils le droit d'en demander la réparation au

Gouvernement légitime? On a senti que les ressources de la monarchie ne suffiraient pas à payer tout ce qui avait été volé ou gaspillé par les autorités françaises pendant vingt ans. Les Puissances contractantes ne voulurent donc pas profiter de la situation où elles se trouvaient à l'égard de la France pour lui imposer une obligation qu'il serait au-dessus de ses forces de remplir. Néanmoins, pour ne pas s'interdire le droit d'invoquer un jour la justice ou la générosité du Gouvernement français en faveur de quelques réclamations de ce genre que leurs sujets pourraient former, elles n'annulèrent pas expressément les droits de ceux-ci; mais elles stipulèrent que, dès ce moment, la France payerait aux particuliers étrangers les véritables dettes reposant sur des engagements formels. Cette stipulation était de la plus rigoureuse justice. Il dépendait des Gouvernements de renoncer, comme ils le firent par le précédent article, à ce qui leur était dû par la France; mais ils n'avaient aucun droit de dépouiller leurs sujets d'une propriété légitime. La France elle-même et tous les Souverains étaient intéressés à ce que ces dettes se payassent, afin que la fermentation qui régnait dans quelques pays limitrophes ne fût pas augmentée par le mécontentement de ceux qui auraient pu se regarder comme les victimes de la révolution par laquelle avait été opérée la restauration du trône des Bourbons. Les ennemis du Trône comptaient bien sur cette disposition des esprits: ils se sont donné beaucoup de mouvement pour entraver l'exécution de l'article 19; elle n'avait pas encore commencé lorsque Napoléon entreprit son expédition en Belgique et dans les provinces rhénanes.

Il faut faire attention aux termes de cet article. La France ne s'engage positivement à payer que ce qu'elle doit à titre de contrats ou d'un autre engagement formel équivalent à un contrat ; ce n'est pas tout: il faut encore

qu'il y ait une fourniture ou que la réclamation soit fondée sur une obligation légale. Ainsi, l'article 19 n'établit pas, comme quelques étrangers l'ont entendu, quatre classes de dettes, savoir: 1° contrats; 2° engagements formels; 3° fournitures; 4° obligations légales; il n'admet que les deux dernières classes, lorsqu'une des deux autres conditions y est réunie. Ainsi le payement d'une fourniture qui n'a pas été faite par suite d'un contrat ou d'un engagement équivalent à un contrat, ne pourra être réclamé en vertu de cet article; aussi peu qu'une obligation fondée dans les lois, mais qui ne provient pas d'un contrat ou d'une fourniture faite.

Les termes de l'article excluent, par conséquent, 1° toutes les sommes dues par la France pour fournitures et prestations qui n'ont pas été faites en vertu d'un contrat ou d'une disposition d'une autorité française portant promesse de payement; 2° toutes les réclamations. qu'on pourrait élever pour propriétés indûment confisquées et dont les armées et les administrations françaises s'étaient emparées contrairement au Droit des Gens; 3° toutes celles qui se rattachent à des réquisitions exercées sans promesse formelle de payement dans des pays alliés ou neutres, à des contributions prélevées dans les mêmes pays, en un mot aux spoliations et aux déprédations de tout genre exercées par les armées et les agents de la France.

Observons encore que l'article ne dit pas : le Gouvernement français fera liquider et payer tout ce qu'il doit à des étrangers, etc.; il dit : tout ce qu'il doit dans les pays hors de son territoire. Il s'ensuit qu'il suffit d'avoir habité, à l'époque du 30 mai 1814, un pays étranger et d'avoir été à la charge de la France, réunissant les conditions convenues, pour pouvoir réclamer en vertu de cet article, sans que le créancier soit dans le cas de prouver sa qualité d'étranger.

On a élevé, à l'occasion de cet article, une question de haute importance on a demandé à quelle époque remontaient les dettes exigibles en vertu du Traité de Paris, et la réponse a varié selon l'intérêt de ceux qui élevaient la question. Les créanciers de la France ont dit: Nos Gouvernements ayant, par l'article 18, qui précède immédiatement, renoncé à tout ce qu'ils avaient à réclamer de la France, non depuis la dernière guerre, non depuis l'année 1800, répondant à l'an VIII de la république française, mais depuis 1792, ont voulu assurer les droits de leurs sujets depuis la même époque; la particule « d'ailleurs », qui lie les deux articles le prouve bien clairement. A cette interprétation on a opposé, de la part des agents de la France, deux décrets de Napoléon, rendus, l'un le 25 février 1808 et l'autre le 13 décembre 1809, et qui, par une disposition éminemment despotique, ont annulé tout ce que la France devait antérieurement à l'année 1800. Ces agents partirent du principe que l'article 19 du Traité de Paris n'ayant sans doute pas voulu accorder aux étrangers une faveur dont ne jouissaient pas les regnicoles, et à laquelle nommément ceux des provinces détachées de la France par ce Traité n'auraient pas eu droit, si ces provinces étaient restées unies à la France, la France était en droit d'appliquer à ces créances les lois et actes de déchéance et, par conséquent, ne devait rien qui fût antérieur à l'année 1800.

Il paraît qu'en examinant cette question litigieuse, d'après les seuls principes du Droit universel, indépendamment des dispositions de l'article 19 du Traité, on peut établir deux distinctions. Il faut d'abord distinguer entre les étrangers habitant des provinces qui n'ont jamais fait partie de la France, et ceux des pays détachés de cette monarchie par le Traité de 1814. La législation française sur la déchéance ne peut, sous aucun prétexte, s'appliquer aux premiers, pourvu qu'ils aient satisfait à

ce que cette législation leur prescrivait par rapport à l'époque de la présentation de leurs titres et au mode de cette présentation.

Quant aux provinces auxquelles la France renonça par le Traité de 1814, comme elles avaient été réunies à ce qu'on appelait Empire français, leurs habitants étaient soumis à la législation française pour toute espèce de contrats, ou d'autres engagements conclus sous le régime de ces lois et, par conséquent, leurs créances postérieures à cette réunion pouvaient être frappées de déchéance, si ces lois en prononçaient une. Il n'en était pas de même pour les sommes qu'ils avaient à réclamer pour dettes contractées avant la réunion. Les Traités par lesquels les provinces avaient été cédées à la France, la chargeaient du payement de ces dettes, et il ne dépendait pas d'elle de se dégager d'une pareille obligation.

La seconde distinction à établir est celle entre des lois rendues d'après la forme prescrite par la Constitution qui régissait la France, et de simples actes de son gouvernement. S'il fallait reconnaître les premières, les autres étaient, dès leur origine, radicalement nuls.

La Constitution n'accordait pas au Gouvernement de statuer sur ce que prescrivent ces décrets. Il pouvait faire des règlements pour l'exécution des lois, mais il ne lui appartenait pas de se mettre à la place du législateur. Or, les décrets des 25 février 1808 et 13 décembre 1809 n'ont été confirmés par aucun acte législatif, et ils sont d'autant plus nuls, qu'un des caractères les plus essentiels qui constituent la loi leur manque: ils n'ont jamais été promulgués. Le Gouvernement légitime de la France a tellement senti cette vérité, qu'il a cru nécessaire de sanctionner le contenu de ces décrets par une clause insérée dans l'article 4 de la loi du 25 mars 1817, qui exclut de la liquidation l'arriéré antérieur à 1801.

Si chaque Français était autorisé, jusqu'à la publication

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