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avec les hommes les plus rapprochés d'eux. Ils semblaient s'être pénétrés de l'opinion qui les enveloppait. Cette opinion et ces souvenirs étaient représentés par des hommes qui portaient les plus beaux noms de la monarchie ou les plus hautes renommées dans les lettres : les Montmorency, les Lévis, les d'Hautefort, les Choiseul, les Kergorlay, les Chateaubriand, les Fitz-James, les Adhémar, les Noailles, les Boisgelin, les Talleyrand de Périgord, les Juigné, les Virieu. Ces hommes suppléaient au nombre par l'énergie ét l'audace de leur fanatisme pour leur cause. Leur attachement aux souverains de l'ancienne race des Bourbons était un culte plus qu'une simple préférence. C'était moins leur puissance que leur histoire qu'ils voulaient reconquérir avec les rois de leur passé. Le matin, avant que la présence des troupes étrangères leur assurât le patronage des coalisés, ils avaient témérairement risqué leur vie en se groupant à pied ou à cheval sur la place de la Concorde, et en arborant seuls une cocarde que le peuple pouvait prendre pour un signe de trahison et punir de mort. Mais, emportés par l'impatience et sachant qu'il faut aux révolutions un dévouement qui ne regarde pas derrière soi, ils avaient joué leur vie pour leur souvenir. Massacrés par le peuple ou par Napoléon s'ils échouaient, ils n'avaient de salut que dans la complicité de l'empereur Alexandre. Il fallait l'arracher, ils allaient l'obtenir.

EUVR. COMPL.

XVII.

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LIVRE CINQUIÈME

Napoléon au village de la Cour-de-France, près de Paris, le 30 mars au soir. Rencontre des troupes françaises en retraite, du général Belliard et de l'empereur. L'empereur apprend la capitulation de Paris. Indignation de Napoléon. Il envoie Caulaincourt à Paris. Vaine tentative de Caulaincourt pour entrer dans Paris. Son retour · près de l'empereur. Il est renvoyé une seconde fois près des alliés. Rencontre du grand-duc Con

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-Napoléon se rend à Fontainebleau.

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stantin et de Caulaincourt aux barrières. Il fait entrer Caulaincourt

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-Alexandre le reçoit. - Entrevue d'Alexandre et de Cau

I

La nuit qui avait précédé cette entrée triomphale des souverains étrangers dans Paris, que faisait l'empereur? Nous avons vu qu'après avoir ordonné la réunion à marche forcée de ses débris pour le 2 avril sous les murs de Paris, il avait quitté Troyes le 30 mars, à l'aube du jour, et qu'accompagné seulement de Berthier, son major général, et de Caulaincourt, son négociateur intime, il s'était précipité à toute course de ses chevaux vers Paris.

Incertain des revers ou des succès de Marmont et de Mortier, il tremblait pour le cœur de son empire, pour sa femme, pour son fils, pour ses frères, pour son trône et pour sa gloire. Il espérait que sa présence et son nom vaudraient une armée pour Paris. Il ne demandait plus que deux jours au temps et un répit à la destinée. Si le temps et la destinée les lui avaient accordés, soixante mille hommes concentrés sous les murs, une artillerie immense, des renforts faciles, un élan populaire imprimé par ses soldats, un ou deux coups d'éclat de ses armes sur Schwartzenberg ou sur Blücher, les négociations reprises par Caulaincourt sur la base de Châtillon, pouvaient lui laisser encore, non la grandeur, mais le trône. Il ne contestait plus avec la nécessité de la paix. Il se hâtait pour la saisir après l'avoir tant de fois dédaignée. Mais la paix, l'empire, le trône et la gloire allaient lui échapper à la fois. Il courait pour apprendre plus vite l'arrêt du destin tant de fois dicté par lui, cette fois contre lui.

II

En deux heures, la voiture de hasard qu'il avait empruntée près de Montereau le mena au galop à travers les sentiers ruraux de ces plaines entre le village d'Essonne et celui de Villejuif, presque aux portes de Paris. Il avait évité Fontainebleau de peur de trouver la ville occupée par des détachements de l'armée de Schwartzenberg. Personne, sur les routes désertes par lesquelles son guide le conduisait, n'avait pu lui jeter un mot précurseur de ce qu'il allait ap

prendre sur le sort de Paris et de ses armées. La nuit était sombre, le froid glacial, l'empereur muet entre ses deux derniers compagnons de fortune. Cette voiture contenait le maître du monde courant au-devant de sa destinée.

Elle s'arrêta au village de la Cour-de-France, bâti sur le dernier mamelon qui domine d'un côté le cours et la vallée de la Seine, de l'autre le cours et la vallée de l'Essonne. Mais l'obscurité ne laissait apercevoir à droite et à gauche de ces deux grands horizons que les lueurs lointaines des feux de bivouacs, s'étendant en lignes sur les coteaux de Villeneuve-Saint-Georges et de Charenton, et se prolongeant plus près jusqu'aux bords de la Seine, sans que l'empereur pût savoir si ces feux étaient ceux de Mortier et de Marmont, ou ceux des camps ennemis.

III

Il se précipita hors de la voiture et courut à la maison de poste pour s'informer de ce qu'il brûlait et tremblait de savoir. Avant de rencontrer un seul homme à interroger, il vit à quelque distance sur la large chaussée du village des soldats débandés qui marchaient en groupes vers Fontainebleau. Il s'étonne et s'indigne. « Comment, s'écrie-t-il, ne dirige-t-on pas ces soldats sur Paris?» Le général Belliard, un de ses lieutenants les plus dévoués, sort, à la voix de l'empereur, de l'ombre de la porte, et lui dit le mot fatal de cette marche à contre-sens. « Paris a capitulé, les ennemis y entrent demain, deux heures après le lever du soleil, et ces troupes sont les restes de l'armée de Mar

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