Abbildungen der Seite
PDF
EPUB
[merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small]

500

Gardes et conducteurs.

21,804

On peut y ajouter :

Officiers de toutes armes.

Canonniers servant les pièces de

1,961

348

751

996

Pacha de Jérusalem, avant-garde. 6,000 Ibrahim, pacha d'Alep..

pacha de Damas.

Mameluks.

Canonniers et ingénieurs anglais.

Total de l'armée turque. . 34,300

Total général des forces employées

contre l'armée d'orient. . .62,703

Si l'on ajoute à ce chiffre les quinze mille marins de la flotte de l'amiral Keith et les deux mille que portait celle qui arriva des Indes, six mille hommes de troupes irrégulières que le grand visir reçut dans le courant de juin, et huit mille hommes qui lui furent amenés par les beys de la haute Égypte, on trouve que cent mille hommes furent employés à la reprise de l'Égypte.... Et de quelle force était alors l'armée qui défendait cette possession? C'est ce que nous allons expliquer, en établissant la situation sommaire de l'armée d'Orient à cette époque.

Menou, général en chef.

[merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][ocr errors][merged small]

Malades aux hôpitaux.

Total des Français en Égypte

au 1 mars 1801.

. . 25,860

Ce fut sous de pareils auspices que la guerre recommença. La position était critique, car c'était au moment où l'armée d'Orient était réduite à quinze mille cinq cents hommes en état d'entrer en campagne, que les événements appelaient Menou à défendre l'Égypte contre une invasion de soixante mille Anglo-Turcs...... Avec un peu d'activité, l'ennemi était sûr d'un prompt succès, même de forcer l'armée fran çaise à déposer les armes; mais, chose extraor dinaire, il fallut encore six mois de campagne avant de la réduire à ce point.....

Ce fut le 1er mars, comme je l'ai dit plus haut, que la flotte anglaise de l'amiral Keith composée de six vaisseaux de ligne et d cinquante-sept corvettes, bricks ou bâtiment de transport, parut en vue des côtes d'E gypte, à l'ouest d'Alexandrie. Vers le soir, ell vint jeter l'ancre sur la rade d'Aboukir, et fi ses dispositions pour y opérer le débarque ment des troupes. Déjà ses premières chalou pes allaient être mises en mer, lorsque tout coup le vent souffla avec violence et força flotte à regagner précipitamment le large. O contre-temps favorisa les Français et leur per mit de prendre quelques dispositions pou accueillir l'ennemi dès qu'il reviendrait. (Vo 8 mars.)

2 mars (11) En France, mort de Demoustier (Charles-Albert), compositeur dramatique di tingué, né à Villers-Coterets, le 11 mars 176 4 (13) Un ambassadeur de l'empereur Paul I le comte Kalitscheff, arrive à Paris charg d'une mission diplomatique auprès du premi

consul.

7 (16) La diète de l'empire germanique ratifie traité de Lunéville qui avait été soumis à so approbation par l'empereur d'Allemagne. 8 (17) La flotte anglaise étant revenue la veil

sur les côtes en face d'Aboukir, six mille hommes du corps expéditionnaire, conduits par le général Ludlow, débarquent à la pointe du jour, entre l'ouverture du lac de Madieh et le fort d'Aboukir. Avantageusement protégés par un feu continu de leurs chaloupes, qui prenaient les Français de front et en flanc, les Anglais se forment aussitôt en ordre de bataille et marchent sur la ligne du général Friant, posté dans les dunes avec la 61°, la 75° et le 18 de dragons. Le combat fut long et sanglant; mais après avoir vainement cherché à enfoncer les rangs du général Ludlow, Friant est obligé de faire retraite et de prendre position devant Alexandrie, tandis que les ennemis achèvent leur débarquement. Cette journée coûte à la France environ cinq cents hommes et cinq pièces d'artillerie. Les Anglais avouent dans leur journal de l'expédition une perte de près de treize cents tués ou blessés. 10 mars (19) - En Italie, les troupes napolitaines évacuent Rome, conformément à l'armistice de Foligno (voy. 18 février). Les Napolitains. étaient en possession de cette ville depuis le 30 septembre 1799.

11 (20) Restés maîtres du terrain par la retraite du général Friant (voy. 8), dix mille Anglais s'avancent sur le fort d'Aboukir, défendu par le chef de bataillon Vinache, avec cent quarante-quatre hommes, et l'investissent de tous côtés.

13 (22) Pressé de pénétrer dans l'intérieur du pays, Abercromby marche avec douze mille hommes sur le général Friant, revenu la veille près du lac de Madieh et renforcé du général Lanusse, qui était accouru des environs du Caire sur la nouvelle du débarquement des Anglais. L'attaque fut vive et acharnée, mais les forces étaient trop disproportionnées pour que le résultat fut un seul instant indécis. Après avoir perdu cinq cent vingt hommes, les deux chefs français abandonnent leur position et font retraite sur Canope, en attendant l'arrivée de Menou, qui accourt avec le reste de ses troupes. Le général français arrive à Ramanieh et poursuit le surlendemain sa route sur Damanhour, où il est rejoint par les généraux Reynier et Rampon.

14 (23) Un grand événement politique se passe alors en Angleterre. Le fameux Pitt, << l'ennemi du genre humain, » comme le qualifia la convention nationale dans un mouvement de haine, mécontent de la guerre parlementaire que lui faisaient ses adversaires, et convaincu que l'esprit du peuple devenait de jour en jour plus en opposition avec son grand système arrêté contre la France, donne sa démission de premier ministre plutôt que de changer de politique, et entraîne avec lui la dissolution du cabinet. Après avoir

18

19

20

21

allumé une guerre désastreuse de dix ans, précipité ses alliés dans le gouffre et favorisé l'agrandissement de la France, son orgueil s'opposait à ce qu'il entrât en négociations avec le gouvernement consulaire..... Ce fut Henry Addington qui le remplaça. Dès ce moment la politique du gouvernement britannique se modifie et se rapproche insensiblement vers les idées de la paix. Mais un revirement complet étant impossible, il fallut mitiger et attendre des jours plus favorables pour se rallier aux bases établies par le traité de Lunéville, qui venait d'être sanctionné par toutes les puissances continentales.

mars (27)—En Égypte, la garnison du fort d'Aboukir, menacée d'être emportée d'assaut, se rend par capitulation après sept jours de siége. (Voy. 11 mars.)

Au même instant, Menou (voy. 13) arrive avec ses troupes près d'Alexandrie et y prend position.

(28) Le corps législatif de France ratifie le traité de Luneville et félicite le premier consul sur la fin de la guerre continentale.

(29) Décidé à livrer bataille à l'armée anglaise, Menou concentre ses troupes en avant d'Alexandrie, et donne ses ordres pour commencer l'attaque le lendemain matin.

(30) Bataille de Canope. A quatre heures du matin, la petite armée française, forte de neuf mille sept cent soixante hommes ', dont treize cent quatre-vingts chevaux, et divisée en trois colonnes principales, se met en mouvement et aborde vigoureusement la première ligne de l'armée anglaise, forte de onze mille sept cent trente-neuf hommes sous les armes. Le choc fut terrible pendant quelques instants, toute la ligne en fut ébranlée. Mais chargés à leur tour et foudroyés par la nombreuse artillerie anglaise favorablement placée sur le front de leur position, déjà protégée par le feu des chaloupes qui longeaient la côte, les Français sont obligés de reculer et d'aller reformer leur

[merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][ocr errors][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small]

ordre de bataille hors de la portée des batteries. Revenus peu après, ils s'élancent de nouveau au pas de charge sur les troupes anglaises, les attaquent avec impétuosité, mais c'est encore en vain. Chaque tentative pour enfoncer l'ennemi est repoussée avec perte et compromet de plus en plus le sort de la journée. Toutefois Menou ne perd point courage; espérant changer la bataille de face par un coup hardi ou plutôt désespéré, il ordonne au général Roize de réunir sa cavalerie et de charger l'ennemi à outrance sur son centre. C'était plus que téméraire, puisqu'on allait volontairement sacrifier ces braves, aucune troupe n'étant disponible pour protéger leur marche et appuyer leur attaque; mais l'ordre était formel et il fallut obéir. Roize, qui comprenait parfaitement l'imprudence de son général en chef, réunit froidement ses dragons: « Mes amis, leur dit-il, on nous envoie à la gloire et à la mort, marchons! » La charge sonne : les dragons s'élancent, abordent et culbutent la première ligne, pénètrent jusqu'à la seconde, la sabrent et la traversent encore. Une partie d'entre eux se jettent alors en désespérés au milieu du camp occupé par l'état-major ennemi et y font un carnage terrible. Mais que pouvaient ces braves abandonnés au centre de l'armée anglaise? Leur perte était certaine. Un officier des dragons français se jette dans la tente du général Abercromby, attaque ce chef à coup de sabre et le blesse mortellement; mais au même instant il reçoit un coup de feu d'un caporal du 42 et tombe lui-même. Le brave Roize subissait le même sort et dans le même moment: entouré d'un grand nombre d'Anglais, et coupé du gros de sa brigade, occupée à sabrer l'infanterie ennemie, le général français venait de mettre pied à terre et se battait en lion, lorsqu'il reçoit une balle dans la poitrine et tombe avec le petit nombre de dragons qui l'avaient suivi. Cet échec, qu'il était facile de prévoir, décide enfin du sort de la bataille. Convaincu de l'inutilité de ses attaques, et craignant en outre que les Anglais ne débordassent sa propre ligne, considérablement ébranlée, Menou ordonne la retraite, et se retire en bon ordre sur Alexandrie, où il concentre ses forces, en attendant les événements.

Cette malheureuse journée coûta aux Français huit cents tués, deux cents blessés, deux cent cinquante prisonniers, deux ca-nons et un drapeau de bataillon; perte peu considérable lorsqu'on considère l'acharnement de l'action, mais épouvantable pour une armée qui ne comptait qu'à peine la moitié des forces qu'elle avait à combattre. Indépendamment du général Roize (César), les Français curent encore à déplorer la perte du général

21

[ocr errors]

Baudot, mortellement blessé en chargeant à la tête de la 85 demi-brigade. Plusieurs autres généraux se trouvaient en outre parmi les blessés; c'étaient Lanusse, Eppler, d'Estaing et Sully; ce dernier eut la cuisse emportée par un boulet de canon. Quant aux pertes des vainqueurs, elles sont restées inconnues. On a lieu de s'étonner que les Tables de bronze, travail en quelque sorte officiel, rapportent la mort du brave Roize à la bataille d'Aboukir, le 25 juillet 1799. Je ne sais à quoi attribuer une erreur aussi étrange, car les renseignements ne manquent point sur ce déplorable événement. M. de Courcelles s'est également trompé pour ce qui regarde la date de la perte du général Baudot, car il la porte (Dictionnaire, tome I", page 388) au 21 mai 1801, c'est-à-dire deux mois après la véritable époque.

mars (30)—Lorsque la fortune de la guerre forçait l'armée d'Orient à courber son noble front devant le drapeau anglais, et lui faisait prévoir la perte prochaine de ses conquêtes, le gouvernement consulaire jetait pour la France, par un traité négocié et signé à Madrid entre Lucien Bonaparte et le prince de la Paix, au nom de la république et du roi d'Espagne, les bases de nouvelles acquisitions territoriales. Cette convention, qu'il importe de connaître. autant pour bien apprécier l'ascendant que la politique de Bonaparte prenait journelle ment à l'extérieur, que pour suivre les agran dissements de la France, portait :

« Le premier consul de la république française et S. M. C. désirant fixer d'une manière stable les États que le fils de l'infant de Parme doit recevoir en équivalent du duché de Parme, etc., ont arrêté les articles sui

vants :

I. Le duc régnant de Parme renonce à per pétuité, pour lui et ses héritiers, au duché de Parme avec toutes ses dépendances, en faveur de la république française, et S. M. C. garan tit cette rénonciation. Le grand duché de Tos cane, auquel le grand-duc renonce également et dont la cession est garantie par l'empereu d'Allemagne, sera dorné au fils du duc d Parme, en indemnisation pour les pays céde par l'infant son père.

II. Le prince de Parme se rendra à Fl rence où il sera reconnu souverain de toute les possessions qui appartiennent au grand-d ché, en recevant des autorités constituées d pays les clefs des forts, et le serment de fide lité qu'on doit lui prêter en qualité de souve rain. Le premier consul contribuera de so autorité à ce que ces actes s'exécutent pais blement.

III. Le prince de Parme sera reconnu roi Toscane avec tous les honneurs qui appartien

nent à son rang. Le premier consul le reconnaîtra et le fera traîter comme tel par les autres puissances; les démarches nécessaires à cet effet devront avoir lieu avant la prise de possession.

IV. La partie de l'ile d'Elbe qui appartient. à la Toscane et dépend de cet État, restera au pouvoir de la république française, et le premier consul donnera en indemnité au roi de Toscane, le pays de Piombino, qui appartient au roi de Naples.

VI. Comme la nouvelle maison qui s'étatablit en Toscane, est de la famille d'Espagne, ces États seront à perpétuité une propriété de l'Espagne, et il sera appelé au trône un infant de la famille si le roi actuel ou ses enfants n'avaient point de postérité : dans ce cas, les fils de la famille régnante en Espagne succéderont à ces États.

VII. Le premier consul et S. M. C. conviennent de procurer au duc régnant de Parme, en considération de sa rénonciation en faveur de son fils, des indemnités proportionnelles, soit en possessions, soit en revenus. »

Conformément à ce traité, le prince de Parme, est proclamé souverain de la Toscane, sous le nom de Louis I", roi d'Étrurie.

23-24 mars (2-3 germinal) — Mais tandis que la France ajoute quelques nouvelles possessions à ses nombreuses conquêtes dans le midi. un horrible forfait lui enlève son principal allié dans le Nord et vient encore une fois menacer la tranquillité de l'Europe. C'est Paul I, empereur de Russie, qui est étranglé dans sa chambre, pendant la nuit du 23 au 24 mars, par les principaux personnages de sa cour. Cet assassinat, qui sauva l'Angleterre et opéra un si brusque changement dans la grande crise qui allait éclater en Europe, exige quelques détails : l'histoire ne saurait assez bien éclaicir ce triste événement, car il fait époque dans les annales politiques du dix-neuvième siècle.

On a vu que Paul Ier épousa vivement la haine que l'Angleterre portait à la France, et qu'il concourut de toutes ses forces au développement des idées qui provoquèrent la seconde coalition. La guerre qu'il fit à la république n'était pour lui ni une question d'intérêt matériel, ni une question dynastique comme on le prétendit, mais une question de principes. Personnifiant le pouvoir absolu, il détestait les gouvernements démocratiques et avait une horreur invincible pour les révolu tions populaires. Ce n'était donc qu'un moyen de vengeance qu'il demandait; la seconde ligue européenne la lui procura. Mais froissé par les désastres qui décimèrent ses troupes en Italie, en Suisse et en Hollande, revers que l'empereur attribua, à tort ou à raison, à l'Ân

gleterre et à l'Autriche, il commença par rappeler les débris de ses armées, puis se retira insensiblement de la coalition, laissant à ses anciens coalisés le soin de débattre leurs propres affaires. Les choses en étaient venues à ce point, lorsque la journée du 18 brumaire survint et plaça Bonaparte à la tête de la république. Le czar, qui ne s'était mis en mouvement que pour combattre la turbulence directoriale, accueillit la nouvelle du coup d'État avec satisfaction; il y voyait la fin de l'anarchie qui tourmentait la France et troublait l'Europe, ainsi qu'un retour vers l'unité gouvernementale. Les prodiges que Bonaparte avait opérés en Italie et en Égypte avaient vivement frappé l'esprit de Paul, et le merveilleux passage du Saint-Bernard, couronné par la victoire de Marengo, acheva de l'enthousiasmer pour le héros de la France. Ayant fait placer le buste du premier consul dans son palais de l'Hermitage, il lui arrivait souvent, lorsqu'il passait devant ce buste, de se découvrir et de le saluer du nom de grand homme! De son côté, Bonaparte, qui comprenait tous les résultats que la France obtiendrait d'une alliance intime avec la Russie, profita des dispositions bienveillantes de l'empereur pour rapprocher les deux pays et pour renouer les communications diplomatiques interrompues depuis le commencement de la révolution. Des agents furent envoyés de part et d'autre, et dès ce moment une grande intimité s'établit entre les deux États : leurs chefs se comprenaient, car Paul, malgré les bizarreries de son caractère, savait apprécier le génie: malheureusement il naquit trop tôt pour la Russie. Des concessions furent faites respectivement, en attendant qu'une alliance offensive et défensive vint lier définitivement les deux colosses du nord et du midi. Pour preuve d'amitié, le premier consul admit l'intervention de Paul dans ses négociations avec Naples et les autres États italiens. et, en retour, l'empereur renvoya le comte de Lille de ses États...

Mais ce n'était là que les bons offices d'une simple amitié, et dans la situation de l'Europe, une alliance aussi formidable devait enfanter quelque chose qui fut réellement digne d'elle. Il devait surtout en résulter quelque combinaison grandiose contre l'Angleterre, car c'était là la base de l'alliance et le point principal de la politique française. Deux grands projets naquirent en effet des relations confidentielles des cabinets de Paris et de Pétersbourg. Pour réduire le gouvernement britannique à la paix, il fallait nécessairement l'attaquer dans ses parties les plus sensibles, c'est-à-dire dans ses intérêts vitaux, et pour obtenir ce résultat, il importait de ruiner son commerce en l'excluant du continent... La formation d'une ligue européenne fut

donc arrêtée; la France et la Russie se placeraient à sa tête, et on y comprendrait la Suède, le Danemark et l'Espagne, alliés intimes de l'une et de l'autre des puissances contractantes. L'Angleterre serait déclarée en état de blocus, et tous les ports des puissances alliées fermées à ses bâtiments. C'était la même idée que Napoléon développa plus tard dans son grand système de blocus continental. L'exécution de ce vaste plan devait immanquablement entraîner la perte de la Grande-Bretagne.

Le second projet convenu entre Paul Ier et Bonaparte était plus merveilleux encore : il ne s'agissait que de détruire l'empire anglais dans les Indes en dirigeant, par terre, une armée de soixante-dix mille hommes vers les rives du Gange! Le plan de cette expédition gigantesque existe encore; il est tout entier écrit de la main du premier consul. En lisant ces pages sublimes de génie, on se croit transporté aux âges fabuleux. Rome et Athènes y reflètent avec leurs grandeurs et toutes leurs merveilles. Tout était prévu; le temps et les distancees étaient calculées avec une précision mathématique. L'expédition devait commencer au mois de mai, et avant le mois de septembre, le drapeau tricolore flotterait sur les bords enchanteurs de l'Indus! Trente-cinq mille hommes de troupes françaises, choisis par le premier consul et à la tête desquels il se plaçait comme le héros macédonien, partiraient des bords du Rhin, traverseraient rapidement la Souabe pour se porter sur le Danube; des bateaux de transport, préparés d'avance avec soin, descendraient tout le fleuve jusqu'à la mer Noire, où des vaisseaux russes prendraient l'armée pour la transporter à Tangarof, en traversant la mer d'Azof; passant ensuite le Don, et suivant la rive droite du Volga, le corps expéditionnaire s'avancerait sur Astracan, puis sur Astrabad, ville maritime de la Perse. Là, les Français devaient être rejoints, à jour fixe, par trente-cinq mille Russes, dont dix mille Cosaques, tous de troupes d'élite, réunies d'avance sur les bords de la mer Caspienne. L'armée, ainsi portée à soixante-dix mille hommes, pénétrerait alors dans la Tartarie, dont elle entraînerait des milliers de Cosaques pour éclairer sa marche, et poursuivrait sa route sur l'Indus en passant par Hérat, Ferat et Candebar. Les étapes et les lieux de repos étaient arrêtés d'avance. Il fallait vingt jours pour porter l'armée des bords du Rhin à l'embouchure du Danube, seize du Danube à Tangarof, vingt-neuf de Tangarof à Astracan, et cinquante cinq d'Astracan à la rive droite de l'Indus. Ainsi, en cent vingt ou cent trente jours, on franchissait par terre l'immense distance qui sépare Paris de Madras ou de Bombay!

Cette grande combinaison frappait l'imagination; elle parut une chimère pour bien des personnes, mais Bonaparte avait opéré tant de prodiges que tout ce qui sortait de son génie créateur lui semblait possible. Les grandes choses allaient à sa taille; elles formaient son domaine, sa sphère, et tout ce qu'il embrassait, il l'élevait jusqu'à sa hauteur. Ce plan a pu être taxé d'utopie, de rêve glorieux d'une imagination ardente, mais on a eu tort d'oublier qu'il y a certaines conceptions du génie que l'on ne doit point mesurer à la toise commune, et qu'elles exigent un second génie pour être comprises. L'Angleterre seule sentit toute l'importance de ce projet, aussi bien que celle de la ligue maritime, et comprit parfaitement tout ce qu'elle devait craindre de l'alliance de la France avec la Russie. Les journaux de l'époque sont pleins des terreurs que la nation et le gouvernement anglais ressentirent à la nouvelle de ce plan de campagne. Pour y répondre, le ministère demanda vingt-cinq millions livres sterling; mais, pour la première fois depuis le commencement de la guerre. le parlement refusa ce nouveau sacrifice. Ce refus était une protestation contre le système de Pitt, car la nation anglaise était également fatiguée et ne voyait pour elle aucun résultat dans la longue commotion qui bouleversait le monde. La masse était pour la paix; le cabinet seul tenait hautement à la guerre. Cette circonstance rendait sa situation excessivement critique, mais le pouvoir ne perdit point courage; sa politique avait trop souvent détourné l'orage pour qu'il désespérât de sa cause, et qu'il ne parvint pas encore une fois à surmonter les obstacles. Son existence était mise en jeu et dépendait de l'alliance franco-russe. C'étai donc par là qu'il fallait commencer, et que se premiers coups devaient se porter. Mais pou que ses efforts pussent être couronnés de suc cès, un changement de pouvoir, soit en France soit en Russie, était indispensable. Le com plot du 3 nivôse ayant manqué son but e agrandi immensément le pouvoir de Bona parte, ce fut du côté de la Russie que le cabi net britannique tourna ses espérances. Grâc aux intrigues de son ambassadeur à Saint-P tersbourg, lord Withworth, un vaste compl s'ourdit contre l'empereur, au sein même d son palais. Plusieurs grands personnages er trèrent dans la conspiration: on y remarqua les frères Platon, Nicolas et Valérien Zouboff, généraux Bennigsen, Ouwaroff, Argamakof le comte de Pahlen, gouverneur militaire Saint-Pétersbourg, etc. On ne voulait d'abo qu'une abdication, puis reléguer l'empere dans quelque forteresse; mais une fois lancé un assassinat ne devait point arrêter les co spirateurs; c'était un point tacitement co

« ZurückWeiter »