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de la part des carcistes, à la cause desquels toute la population s'intéressait. Le seigneur de Vins, neveu de Carces, entra le premier, en campagne, il prit quelques villages, échoua devant d'autres, et écrasa une compagnie de razats que La Berlière commandait.

Les carcistes se fortifièrent ensuite au château du Puy-Sainte-Réparade, position avantageuse d'où ils fesaient de fréquentes sorties. Aix était défendue par Alfonse d'Ornano, à la tête de quatre cents soldats corses; les villages voisins étaient mis à contribution par les carcistes, la terreur qu'ils inspiraient leur valut l'épithète de Marabous. Le comte de Suze, inquiété de toutes parts, quitta Aix.

A l'assemblée des communautés que le parlement convoqua, à Aix, pour mettre un terme aux hostilités, les carcistes et les razats ne parurent guère disposés à s'entendre. Le comte de Carces rejeta toute voie d'accommodement. Le pays continuait à être désolé : Reynier, chef carciste massacrait tous les razats qui tombaient dans ses mains; il fut tué, lui-même, à coups d'arquebuse, sur la place de la Magdeleine, à Aix. Le peuple outré vint assiéger, dans le couvent des Augustins, les corses d'Ornano; Meyrargues, premier consul, calma l'irritation populaire. Ailleurs, mêmes scènes de désordre. Les carcistes de St.-Paul de Vence et de Grasse, chassés par les razats, allèrent se

faire tailler en pièces à Cuers par d'autres razats, sortis d'Hyères, de Toulon, de Soliers, d'Ollioules et de la Vallette, sous les ordres des capitaines Bouyet et Sauzet. A Cabasse et à Lorgues, les razats tuèrent huit cents personnes ; ils furent sur le point de prendre le marquis de Trans dont ils pillèrent le château; mais ils ne purent se rendre maîtres du Puy-Sainte-Réparade; une colonne, formée de quatre cents corses, échoua devant ce château. Le premier consul et l'Assesseur d'Aix allèrent, à Avignon, supplier le cardinal d'Armagnac d'essayer de désarmer ces deux partis, acharnés à leur ruine commune: on convint de remettre le Puy-Sainte-Réparade à des mains. neutres. Mais Besaudun, gouverneur de cette place, refusa d'obéir à de Carces. Aussi d'Armagnac, ayant échoué dans sa mission de paix, retourna à Avignon.

La reine Catherine de Médicis suppliée, à son tour, de mettre un terme à de si sanglantes hostilités, fit signifier, par l'abbé de Gadagne, à tous les hommes de guerre, de déposer leurs armes dans le délai de huit jours. Cette princesse fit son entrée solennelle à Marseille, le 5 juin 1579, accompagnée du cardinal de Bourbon, des princes de Condé et de Conti, du maréchal de Damville et de Henri d'Angoulême, grand prieur de France. Les carcistes se soumirent, les razats aussi; seulement ils rasèrent, à Brignolles, la maison du seigneur

de Vins. Catherine s'occupa activement de pacifier la province; la charge de gouverneur du pays fut donnée au prince Henri d'Angoulême. Le comte de Carces ne put d'abord se rendre auprès de la reine, qui l'avait fait appeler, parce qu'il sut que les razats devaient lui tendre un piège en route; mais s'étant ensuite fait accompagner par une foule de gentilshommes, il alla à Aix où la reine mit en présence devant elle, dans le château de Beauvoisin, les chefs carcistes et les chefs razats, auxquels elle ordonna une accolade générale. Elle quitta Aix le 6 juillet, après avoir aussi réconcilié les principaux citoyens d'Arles.

Henri d'Angoulême, après avoir fait enregistrer au parlement d'Aix ses provisions de gouverneur, renvoya les Corses. La paix devint générale et la joie populaire se manifestait partout. Mais la peste et la famine, qui semblaient aux aguets, se précipitèrent sur la Provence calmée. A Marseille, vingt mille habitans périrent. Un vaisseau, venu du levant, avait transmis ce fléau à Cannes qui le deversa dans tout le midi. Jean Paul Nas, Castilloni et Jean Bon, consuls d'Aix, désertèrent lâchement leur poste; le viguier Bordon et l'assesseur Honoré Guiran se distinguèrent par leur courage. Le parlement, qui punit les consuls,. alla, par mesure de sûreté, tenir ses assises à Cucuron. La cour des comptes se retira à Brignolles.

A la fin de la contagion, le parlement fit

brûler vif, à Aix, après avoir fait fustiger sa concubine, un ermite appelé Valery de SainteColombe; pendant toute la durée du fléau, le peuple l'avait vénéré comme un saint.

La mort du duc d'Anjou, frère de Henri III, venait de rendre le roi de Navarre heritier présomptif de la couronne. Le souverain pontife et le roi d'Espagne s'étant effrayés sur les résultats de cet évènement, on vit les évêques et les prêtres, ou gagnés par Rome, ou soudoyés par l'Espagne, déplorer, dans la chaire et dans le confessionnal, l'épouvantable malheur d'une nation sur le point de devenir hérétique. La ligue catholique prit plus d'ensemble, le duc de Guise montra davantage ses desseins, et, au moment favorable, ce prince se leva contre le roi le mot d'ordre se répandit partout. Les ligues provinciales furent renforcées, des chefs officiels leur furent donnés ; à la place du comte de Carces, mort le 20 avril 1582, on nomma le comte de Sault, général catholique du pays. Mais le véritable chef fut le seigneur de Vins. Hubert de la Garde, seigneur de Vins, né d'une ancienne famille d'Aix, avait une ame ambitieuse, des qualités militaires; de la prudence dans le conseil; il était gracieux et populaire. Son défaut de modération dans la vengeance des injures, son ignorance de l'histoire, qui pouvaient nuire à son avancement personnel, le rendaient très

apte à se mettre à la tête d'une faction. D'abord renfermé dans son château de Forcalqueiret, il semblait vouloir éviter l'occasion de lever le masque; il attendait que la fortune lui offrit les moyens d'assurer à sa cause un prompt triomphe. Ainsi, se tenant à l'écart, il lança, pour sonder le terrein, un capitaine des gardes françaises, nommé Lafontaine, avec la mission de tenter de séduire la garnison du Puy-Sainte-Réparade, au mois de mars 1585. Ce capitaine fut pris, pendu, et sa tête placée sur un poteau de la Porte-SaintJean. Cet échec ne ralentit pas les ligueurs, et, le 3 avril 1585, le seigneur de Vins fit savoir au gouverneur Henri d'Angoulême, qu'il prenait les armes, non pour son propre et particulier intérêt, mais pour les princes catholiques, et pour le soutien de la religion, que les prétendus réformés voulaient détruire.

Après cette vigoureuse déclaration de guerre, de Vins s'élance sur son cheval de bataille et sonne l'appel aux armes ; cet appel se répand dans la Provence, comme un tocsin qui éclate partout à la fois; les seigneurs de SaintAndré, de Meyrargues, de Rousset, de Gréoulx, de Mons, de Salerne accourent auprès de lui; le cor des batailles résonne dans tous les manoirs, du haut de toutes les plates-formes des châteaux ; cette troupe ardente commandée par de Vins vient grossir celle du comte de Sault qui, se

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