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il était né à Beauveret, en 1578, d'an berger, et

devenu avait été élevé par les soins de son curé, vicaire de Notre-Dame-des-Accoules à Marseille ; il eut bientôt le renom d'un bon prédicateur. Gaufrèdy avait des sens très inflammables, une jeune et gracieuse personne, Magdeleine de Mand'une andols et la Palud, âgée de seize ans, cienne famille Marseillaise, lui plut. Elle devint sa pénitente; il exalta son cœur et son imagination par la peinture de sa passion. La jeune fille, élevée dans les austères pratiques de la piété, se reprocha d'avoir trop complaisamment écouté le langage fascinateur du vicaire; elle alla se renfermer au couvent des Ursulines, afin de rompre toutes relations avec un confesseur aussi dangereux; mais la solitude et les méditations mystiques du cloître n'exaltèrent que trop la tête de la pauvre recluse ; elle ne pouvait écarter la pensée de Gaufrèdy, du jeune vicaire; cette pensée torturait cette gémissante fille, dans sa cellule, dans la stalle du chœur, partout. Aussi Gaufrèdy, qui vint la voir au parloir, n'eut pas de peine à la décider à rentrer dans le monde. Magdeleine, après avoir quitté le monastère, s'abandonna à Gaufrèdy.

Mais quand elle se fut souillée par les embrassement d'un prêtre, elle perdit la raison; sa faible tête lui grossissait son crime, elle se regardait comme frappée d'une malédiction éternelle; ses discours devinrent incohérents, ses

actions singulières; dans le désordre de ses paroles, elle prononçait le nom de Gaufrèdy et couvrait ce nom aimé de blasphêmes ou d'expressions tendres. On la crut possédée; le sérieux et ridicule Sébastien Michaelis, vicaire-général des frêres prêcheurs, exorcisa Magdeleine à la Ste.Baume, et la déclara possédée; on conduisit la jeune enfant à l'archevêché d'Aix, où elle eut à subir une grave interrogation de la part du premier président Guillaume de Vins. D'après tout ce qu'on recueillit, on ordonna l'arrestation de Louis Gaufrèdy, laquelle arrestation fut opérée par les soins d'Antoine de Legivrau et de Thoron, conseillers instructeurs de cette ridicule affaire.

Mais nos pères ne la jugeaient pas ainsi; Magdeleine fit d'étranges folies devant la cour, elle riait, pleurait, miaulait, chantait, se tordait, ou restait calme, elle embrassait du regard Gaufrèdy, ou bien elle l'invectivait; elle proclamait aujourd'hui son innocence, et le lendemain, bien arrosée d'eau bénite, elle retraçait, avec une hideuse licence de termes, de dégoûtantes scènes de volupté qu'elle assurait s'être passées entre elle et son confesseur. La cour n'y entendait plus rien, mais Michaelis soutenait l'obsession et expliquait les contradictions et les incohérences de conduite et de langage de Magdeleine, par les légions de diables qui s'étaient logés dans ce corps, tourmenté seulement de vapeurs hystériques.

Enfin, Gaufrèdy, excédé par les prières, les menaces des capucins qui ne le quittaient ni jour ni nuit, perdant tout-à-fait la tête, en proie à des hallucinations, exténué de larmes, de peur et de jeûne, emporté dans un cahos de questions de toutes espèces, se déclara sorcier à la grande satisfaction de tous. Trois médecins bien dignes et un chirurgien, Jacques Fontaines Louis Greis, Antoine Mérindol et Pierre Bontemps, examinent attentivement les corps de Gaufrèdy et de Magdeleine de Mandols, ils y reconnaissent des taches qui ne pouvaient être que des signes de sorcellerie. Magdeleine en montrait une dans la partie postérieure de son corps, qu'elle assurait lui avoir été faite par Gaufrèdy, dans une nuit d'infernale initiation. Plus de doute, Gaufrèdy est sorcier, il l'est par ses aveux, il l'est par ses taches. Gaufrèdy convient de tout. De Thoron, nommé conseiller rapporteur, lut l'énorme fatras de toutes les accusations portées contre ce pauvre fou. A mesure qu'il fesait passer sous les yeux des membres de la chambre de la Tounelle, ces scènes d'horrible magie, il se donnait à lui-même des peurs épouvantables, il pâlissait et tremblait en fesant sa formidable lecture. Les imaginations des juges étaient assiégées par mille noires pensées, quand tout-à-coup un bruit résonne dans la cheminée, et un homme noir des pieds à la tête en tombe; on le

prend pour le diable, les juges fuient épouvantés, de Thoron ne peut en faire autant, il s'embarrasse dans son bureau, dans sa robe, dans ses volumineux dossiers, interdit, suffoqué de peur, il prend le parti de se mettre à genoux devant ce diable dont il avait dit tant de mal dans son rapport. Le diable lui rit au nez, c'était un ra

moneur.

Cette farce lugubre eut un horrible dénoûment. Par arrêt du 30 avril 1611, on causa une grande liesse dans le populaire, là on condamna à être brûlé vif Louis Gaufrèdy. Tout se passa parfaitement en règle ; l'évêque de Marseille, Jacques Turiscella, vint accomplir, à l'égard de Gaufrèdy, toutes les cérémonies de la dégradation, cérémonies lentes, affreuses, qui remplissaient de terreur l'agonie du pauvre prêtre; Turiscella mit à Gaufrèdy les habits sacerdotaux, puis il les lui enleva, ensuite il lui lava et racla les doigts qui avaient été sacrés le jour de son ordination, les deux pouces et les deux index. Après, Gaufrèdy fut brûlé. Le peuple voulait qu'on brûlât aussi Magdeleine, mais on ne lui donna pas cette autre joie; Magdeleine fut enfermée dans un couvent. Un couvent de femmes devint fou, à la suite de ce procès et de cette exécution barbare, celui des religieuses de Sainte-Claire. Toutes ces filles se crurent possédées, et exécutèrent à minuit, à la fois, des danses obscènes et sacrilèges.

On les fit sortir et on les conduisit à l'archevêché où on les calma par des pénitences et des macérations.

A la mort de Henri IV, la reine son épouse devint régente; la minorité de son fils Louis XIII fu orageuse, les protestans remuèrent et intriguèrent Ils obtinrent la convocation des états-généraux à Paris, lesquels se tinrent au mois d'octobre 1614. La Provence y envoya l'archevêque d'Aix, Villeneuve des Arcs, Matheret de Salignac, et la Motte Sabolin; Théocrène de Glandevès, Balthasar de Vins et Lein de Valbelle y représentèrent Marseille.

Louis XIII, devenu majeur, donna les sceaux à Guillaume de Vins, premier président du parlement d'Aix, destitué au mois de septembre de l'année 1616 pour avoir blâmé l'arrestation au Louvre du prince de Condé; il fut encore rappelé à la cour, avec le même titre de chancelier après l'exécution du maréchal d'Ancre. Escalin de Bras reçut la charge du premier président du parlement de Provence. Le protestantisme et le catholicisme se réveillaient de leurs fureurs, non éteintes mais assoupies; les uns demandaient la révocation de l'édit de Nantes; les autres, menacés même dans leur foi et l'exercice de leur culte, se rassemblaient séditieusement. Le duc de Rohan était à la tête des dissidens. Louis XIII vint, en personne, soumettre quelques lieux où les protestans commençaient

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