Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

terre. Les preuves de la réalité de cette sentence et de son exécution, par l'affaissement des continens qu'habitoit cette race criminelle, et de leur submersion, désignées par la rupture des fontaines du grand abyme et l'accumulation prodigieuse des eaux, sont présentées dans le plus grand détail, dans les lettres sur l'histoire de la Terre et de l'Homme, adressées à la reine de la Grande-Bretagne, et dans la sixième des Lettres sur l'histoire physique de la Terre, écrites au professeur Blumenbach, à Gottingue (1).

« C'est à propos des basaltes, continue M. Patrin, que » M. Deluc affirme qu'il faut bien se garder de faire des >> recherches sur les causes de la cristallisation, attendu que » c'est un mystère: nous ne devons faire autre chose que nous »taire et admirer. C'est, dit-il, un sentiment bien doux que » celui de l'admiration! heureux le naturaliste qui éprouve >> ce sentiment! il s'arrête où l'intelligence humaine ne peut » pénétrer; il s'élève à l'Auteur de la nature, et ne s'égare pas n dans de vaines recherches. Je n'applique point, ajoute>>t-il, ces réflexions à la recherche des lois de la cristallisation; » cet objet de simple curiosité peut exercer l'imagination » sans conséquences qui influent sur les principes religieux

>> Ces dernières paroles m'ont paru dignes d'attention, >>venant sur-tout d'un homme aussi grave et aussi circons» pect que M. Deluc : j'ai pensé que peut-être il m'étoit. » échappé quelque expression mal sonnante dans ma lettre sur » la cristallisation du basalte; j'ai reconnu qu'il n'y avoit pas » un mot qui, de près ni de loin, pût fournir matière à cen» sure théologique.

» Cependant, comme M. Deluc n'est pas de ces écrivains » qui jettent les mots au hasard, il falloit bien qu'il cût un >> motif et un but en parlant de la sorte. J'ai donc de nou» veau pesé ses paroles, et lui-même m'a mis sur la voie par » la liaison qui se trouve dans sa phrase entre la recherche » des lois de la cristallisation, et ce qu'il appelle de vaines

recherches dont les conséquences peuvent influer sur les » principes religieux. Le sens de 'cette phrase étant indivi»sible, elle devoit avoir pour objet quelque ouvrage où il » seroit question des lois de la cristallisation, et en même » temps de quelques recherches sur sa cause. J'ai pensé alors » à un Traité de minéralogie qui roule principalement sur » les lois de la cristallisation, et où probablement l'auteur » auroit parlé des causes de ce phénomène.

(1) Ces Lettres ont été imprimées chez Nyon, libraire, rue du Jarq dinet. 1798.

A a

» J'ai trouvé en effet à la page 10 du 1" volume, un pas»sage qui, s'il étoit sorti d'une plume profane, pourroit >> donner matière a interprétation; il est conçu en ces termes : » Les forces actives qui sollicitent les molécules d'un mi»néral suspendues dans un liquide, ont un certain rapport » avec la figure de ces molécules, et c'est dans ce rappo t » que consiste la tendance qu'ont par elles-mêmes les molé» cules à se réunir, conformément aux lois d'une aggréga» tion régulière. Mais pour qu'elles parviennent à ce but, il » faut qu'elles aient le loisir de se chercher, de s'appliquer » les unes contre les autres par les faces convenables, et de ‹ >> concourir toutes en même temps à l'harmonie qui doit »naitre de leur ensemble.

» Il est bien certain que si l'on prenoit littéralement les >> expressions de ce passage, il en résulteroit que les molécules » minérales sont douées de la plus admirable intelligence, >> sur-tout si on les suivoit dans toutes leurs manœuvres de » détails qu'elles semblent exécuter sous les yeux de l'auteur, » et qui ressemblent aux évolutions de la plus belle tactique: » tout cela, je le répète, pris à la lettre, ne seroit nullement >> orthodoxe; mais comme les principes religieux de l'auteur < » sont à l'abri de tout soupçon, il est évident que ce n'est » qu'un style figuré dont il se sert pour fixer de quelque ma»nière les idées du lecteur.

» Mais je demande pourquoi M. Deluc fait tomber sur >> ma tête une censure qui regarde un ouvrage qui m'est >> étranger ? »>

Cette citation est bien longue; j'aurois desiré l'abréger; mais il falloit la transcrire en entier pour en saisir l'esprit: car il y a plus ici qu'une simple méprise.

Je n'aurois point relevé ces passages, qui n'intéressent pas une question de physique terrestre ou de géologie, si dans sa manière de transformer les passages qu'il cite, pour les fairecadrer à sa critique, M. Patrin n'avoit pas introduit, de même, à sa manière, un naturaliste célèbre et respectable. Que penser de cette marche toujours la même? Quel est l'esprit qui la dicte ? Il devient donc nécessaire que je répète ici cen que j'ai dit, et dans mes propres termes.

Les différentes formes que prennent les basaltes, ai-je dit, celles sur-tout où la masse entière se divise en colonues courbées présentant des segmens de cercle d'une dimension énorme, tels qu'on en voit, dans l'ile de Staffa, sont des formations qui restent dans le secret des mystères de la nature. Nous les voyons comme nous voyons les formes des cristaux, où nous ne pouvons que contempler, jouir et admirer; car

plus nous cherchons à pénétrer datis le mystère de la cristalli sation, plus nous avons lieu de nous persuader qu'elle est audessus de nos connoissances. Les expressions de molécules similaires, d'affinités d'aggrégation, sont un repos pour la pensée; mais elles ne levent pas le voile, et le mystere subsiste. Mais si nous ne pouvons qu'admirer, c'est au moins un sentiment bien doux que celui dé l'admiration. Heureux le naturaliste qui éprouve ce sentiment! Il s'arrête où l'intelligence humaine ne peut pénétrer; il s'élève à l'auteur de la nature et ne s'égare pas dans de vaines recherches. Je n'applique point cette réflexion à la recherche des lois de la cristallisation. Cet objet de simple curiosité, peut exercer l'imagination, sans conséquences qui influent sur les principes religieux. »

J'invite maintenant le lecteur à comparer ce passage et les pensées qu'il exprime, avec la manière dont M. Patrin les présente. Fort heureusement que, sans m'en douter, sans que je pusse le prévoir, j'ai prévenu par la conclusion l'interprétation que M. Patrin lui a donnée.

Heureux le naturaliste, ai-je dit avant cette conclusion, heureux le naturaliste qui éprouve le sentiment de l'admi» ration! Il s'arrête où l'intelligence humaine ne peut péné» trer; il s'élève à l'Auteur de la nature, et ne s'égare pas dans » de vaines recherchés. »

Cette exclamation et ces réflexions ont fort étonné M. Patrin; il a cru un moment qu'elles s'adressoient à lui, quoique leur application soit manifestement générale. M. Deluc, w remarque-t-il, n'est pas de ces écrivains qui jettent les » mots au hasard; il falloit bien qu'il eût un motif ét un but n'en parlant de la sorte. »

Très-certainement ces mots ne sont pas jetés au hasard; ils s'adressent à tous les écrivains qui, traitant des merveilles de la terre et de l'univers, forment des hypothèses sans recourir à l'intervention d'une cause première intelligente, qui leur ait donné l'existence et placé dans l'ordre et l'harmonie où nous les voyons. Cette disposition malheureuse de l'esprit, leur fit imaginer ces hypothèses qui les égarent dans de vaines recherches. C'est bien ce que j'ai voulu exprimer et ce que j'ai eu en vue. Mais quand M. Patrin a dirigé ces réflexions sur le Traité de Minéralogie dont il parle, et qui étoit loin de ma pensée, c'est là où il y a plus qu'une simple méprise.

Ceci me rappelle un passage de M. Patrin, contenu dans une lettre qu'il écrivit le 12 septembre 1801, publiée dans le n°. 146 de la Bibliothèque Britannique.

Le sujet de cette lettre étoit la masse de fer de Sibérie, qui a joué un grand fole dans les discussions sur les pierres

météoriques, quoiqu'elle n'ait absolument rien de commun avec ces pierres. Le professeur Chladni de Wittenberg avoit donné une hypothèse sur leur origine et sur celle de cette masse de Sibérie. Dans la suite de ses raisonnemens on remarquoit cette étrange opinion qu'il regardoit comme la plus vraisemblable: «que la nature agissant sur la matière créée » possédoit la faculté de créer des mondes et des systèmes » entiers, de les détruire et d'en former de nouveaux avec » les débris des premiers. >>

Je donnai une réfutation de ce système fantastique dans une lettre du 5 juillet 1801, insérée au no. 134 de la Bibliothèque Britannique, et deux mois après parut la lettre de M. Patrin, citée ci-dessus, où se trouve à la page 210, page 7o de sa lettre, le passage que je vais transcrire:

Quant à l'hypothèse de M. Chladni sur la formation des » corps planétaires les uns par les autres, elle ne paroît nul»lement contraire aux lois de la nature. Pourquoi les globes » qui circulent dans l'espace ne pourroient-ils pas se multi»plier par le moyen de leurs émanations comme les polypes » se multiplient par la division de leurs parties, et comme le » globe du Volvoce se multiplie par le moyen des globules » qui s'échappent de son corps, et qui vont à leur tour en » former d'autres par un mécanisme qui nous est totalement >> inconnu? Aux yeux de la nature un monde et un volvoce » sont gradués, à bien peu de chose près, sur la même échelle » suivant l'expression de M. Chladni; et pourquoi donc leurs » fonctions ne pourroient-elles pas être analogues? L'un » passe sa vie à rouler dans une goutte d'eau, comme l'autre >> emploie son existence à rouler dans le fluide éthéré. D'un » côté la masse, l'espace et la durée sont plus grands que de >> l'autre, voilà toute la différence; elle est considérable à nos » yeux; mais dans un espace sans bornes et une durée sans fin, » elle s'évanouit complétement. »

Frappé des principes funestes énoncés dans ce passage, j'écrivis des réflexions que j'adressai à MM. les rédacteurs de la Bibliothèque Britannique, sous la date du 18 mars 1802, qui parurent dans le n° 150. Et comme il est vraisemblable plusieurs lecteurs du Mercure ne lisent pas la Bibliothèque Britannique, il peut être utile que je rappele ici quelquesunes de ees réflexions.

que

Aucun sujet de physique générale, comme de physique particulière et de morale, ne peut plus intéresser que celui dont il est ici question. Car il importe à l'homme plus que toute autre chose, de se rendre raison, autant qu'il lui est possible, de l'existence de l'Univers; de juger si les globes

qui brillent dans l'immensité des cieux, si les objets qui l'environnent sur la tèrre, si le soleil qui l'éclaire, si le feu qui l'anime, si l'eau qui l'abreuve et qui fertilise ses campagnes, si les fruits de la terre qui le nourrissent, si l'air qu'il respire et qui vivifie tous les êtres, si la lumière qui fait briller à ses yeux les couleurs qui embellissent la nature, sont un résultat produit par une nature aveugle, ou si c'est l'œuvre d'un Etre-Suprême, éternel, tout-puissant, rémunérateur, dont la sagesse infinie embrasse l'Univers.

Il lui importe sur-tout de se rendre compte de sa propre existence, comment il est sur cette terre, si l'intelligence dont il est doué est un effet du hasard, ou si elle est une émanation d'une cause première et divine? Enfin, si aux yeux de cette cause première, lui, être intelligent, est sur la même ligne que F'insecte qui roule dans une goutte d'eau?

Que sont toutes les recherches en physique comparées à cette recherch? Des objets de détails qui n'intéressent l'homme que pendant son séjour sur la terre, tandis que l'autre, qui embrasse toute son existence, doit l'intéresser vivement sur son origine, sa destination et sa fin.

Peu de personnes sont à portée de fixer leur attention et de méditer sur les faits de physique générale, quoique très-importans: il en résulte que, n'ayant pas acquis les connoissances nécessaires pour apprécier des assertions et des hypothèses telles que celles énoncées dans le paragraphe que je viens de transcrire, on peut être entraîné par ces idées hardies, et se persuader que le globe qui circule dans l'espace, que le monde habité par des êtres sensibles, peuvent bien être en effet comparés à l'insecte globulaire qui roule dans une goutte d'eau, et n'avoir dans la nature pas plus d'importance. De l, au doute sur la cause et l'origine de l'Univers le pas est très-glissant: car de telles idées ne montrent ni grandeur ni sagesse dans le but de la création.

Il n'est pas étonnant que l'astronome et le naturaliste qui se séparent de l'AUTEUR de la nature pour suivre leurs seules conceptions, errent dans le vague et l'obscurité, confondent toutes choses, placent sur une même ligne des objets qui n'ont entr'eux aucun rapport, ne voient ni liaisons, ni fins, ni harmonie établies par une cause première intelligente, qui apprécie les facultés, l'importance et la durée de ses créatures; qu'ils ne parlent que de la nature, mot vide de sens quand il est employé à exprimer autre chose que l'ensemble des œuvres du CREATEUR, ou les lois qu'il a établies pour leur conservation; il n'est pas étonnant, dis-je, que partant de cette cans aveugle, qu'ils sero ut bien embarrassés de définir

« ZurückWeiter »