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Tournée en Italie.

d'état : il avait le travail facile et une manière lumineuse de présenter les choses. Son travail me convenait, et je fis tout pour le détourner du ridicule échange qu'il sollicitait. Il fut remplacé par Champagny.

A l'époque du voyage ordinaire de Fontainebleau et des dissensions survenues dans la famille royale d'Espagne, il en était déja à regretter d'avoir quitté son ministère : l'inaction le consumait, et il crut que je consentirais peut-être à lui rendre une espèce de suprématie sur nos relations extérieures, tout en lui laissant sa nouvelle dignité. Il m'accabla, à cet effet, de mémoires, de notes, de conversations, tendant à prouver qu'il suffirait de me montrer avec 30 mille hommes pour soumettre l'Espagne. Ainsi l'Europe fut étrangement abusée, lorsque, sur sa parole, elle crut qu'il s'était opposé à la guerre. Loin d'abonder dans ses idées, je voulais commencer par m'assurer de la ligne de l'Èbre, et voir ensuite ce que les événements amèneraient. Après la signature du traité de Fontainebleau, je me rendis donc en Italie. J'avais plusieurs objets en vue dans ce voyage : j'espérais que ma présence dans ce pays donnerait à penser à l'Autriche, et la déciderait à entrer franchement dans la grande alliance contre l'Angleterre. Ce but fut atteint, car le cabinet de Vienne ne

tarda pas à prescrire au comte de Stahremberg de quitter Londres, si sa médiation était repoussée, et cet ambassadeur quitta en effet l'Angleterre dans les premiers jours de février.

Outre cela, j'étais bien aise d'en imposer au pape, et de le faire entrer dans une confédération italienne qui unirait Naples, l'Étrurie, le royaume d'Italie et le pape, sous mon protectorat, à l'instar de la confédération du Rhin.

avec

Lucien.

Ensuite je voulais m'expliquer sur la propo- Entrevue sition que m'avait faite le prince des Asturies. Lucien avait été ambassadeur à Madrid, il connaissait cette cour; en mettant sa fille sur le trône, il eût pu y servir ma politique; mais je demandais pour gage de sa soumission qu'il se séparât de sa femme, dont la conduite n'était pas irréprochable, et qui avait été publiquement sa maîtresse.

Je tenais à allier mon frère à une des grandes maisons souveraines. Cet acte de soumission eût été à mes yeux une garantie de ses sentiments à venir, et eût redoublé l'honneur de ma famille. Nous eûmes une entrevue à Mantoue. Lucien consentit au mariage de sa fille, mais refusa les conditions que je mettais à notre réconciliation; je devais tout craindre de la part d'un frère qui donnait à l'Europe le dangereux exemple de mépriser mes volontés; d'un fou qui sacrifiait à de misérables inclinations le trône d'Espagne pour

Décret de Milan

anglais.

sa fille et les destinées de la France: aveuglement déplorable, puisqu'il eut une grande influence sur les désastres de l'Espagne et les miens!!

Ce fut au retour de cette entrevue que je contre le lançai mon fameux décret de Milan, en reprécommerce saille des nouvelles prétentions de l'Angleterre. Près de toucher à l'accomplissement de mon grand système, je reçus l'ordre du conseil britannique du 11 novembre, déclarant que tous les pays occupés par nos troupes, ou qui auraient reconnu notre influence en excluant le pavillon anglais de leurs ports, seraient traités comme s'ils étaient effectivement bloqués; c'est-à-dire que tout bâtiment destiné pour ces pays était soumis à étre visité, arrêté en pleine mer, conduit dans les poris anglais, et passible d'une imposition qui serait fixée par les lois du parlement.

C'était frapper notre commerce et celui de l'Europe d'une taxe infame, puisqu'elle admettait une sorte de suzeraineté, un droit régalien des Anglais sur toutes les propriétés étrangères qui voguaient sur les mers; c'était imposer le sceau de l'infamie à toutes les puissances qui se soumettraient volontairement à un pareil code. Je ne pouvais y répondre que par les mêmes armes. Je lui opposai le décret de Milan du 17 décembre. Il portait: 1° que tout bátiment qui se serait conformé à l'ordre du conseil, serait

dénationalisé, traité comme Anglais et de bonne prise, soit qu'il entrát dans les ports du continent, ou qu'on l'arrétát en mer.

2° Que les îles britanniques étaient déclarées en état de blocus sur terre comme sur mer, et que tout batiment destiné pour ce pays et pour ses colonies, ou provenant des mêmes contrées, serait de bonne prise.

Ainsi un abus en amenait un autre dans cette fatale carrière où nous nous étions réciproquement lancés avec un cruel acharnement : cette législation de corsaires eût toutefois tourné au détriment de nos ennemis, sans le fâcheux événement qui ouvrit aux Anglais l'Espagne et l'Amérique.

Une que

A cette époque, une querelle peu sérieuse en apparence, mais qui eut pourtant ses dangers, relle s'engaavait éclaté entre le pape et moi.

Depuis les articles réglementaires que j'avais faits au concordat, ou plutôt depuis que Pie VII était revenu de mon couronnement sans avoir obtenu la restitution des provinces qu'il espérait, le saint-siége avait recommencé une petite guerre sourde, qui prit plus d'animosité à l'époque de la coalition de 1805. La cour de Rome se plaignait sous le rapport temporel de ce que j'exigeais qu'elle entrât dans la confédération italienne.

Une escadre russe et anglaise se disposait alors à opérer un débarquement en Calabre et à

ge avec le

pape.

Naples même. Le corps d'armée français, placé dans la presqu'île d'Otrante, serait perdu, si le pape, par ambition des choses de ce monde venait à s'allier aux hérétiques. Je demandai au saint-siége de recevoir garnison à Ancône, et de conclure une alliance offensive et défensive contre les coalisés avec le vice-roi d'Italie et le roi de Naples. Il s'y refusa.

Après la paix de Presbourg, une armée française entra dans Naples, et il me devenait plus nécessaire que jamais d'être sûr des états romains pour communiquer avec elle. Cependant, sans s'inquiéter de l'abandon de l'Autriche, le saint-père se livra aux conseils anglais. Des agents excitaient des peuples à la révolte : partout, depuis Ancône jusque sur les confins napolitains, on égorgeait nos soldats. Le général Bentinck avait organisé en Sicile le foyer de l'insurrection, et son grand atelier était à Rome. J'en prévins le pape, et le sommai de fermer ses ports aux ennemis de la France, de les chasser de Rome, et de faire franchement cause commune avec nous. Je renouvelai ces démarches lors de mon voyage à Milan, et ma proposition d'entrer dans une confédération italienne ne fut pas mieux accueillie. Le saint-siége répondit par des menaces tout au plus pardonnables du temps de Grégoire VII.

Cet état de choses pouvait d'autant moins

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