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tains événements, ou la mort de personnes citées dans ces souvenirs.

A l'âge de douze ans, j'ai eu l'idée d'écrire, non pas des mémoires, mais de tenir note de tout ce qui m'arrivait; en continuant cette espèce de journal des faits qui me concernaient, à mesure que se déroulait devant moi le drame de la vie, j'écrivis insensiblement ce volume de souvenirs.

Les phases variées de ma jeunesse m'ont fait voir bien des pays, m'ont mis en relation avec de hauts personnages, m'ont rendu témoin de faits importants. Enfant, mes propres aventures m'ont fait une assez forte impression pour m'engager à en retracer le souvenir; plus tard, j'ai continué pour faire connaître les vertus de mon bienfaiteur.

En remettant au net les différentes notes de mon journal, j'ai laissé au style sa forme primitive, telle que j'écrivais au fur et à mesure des événements, corrigeant seulement les plus grosses fautes, élaguant des phrases ampoulées qui entravaient la marche des événements. Mais comment, me dira-t-on, à douze ans, écrire d'une manière supportable? Quelles réflexions un enfant de cet âge peut-il confier au papier? Est-il en état de porter un jugement quelconque sur l'événement le plus simple de la vie? Voici ma réponse Rien ne forme comme l'adversité, quand elle n'abrutit pas; le malheur, aussi bien que les souffrances physiques, laisse des traces profondé

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ment gravées dans la mémoire; à cette école bien des choses s'apprennent sans livres. De bonne heure livré à moi-même, obligé de me créer une existence, je fus forcé de réfléchir, à l'âge où l'on joue à la balle ou aux barres.

Je possède tous les autographes des lettres reproduites dans ce volume, à l'exception des lettres écrites à l'abbé Nicolle, qui m'ont été communiquées par ce digne prêtre en 1828, et que j'ai retrouvées dans la Vie de l'abbé Nicolle, par M. l'abbé Frappaz.

Le général comte DE ROCHECHOuart.

Jumilhac, décembre 1857.

DU GÉNÉRAL COMTE

DE ROCHECHOUART

LIBRARY

OF THE

UNIVERSITY

CALIFORNIA

CHAPITRE PREMIER

Mes premières années.

1788-1801.

Séjour à Caen, à Fribourg, à Londres, à Altona. Voyage de Hambourg à Lisbonne. Entrée au ser

vice militaire.

Louis-Pierre-Jules-César de Rochechouart, colonel du régiment d'Armagnac-infanterie, épousa, en 1775, Élisabeth-Armide Durey de Morsan. De cette union naqui

rent:

1° Victor, né en 1776, mort à Port-au-Prince en 1802; 2o Philippe, né en 1779, mort en 1791;

3. Louis, né en 1782, tué à Brienne en 1814;

4° Cornélie, née en 1784, morte en 1794;

5° Moi, Louis-Victor-Léon, né le 14 septembre 1788. J'étais destiné, en ma qualité de cadet, à entrer soit dans les ordres, soit dans la marine. Le cardinal de Rochechouart, évêque de Laon, et mon grand-oncle, l'évêque de Bayeux, morts depuis quelques années seulement,

m'avaient frayé le chemin des honneurs ecclésiastiques. La marine m'offrait les chances d'un avancement rapide, deux de mes cousins brillaient dans cette carrière : le vicomte de Rochechouart, chevalier du Saint-Esprit et chef d'escadre, s'était distingué au siège de Gibraltar, en 1782, coupant avec son vaisseau, le Majestueux, de 74 canons, la ligne de la flotte anglaise; le vicomte de Mortemart venait d'acquérir une grande réputation de gloire et de bravoure au combat livré par M. de Grasse : le 12 avril 1782, il affrontait le feu de trois navires anglais, pour leur arracher son vaisseau le Glorieux, totalement désemparé. Un tableau représentant cette action se voit, à Paris, au ministère de la marine. Les événements décidèrent autrement de ma carrière.

Mis en nourrice chez une brave fermière de Saint-Germain en Laye, je restai chez elle jusqu'en 1794; je revins donc à la maison paternelle seulement dans ma sixième

année.

Ma mère, amie de la duchesse de Polignac, avait été admise dans le cercle d'intimes que la reine Marie-Antoinette réunissait au petit Trianon, pour se reposer des réceptions officielles de la Cour; elle avait donc pu appré cier, dans l'intimité, l'affabilité de cette gracieuse souveraine; aussi fut-elle profondément affligée quand elle vit sa Reine torturée, diffamée, condamnée à mourir sur l'échafaud; elle résolut de tout tenter pour l'arracher à ces ignominies. Joignant ses efforts à ceux du baron de Batz, elle avança une grosse partie de la somme nécessaire pour acheter des auxiliaires. Le Moniteur universel du 18 germinal an III, 7 avril 1795, - n° 175, raconte en ces termes le projet de complot : « Il a existé « un projet d'enlever la Reine; le complot était entre «la ci-devant comtesse de Rochechouart et le fameux

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