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les entreprises du courage. On déclara la chose inexécutable, et absolue la nécessité d'y

renoncer.

D. En était-il réellement ainsi ?

R. Pichegru prouva le contraire. Voyant qu'un froid de 17 degrés couvrait d'une glace épaisse les rivières, les canaux et les inondations de la Hollande, il conçut l'ingénieuse idée de conquérir le pays en adaptant des crampons de fer aux talons de ses soldats. Pour exécuter son projet, il quitta Bruxelles, où l'administration de la Belgique l'avait retenu jusqu'alors, se remit à la tête de l'armée, fit ses dispositions et courut à l'ennemi. C'était un véritable enchantement que de voir une armée se déployer avec tout son matériel sur les obstacles mêmes que ses ennemis lui avaient opposés. Vainement le Stathouder épouvanté demanda la paix, Pichegru, qui avait un intérêt majeur à terminer sa conquête avant la fonte des glaces, répondit qu'il ne recevrait de propositions que dans les murs d'Amsterdam. Je ne détaillerai point les villes qu'il prit. Il me suffira de dire qu'il les conquit toutes en trentecinq jours. Entré le 20 janvier dans Amsterdam, il sut y maintenir un si grand ordre et y inspirer tant de confiance, que tout, jus

qu'aux opérations de la Bourse, s'y fit comme d'habitude. Les Hollandais virent surtout avec admiration cette inscription que les conventionnels avaient fait graver en lettres d'or sur le frontispice de leur palais : Nous voudrions que la maison des représentans du peuple fût de verre, pour que le peuple pût être témoin

de toutes leurs actions.

D. Que faisaient les Anglais ?

R. Ils cherchaient à nous disputer les provinces de Frise, de Groningue et d'Over-Issel; mais ils ne surent ni conserver leurs positions, ni les perdre avec honneur. Tout fut soumis; et pour imprimer au triomphe des républicains le sceau de l'immortalité, l'armée navale des Anglais fut prise par la cavalerie française, dans les glaces du Texel où elle était arrêtée.

CAMPAGNE DE 1795.

D. DANS quelle position se trouvaient les différentes armées avant que le printemps eût ramené les combats?

R. Belle et glorieuse, si l'on en excepte celle des Pyrénées-Occidentales, qui éprouvait

dans ses quartiers d'hiver toutes les horreurs d'une cruelle épidémie.

D. Qui donna le signal des nouvelles hostilités ?

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R. Le général Pérignon ; divisant en deux corps l'armée des Pyrénées-Orientales, il r'ouvrit la campagne dès le 16 janvier sur les bords de la Fluvia. Son premier corps fut chargé de la conservation de Figuières ; avec le second, il porta le siége devant Roses.

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D. Quels succès obtint-il?

R. L'évacuation de la place au moment où le feu redoublé de cent pièces de canon donnait les moyens de la prendre d'assaut. Ce siége offrit de remarquable que les bouches à feu furent portées à bras sur une montagne regardée jusqu'alors comme inaccessible, et dont le front dominait de plus de 2000 toises le niveau de la mer. Lorsque Pérignon le proposa aux ingénieurs, ceux-ci déclarèrent l'entreprise impossible. C'est l'impossible que je veux, répondit le général; et, fière d'être destinée à l'accomplissement d'un tel prodige, l'armée ouvrit dans les flancs du rocher un chemin qui, se développant en spirale sur trois lienes d'étendue, la porta comme en triomphe au sommet de la montagne.

D. Dans quelles dispositions étaient les puissances continentales relativement à la république française ?

R. Epuisées d'hommes et d'argent, toutes désiraient plus ou moins la paix. Le roi de Prusse fut le premier qui en manifesta le vœu. Il soupçonnait d'ailleurs l'empereur François II de vouloir immoler la Prusse à la sûreté de l'Autriche, et le 5 avril 1795, le roi Frédéric obtint la paix en cédant à la France les provinces qu'il possédait sur la rive gauche du Rhin. Il serait impossible de dire la joie que cette nouvelle répandit dans le sein de la Convention, du peuple et de l'armée, Toute la nation s'était soulevée contre les ennemis de son indépendance, et toute la nation s'attribua l'honneur de les avoir vaincus. On voyait avec une sorte de fierté l'orgueil des rois cédant au seul patriotisme : j'en cite pour exemple cette noble émanation du plus brillant génie qu'un saint enthousiasme avait gravée dans tous les cœurs;

Accoutumons des rois la fierté despotique
A traiter en égale avec la république ;

Attendant que, du ciel remplissant les décrets,

Quelque jour avec elle ils traitent en sujets.

D. Que faisait-on vers ces temps sur les différens points?

R. Pérignon teignait du sang espagnol les eaux de la Fluvia; Moncey qui d'abord semblait avoir les destins contre lui, écrasait les forces rassemblées au camp de Marquirnechu; Kellermann s'emparait en Piémont du col de Monté; et réunissant à l'armée du Rhin les divisions de celles du Nord qui devenaient inutiles en Hollande, le comité de salut public faisait investir les places de Mayence et de Luxembourg. La première résista constamment. Quant à la seconde, quoique défendue par 12,000 hommes bien portans et richement approvisionnés, elle se rendit le 1er juin 1795, à 11,000 Français, que les maladies, les fatigues et les privations avaient rendus semblables à des spectres décharnés.

D. Le comité de salut public ne confia-t-il point une ambassade au général Pérignon ?

R. Victime à son tour de l'amour que lui portait l'armée, ce général fut remplacé par Schérer, officier totalement dépourvu des grands moyens qu'exige un commandement en chef. Schérer remporta cependant divers avantages sur la Fluvia; mais quelques efforts qu'il fit, il ne put jamais parvenir à effectuer le

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