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naparte pour consommer la ruine des Egyptiens.

D. Dans cette conjoncture que fit Bonaparte?

R. Il fortifia la place du Caire, s'empara de Suez, sur la mer Rouge, et chercha à s'attacher le pacha de Saint-Jean-d'Acre, pour être plus à même de résister au Grand-Turc. Ce pacha, qui protégeait Ibrahim-Bey, n'aurait pas manqué d'entraîner avec lui ce second chef des Mameluks.

D. Comment Djezzar reçut-il les propositions de Bonaparte?

R. Avec un mépris insultant: cet homme, dont le nom signifie boucher, et qui par sa cruauté méritait cette qualification, vouait aux Français une haine implacable.

D. A cette nouvelle que fit Bonaparte?

R. Résolu d'obtenir par la force ce qu'on refusait à la douceur, il partit avec 13,000 hommes pour aller soumettre le pacha dans sa ville. Les places d'El-Arich, de Gaza, de Jaffa, tombèrent en son pouvoir; mais non sans éprouver tous les ressentimens d'un ennemi furieux.

D. Bonaparte n'attachait-il point un certain amour-propre à s'emparer de Jérusalem?

R. Cette ville, qu'il somma de se rendre, répondit que, dépendant du pachalick d'Acre, elle ne se rendrait qu'avec le pacha.

D. Quel parti prit Bonaparte?

R. Il porta le siége devant Acre. Mais comme il n'avait point de grosse artillerie, et que d'ailleurs l'ennemi recevait chaque jour des Anglais de nombreux renforts par mer, il dut renoncer à son entreprise et se reployer sur l'Egypte, que son absence compromettait évidemment. Ce siége n'en est pas moins un des plus glorieux qui aient illustré nos armes. Tout ce que la soif de la gloire peut enfanter de prodiges, y fut exécuté avec une incroyable ardeur, et Djezzar se vit plus d'une fois sur le point de succomber.

D. On fait sur cette expédition plus d'un reproche à Bonaparte?

R. Croit-on que l'esprit de parti n'en ait pas inspiré quelques-uns? J'en sais deux qui méritent d'être éclaircis; l'un est relatif au massacre des prisonniers de Jaffa; l'autre à l'empoisonnement de ses propres blessés.

D. Qui peut justifier de pareils crimes? R. Rien et tout. Rien, si l'on ne veut entendre que la voix plaintive de l'humanité.

Tout, si l'on considère qu'abandonnés faute de gardes, ces prisonniers allaient se remettre contre nous; et qu'atteints de la peste, ces malades, qu'il fallait abandonner aussi pour sauver l'armée, allaient être incessamment massacrés par l'ennemi. On sait aujourd'hui à quoi s'en tenir sur les pestiférés de Caïffa. Bonaparté demanda au docteur Desgenettes un opium qui les plongeât sans douleur dans le sommeil de la mort; Desgenettes le refusa, l'armée partit, et tombant dans les mains féroces de Djezzar, les malheureux malades furent en effet livrés à toutes les douleurs des tortures. Je le demande, n'était-il pas plus humain de leur épargner tant d'agonies? D. Que se passait-il en Egypte?

R. Battant l'ennemi à Samanhout, à Kosséir, à Thèbes, et en vingt autres endroits, Desaix achevait la conquête des provinces supérieures. Il rencontrą des difficultés d'autant plus grandes, qu'un homme, ou sage'ou fou, s'était emparé par le fanatisme de l'esprit des habitans, et les soulevait contre les Français avec une incroyable facilité. Cet homme, qui se faisait passer pour l'ange ElMohdhy, marchait sans vêtemens à la tête de ses crédules prosélytes, et leur persuadait que

qui croyait en lui pouvait sans nul péril braver tous les dangers. Apparemment qu'il n'y croyait pas lui-même, car il tomba mortellement blessé d'une balle.

D. La conquête de l'Egypte en général devait, par ces derniers travaux, être fortement avancée ?

R. Elle l'était peut-être moins qu'au commencement de la guerre. Toujours résolu de délivrer l'Egypte, le Grand-Seigneur y dirigeait par mer, sous le commandement de Mustapha Pacha, 24,000 Osmanlis qui débutèrent par s'emparer du fort d'Aboukir. A cette nouvelle, Bonaparte rassembla toutes ses forces et courut reconnaître l'ennemi. Profondément en paix sur la foi de son nombre, celui-ci campait, sans gardes avancées, sous les murs de la place.

D. Quelle était la force des armées en présence?

R. 5000 Français, 18,000 Turcs.
D. Que fit Bonaparte ?

R. Il fondit sur l'ennemi avec la rapidité de l'aigle qu'il prit depuis pour enseigne. Jamais on ne vit un aussi grand carnage. Les champs d'Aboukir vengèrent celui de nos malheurs dont sa rade fut le témoin. Quelques

bandes auraient pu échapper à la fureur de nos soldats; mais la barbare coutume qu'ont les Orientaux d'accorder une prime pour chaque tête d'ennemi apportée à la tente du général en chef, fit qu'elles abandonnèrent par cupidité des postes importans, et se livrèrent d'elles-mêmes aux terribles coups des vainqueurs. Ce n'est point une hyperbole : cernés par des baïonnettes, des canons et la mer, pas un Turc n'échappa, et tous les 18,000 y périrent; Mustapha fut envoyé lui-même comme un trophée au Caire, et les 6000 des siens renfermés dans le fort, se rendirent après quelques jours de bombardement. « Nous venons, dit Bonaparte, nous venons aujourd'hui de reconquérir nos établissemens aux Indes et ceux de nos alliés. Par une seule opération, nous avons remis dans les mains du Gouvernement le pouvoir d'obliger l'Angleterre, malgré ses triomphes maritimes, à une paix glorieuse pour la république. Nous avons beaucoup souffert; nous avons eu à combattre des ennemis de toute espèce; nous en avons encore à vaincre; mais enfin le résultat sera digne de nous, et nous méritera la reconnaissance de la patrie.

D. Après cette victoire que fit Bonaparte?

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