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Reggio connaît parfaitement le pays, il est de Bar-sur-Ornain. Napoléon emploie donc la plus grande partie de la soirée à recueillir, dans la conversation des personnes qui l'entourent, les renseignements dont il a besoin.

Voici le résumé de ce qu'il apprend : la grande armée autrichienne du prince Schwartzenberg, descendue des Vosges par plusieurs routes, dirige sa plus forte colonne sur Troyes; elle pousse devant elle le corps de vieille garde dont le duc de Trévise a le commandement; celui-ci dispute le terrain pied à pied, et, malgré les désavantages d'une retraite, les combats de Colombey-lesdeux-églises et de Bar-sur-Aube ont conservé l'honneur de la garde dans tout son lustre; mais la ville de Troyes n'en court pas moins un pressant danger.

Du côté des Prussiens, le maréchal Blücher a dépassé la Lorraine; il vient d'occuper SaintDizier, et s'avance diagonalement sur l'Aube.

Le duc de Vicence, au milieu de ces grands mouvements de troupes, n'a pu parvenir jusqu'au quartier-général des alliés. Retenu d'abord à Lunéville par les avant-postes qui lui barraient le chemin, il a été forcé de rétrograder avec nos troupes jusqu'à Saint-Dizier; mais enfin, dans cette dernière ville, les lettres du prince de Met

ternich lui étaient parvenues: Châtillon-surSeine lui était indiqué comme lieu de réunion du congrès, et aussitôt il avait quitté Saint-Dizier pour se rendre à Châtillon.

Quant à nos troupes, elles sont autour de Châlons. Le duc de Bellune et le prince de la Moskowa, après avoir évacué Nancy, se sont retirés par Void, Ligny et Bar, sur Vitry-le-Français; le duc de Raguse est derrière la Meuse entre SaintMichel et Vitry.

Nos avant-postes sont donc à Vitry. Déjà les fuyards commençaient à paraître dans les rues de Châlons; mais ils s'y croisent avec les troupes qui arrivent de Paris. Ces soldats, qui naguère étaient disséminés le long du Rhin, depuis Huningue jusqu'à Cologne, après vingt jours de retraite sur tant de routes différentes, se reconnaissent tous dans la même plaine, ne formant plus qu'une seule armée réunie autour de Napoléon. Aussitôt le mouvement rétrograde cesse, et l'ordre rentre dans les rangs.

CHAPITRE II.

L'ARMÉE REPREND L'OFFENSIVE.

BATAILLE DE

BRIENNE.

C'est d'abord sur l'ennemi qui est le plus près que Napoléon veut marcher; il ordonne dans la nuit que toute l'armée prenne la route de Vitry.

Le duc de Valmy reste à Châlons pour y réunir les traînards et recevoir le duc de Tarente, dont la marche a été retardée dans les Ardennes. Le vainqueur de Valmy doit encore une fois défendre les gorges de l'Argonne et la route de Paris.

Napoléon ne s'est pas arrêté plus de douze heures à Châlons : les équipages de sa maison ont filé dans la nuit avec la garde impériale, et le lendemain 26 janvier le quartier-général s'établit de bonne heure à Vitry.

Vitry est donc redevenu place frontière; on a relevé à la hâte les brèches de ses vieilles murailles, et quelques canons protégent les barricades qu'on a plantées devant les portes.

Napoléon, impatient de voir clair dans les

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mouvements qui l'environnent, faisait courir de tous côtés aux nouvelles. A peine arrivé à Vitry, il interroge le sous-préfet, le maire, le juge de paix, l'ingénieur, les notables de la ville. On lui amène successivement tous les gens de la campagne qui rentrent dans Vitry; quand ce n'est pas Napoléon lui-même qui les questionne, c'est le général Bertrand Bacler-d'Albe et Athalin tiennent note de chaque rapport, et couvrent la feuille de Cassini d'épingles qui indiquent les différents points de l'horizon où les coureurs de l'ennemi se font voir. Le duc de Reggio envoie la traverse des émissaires à Bar-sur-Ornain sous prétexte de savoir ce qui se passe chez lui. Le maire, le sous-préfet, envoient d'autres émissaires dans la plaine qui s'étend entre la Marne et l'Aube.

par

On apprend que le duc de Trévise et la vieille garde se retirent de Troyes par la route d'Arcissur-l'Aube: des officiers d'ordonnance sont aussitôt envoyés de ce côté pour aviser ce maréchal de la marche de Napoléon. Un pont est rapidement jeté sur la Marne à Vitry, et facilite ces différentes communications.

Pendant la nuit, nos troupes ont marché : le 27 au point du jour, elles rencontrent, entre Vitry et Saint-Dizier, la tête des colonnes de

l'ennemi. Le général Duhesme engage le combat contre le général russe Lanskoï; Napoléon y accourt, et, dès huit heures du matin, il rentre à Saint-Dizier à la tête des premières troupes.

Cette ville n'avait été occupée que peu de jours par l'ennemi; mais dans ce court intervalle, les habitants n'avaient eu que trop le temps d'apprendre, par les fanfaronnades des alliés, toute l'étendue des dangers que courait la patrie. Ils avaient entrevu le cercle qui se développait autour de la capitale; les maux que l'ennemi leur avait apportés s'aggravaient encore par le désespoir du salut et de la vengeance... Soudain ces mêmes alliés, la veille encore'si confiants, se retirent avec précipitation; ils fuient en criant que l'empereur Napoléon les poursuit, qu'il arrive derrière eux, qu'il est là! A cette nouvelle, les malheureux habitants de Saint-Dizier sortent de leur abattement. Napoléon leur apparaît : ils ne peuvent en croire leurs yeux; ils se précipitent autour de son cheval pour le toucher; la foule le porte jusqu'à la maison du maire, où son logement est marqué. Désormais, c'est à qui poursuivra l'étranger, qu'on ne veut plus craindre; l'enthousiasme gagne de proche en proche et se répand dans les villages du Barrois et de la forêt du Der. Partout les paysans

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