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ment à perdre pour sauver ce faubourg de la capitale.

L'armée se remet aussitôt en marche; mais la journée étant déjà très avancée, on ne peut faire que quelques lieues au-delà de Sezanne, et l'on bivouaque à moitié chemin de la Ferté-Gaucher. Le quartier impérial passe la nuit au château d'Estrenay, que les Prussiens avaient pillé le

matin.

Plusieurs officiers d'ordonnance, expédiés en toute hâte par les deux maréchaux que l'on' vient de laisser au-delà de Troyes, arrivent dans la soirée, et sont porteurs de mauvaises nouvelles les Autrichiens ne reculent plus; ils ont repris vivement l'offensive à l'instant même que Napoléon a quitté Troyes : le combat que les troupes du duc de Reggio et du général Gérard ont eu à soutenir le 27, sur les hauteurs de Barsur-Aube, a été sanglant; les généraux ennemis ont prodigué le nombre des assaillants; la valeur personnelle des chefs n'a épargné aucun effort pour ramener la confiance dans cette armée découragée, et la décider à accabler de sa masse le petit nombre de Français qui lui est opposé : Witgenstein et Schwartzenberg lui-même se sont fait blesser. Les renforts qui arrivaient à chaque instant à l'ennemi rendaient cette lutte de plus en

plus disproportionnée; et le soir, les généraux français s'étaient décidés à la retraite : ils reviennent sur Troyes. Le duc de Tarente, qui a eu quelques avantages du côté de Mussy-l'Évêque, et qui a même relevé un moment les troupes autrichiennes dans la garde d'honneur du congrès de Châtillon, est entraîné par le mouvement de retraite qui ramène le duc de Reggio sur Troyes. Les Autrichiens savent maintenant que les troupes qu'ils ont devant eux ne sont qu'un rideau, et que le gros de l'armée française a suivi Napoléon; ils se trouvent eux-mêmes si nombreux, que déjà ils n'hésitent plus à détacher les généraux Hesse-Hombourg et Bianchi contre le duc de Castiglione, qui devient trop redoutable sur leurs derrières.

Ainsi peu de jours ont suffi pour dissiper nos avantages et déjouer nos projets : les Autrichiens, qu'on croyait poursuivre jusqu'au Rhin, se sont ralliés entre Langres et Bar, et maintenant reviennent sur nous; le maréchal Augereau ne pourra plus opérer la diversion qui lui a été prescrite sur la Saône; et Paris se voit menacé plus que jamais par l'armée de Blücher qui est aux portes de Meaux.

Napoléon, à force d'activité, espère encore ramener la fortune; il veut d'abord se débarrasser

de Blücher, et compte revenir sur la Seine assez tôt pour sauver Troyes.

er

Le 1 mars, l'armée française arrive de bonne heure à la Ferté-Gaucher; Napoléon s'y arrête un moment chez le maire, vieillard très âgé, que son zèle rajeunit, et que Napoléon rajeunit encore en lui donnant la décoration de la Légiond'Honneur. Les nouvelles de Meaux sont rassurantes les Prussiens ont été arrêtés par la rupture des ponts de Tréport et de Lagny; ils ont été également arrêtés la veille (le 28) sur la ligne de l'Ourcq, au village de Lisy, par les troupes du duc de Raguse; et sur la Térouenne, au gué de Trême, par les troupes du duc de

Trévise.

Ainsi, les deux maréchaux tiennent toujours en avant de Meaux; Napoléon arrive sans doute à temps; dans quelques heures, ses troupes vont se trouver en ligne : si Blücher, surpris par leur brusque arrivée, fait volte-face contre elles, un combat décisif va s'ensuivre, et les affaires peuvent être promptement rétablies. Pleine de ces espérances, l'armée continue, en toute hâte, sa marche par Rebais; elle est harassée, mais l'ardeur de vaincre la soutient : de Rebais, elle se dirige sur la Ferté. Arrivée enfin sur les hauteurs de Jouarre, elle découvre à ses pieds la ville de la

Ferté, les sinuosités de la vallée, et, de l'autre côté de la Marne, l'armée prussienne qui nous échappe !

Le maréchal Blücher avait été informé sans doute, par les troupes légères de Tettenborn, de l'approche de Napoléon; il avait évacué aussitôt la rive gauche de la Marne : réuni à ses troupes de la rive droite, il avait coupé les ponts, et venait de mettre la rivière entre nous.

Napoléon ordonne qu'on se mette, sans perdre de temps, à rétablir un pont à la Ferté ; mais cette opération exigera au moins vingt-quatre heures on passe la nuit à Jouarre.

Le lendemain, 2 mars, Napoléon descend à la Ferté, pour être plus près des travaux du pont; il s'établit dans la première maison qu'il trouve au faubourg de Paris.

La plaine qui s'étend entre la Marne et l'Ourcq est couverte des détachements de l'armée prussienne. On les voit qui mettent à profit le temps que nous perdons à rétablir un pont leur retraite se fait en désordre dans la direction de Soissons. Le temps est affreux : ils ne peuvent fuir que par des chemins de traverse, où leurs équipages restent embourbés; les souvenirs de Montmirail et de Vauchamps se réveillent parmi eux, et troublent leurs esprits. A chaque instant

des paysans qui échappent de leurs mains viennent à la Ferté raconter les embarras et les terreurs de l'ennemi. Ces rapports ne font qu'ajouter à l'impatience que Napoléon a de franchir la Marne.

Bacler-d'Albe est envoyé à Paris pour y porter la nouvelle de la retraite des Prussiens. Rumigny, l'un des commis du cabinet, part en courrier pour Châtillon, où il instruira le duc de Vicence de la situation des affaires; des aidesde-camp sont expédiés aux ducs de Trévise et de Bellune, pour qu'ils aient à reprendre l'offensive, et leur donner avis qu'ils forment désormais la gauche du cercle dans lequel on va renfermer Blücher.

Dans la nuit du 2 au 3 mars, nos troupes effectuent enfin ce passage de la Marne, si longtemps retardé: mais tout à coup le temps change; une forte gelée succède à la pluie, et l'ennemi voit se convertir en routes solides et faciles ces mêmes boues d'où quelques heures auparavant il désespérait de sortir!

Malgré ce contre-temps, toutes les chances d'un grand succès ne nous sont pas enlevées. Dans la direction que l'ennemi est forcé de suivre pour opérer sa retraite, le cours de l'Aisne va lui barrer le passage. Soissons est la clef de

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