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PROCESSION DE L'ASCENSION

La Procession en dehors de l'église avant la Messe solennelle, le jour de l'Ascension, a survécu par autorisation spéciale de Mgr l'Évêque de Poitiers, dans la paroisse de Dissai, à l'adoption du Rit romain '. J'en suis heureux pour le pays qui maintiendra ainsi un usage que ne prescrivait pas la liturgie Poitevine, mais que recommandent puissamment une haute antiquité et une tradition symbolique non-interrompue.

Quelques mots donc d'explication sur cette procession restreinte aujourd'hui à certaines localités.

Saint Grégoire de Tours nous en fournit la plus ancienne mention, lorsqu'il parle d'un prêtre, qui, au VIe siècle, allait en chantant, suivi de la foule, de son église à la basilique de saint Martin. << Die autem beato, quo Dominus ad cœlos post redemptum hominem ascendit gloriosus, cum sacerdos de ecclesia ad basilicam psallendo procederet, irruit super Synagogam Judæorum multitudo tota sequentium.» (Historia Francorum, lib. v, c. x1).

Honoré d'Autun (lib. ) et Rupert (lib. x) parlent de la procession solennelle de ce jour, et disent que c'est pour représenter le retour de Jésus-Christ vers son père, et que le clergé avec les Saints dont on porte les Reliques, vont au-devant pour l'accompagner dans son triomphe. (La liturgie ancienne et moderne. Paris, 1752, p. 592).

Sous prétexte de romain pur, toutes les processions du dimanche ont été supprimées dans le diocèse de Poitiers. Plus conséquent avec les traditions locales, le diocèse d'Angers les a conservées; mais la S. Congrégation des Rites a exigé qu'elles se fissent avant l'exposition, comme étant extra-liturgiques.

Durand, évêque de Mende, au XIIIe siècle, est encore plus explicite dans son Rational des divins offices, liv. vi, ch. de l'Ascension: « In festo Ascensionis Domini quod celebratur die quadragesima post pasca, quia Christus die quadragesima post resurrectionem celos ascendit, fit processio solennis. Precepit enim discipulis suis ut precederent in Montem Oliveti ut viderent ipsum ascendere, et fecerunt ei processionem, et ipse elevatis manibus ferebatur in celum... Hec processio significat ascensum de virtute in virtutem, et cantatur responsorium de Ascensione ut invitemur ad ascendendum post Dominum. De Bethania autem, que interpretatur obedientia, de qua eduxit apostolos, ascendit Dominus, per quod significatur quod sine obedientia nullus potest ascendere in celum. Unde quidem cantant in processione responsoria pertinentia ad ipsam eductionem, ut eduxit Dominus. Quod vero ascendit de Monte Oliveti, significat quod per opera misericordie oportet nos ascendere. Cum igitur hac die processionem rationabiliter agamus, nihilominus et hoc rationabilius est quod non celebretur antequam tertia dicatur, sed ea cantata licet in die pasce et ceteris dominicis aliter fiat... Facta processione, cantatur antiphona 0 rex glorie, propter illud: Non vos relinquam orphanos. »

Voici la rubrique du Sacerdotale d'Albert de Castello, imprimé à Venise en 1520 et 1560: « In festo Ascensionis Domini fit processio in aliquibus ecclesiis circa ecclesiam vel plateam ipsius. » Elle suivait Tierce; l'on y chantait les hymnes de la fète et, à la rentrée au chœur, l'antienne de Magnificat O rex glorie.

Au XVIIIe siècle, Dom Claude de Vert se fourvoie, selon son habitude, dans l'explication de cette procession que Lebrun-Desmareltes se contente de constater à Rouen et à Vienne.

«Sans doute que la longue et extraordinaire procession, qui se fait ce jour-là même, en plusieurs églises, a sa raison et son fondement dans ces paroles de l'Évangile, qui se lit à la Messe: Euntes in mundum universum.... illi autem profecti prædicaverunt ubique. » (Dom Cl. de Vert. Explication simple, littérale et historique des cérémonies de l'Église. 11, t. ch. 1).

«A Saint-Maurice de Vienne, la procession se terminait par un petit drame qui ne manque pas d'analogie avec celui des Trois Maries. Le jour de l'Ascension, après Tierce, le clergé étant en

chappe avec l'archevêque, ou (en son absence) avec l'abbé de Saint-Pierre, on faisoit une procession où l'on portoit toutes les châsses des Saints.... Alors (à son retour dans la nef) les chantres ayant le dos tourné au sépulcre disoient: Quem creditis? Deux ou trois chanoines répondoient: Christum qui surrexit. Les chantres Jam ascendit. Les chanoines Alleluia. Pendant qu'on le chantoit, la procession rentroit dans le chœur.» (Voyages liturgiques de France, par le sieur de Moléon, Paris, 1718, p. 31).

Enfin, à Rome, chaque année, à la suite de la chapelle tenue par le Pape à Saint-Jean-de-Latran, la Prélature, le Sacré-Collége et le Saint-Père s'acherninent processionnellement et en silence vers la tribune de la façade. C'est de cette hauteur, à l'orient, en face de la campagne romaine, et à l'heure de midi, au son des cloches et des trompettes, que le Pape debout, lève les mains au Ciel, les abaisse pour bénir la foule pieusement agenouillée, puis se retire porté sur les épaules de douze palefreniers de son palais. Ainsi se réalisent et s'accomplissent à la lettre les textes de l'Évangile et de la Liturgie: « Eduxit autem eos foras in Bethaniam et elevatis manibus suis Benedixit eis. » S. Luc. c. xxiv. ỳ. 50. « Ascendit Deus in jubilatione et Dominus in voce tubæ. » Graduel de la Messe. « Ascendit super cœlos cœlorum ad orientem. » Communion de la Messe. « Recessit ab eis et ferebatur in celum. » S. Luc. Ibid. Alors, après ce spectacle, qui n'a pas ailleurs son égal en majesté et en signification, chacun regagne Rome, dont on est éloigné, regardant toujours à la tribune d'où partait la bénédiction, et le cœur joyeux, à l'exemple des Apôtres : « Et ipsi adorantes, regressi sunt in Jerusalem cum gaudio magno. » S. Luc, c. XXIV, ỳ. 52.

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X. BARBIER DE MONTAULT.

N.-S. monta au ciel, à la neuvième heure du jour. V. mon Année liturgique à Rome, p. 164.

BIBLIOGRAPHIE

RECUEIL DE DOCUMENTS INÉDITS CONCERNANT LA PICARDIE, publiés par M. VICTOR DE BEAUVILLE, d'après les titres originaux conservés dans son cabinet. Paris, 1860, imprimerie impériale; in-4° de 522 pages.

M. V. de Beauvillé n'est pas un de ces vulgaires bibliophiles qui se bornent à regarder la première page des livres, qui en retiennent uniquement le titre et la date, en se souciant fort peu du reste, et qui se garderaient bien de découper une brochure du dixhuitième siècle, dans la crainte de lui ravir le mérite de sa virginale intégrité. Si les rayons de sa bibliothèque sont garnis abondamment, les casiers de sa mémoire sont encore plus richement fournis. Les jouissances solitaires de la possession, quelque vives qu'elles soient, lui paraissent incomplètes. Ce n'est pas un avare égoïste qui accumule en secret des richesses improductives; il thẻsaurise avec passion, mais c'est pour enrichir le domaine de la science; il fait participer le public à ses spéculations littéraires, mais il garde à son compte la dépense et le labeur, en nous offrant généreusement le plaisir et le profit.

Le Recueil de Monuments inédits sur la Picardie est un nouvel acte de libéralité du spirituel et savant auteur de l'Histoire de Montdidier. Que de patience n'a-t-il point fallu pour rassembler ces manuscrits que les riches amateurs se disputent au feu des enchères ! Que de recherches pour reconnaître ceux qui sont réellement inédits ! Que de tact et de sagacité, pour ne publier que les pièces réellement intéressantes, et résister aux séduisantes illusions qui grandissent trop souvent la valeur d'une propriété exclusive!

M. de Beauvillé s'est renfermé volontairement dans un cercle

fort restreint; il a donné par là même à son œuvre un certain cachet d'originalité qui n'en est pas le moindre mérite. Il n'a édité des documents relatifs à la Picardie et dont les originaux appartiennent à son cabinet.

que

Les Mabillon, les Bouquet, les Marlène, les d'Achery se trouvaient jadis fort à l'aise en publiant des Recueils de documents, dont le vaste cadre embrassait toute l'histoire du moyen-àge. Ils n'avaient, pour ainsi dire, qu'à se baisser pour ramasser des trésors inédits. Les chartriers des monastères, les archives des châteaux, les bibliothèques publiques et privées offraient à leur choix un excès d'abondance. Après ces riches moissons, il serait resté sans doute encore bien des épis à glaner. Mais, hélas! la Révolution qui dévorait les hommes ne pouvait point se faire scrupule de dévorer les parchemins; elle essaya d'anéantir le souvenir des temps féodaux en en brûlant les titres. L'insouciante incurie des administrations locales mit bientôt le comble au vandalisme, et les plus vénérables documents trouvèrent une fin misérable dans la hotte du chiffonnier, sous le ciseau du relieur ou dans les mains de l'épicier, qui ne se douta jamais qu'en roulant artistement des cornets, il devenait l'émule du farouche Omar!

On ne saurait donc trop admirer le courage de ces sauveteurs intrépides qui s'efforcent d'arracher aux naufrages du passé leurs dernières épaves. Mais du moins ils sont soutenus par une forte espérance lorsque, comme notre savant ami dom Pitra, ils rendent l'Europe tout entière tributaire de leurs études. Ne faut-il pas une dose héroïque de persévérance quand, au lieu d'étendre ses investigations sur un si vaste champ, on les circonscrit à l'histoire d'un tout petit coin de la France. Les difficultés ne grandissent-elles point encore démesurément, quand on se ferme volontairement l'accès des plus riches dépôts, quand on s'interdit de puiser dans les collections publiques et qu'on se borne à ouvrir les cartons de son propre cabinet. Pour accomplir un tel tour de force littéraire, il a fallu que M. de Beauvillé l'ait prémédité depuis de longues années. La persévérance intelligente a de tout temps, il est vrai, enfanté des prodiges; mais pour en produire aujourd'hui, dans cet ordre de choses, il faut que la patience soit doublée de nombreux billets de banque. L'historien de Montdidier n'a reculé devant au

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