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ne permit pas à des bâtimens d'une marche et d'une voilure si inégale de s'observer mutuellement et de conserver leur poste.

L'amiral Saumarez, qui était resté en panne au vent de l'escadre combinée jusqu'à l'en* trée de la nuit, força de voiles pour l'atteindre, après avoir suivi et observé pendant quelque temps la marche des bâtimens : vers onze heures du soir, il ordonna au Superbe d'attaquer les vaisseaux d'arrièregarde; ce vaisseau passant entre l'Hermenegilde et le Real Carlos lâcha ses bordées de tribord et basbord sur l'un et sur l'autre, et doublant leur sillage, se porta sur le SaintAntoine déjà attaqué par le César. Les deux vaisseaux espagnols l'Hermenegilde et le Real Carlos , qui dans l'obscurité n'avaient point aperçu le changement de position du vaisseau anglais, croyant l'un et l'autre riposter à son feu , se prirent réciproquement pour ennemis;

; ils se livrèrent un furieux combat; entraînés de plus en plus par cette funeste erreur, après s'être canonnés avec acharnement, ils s'abordèrent : le vent

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fraîchit et devint violent; le feu prit à bord du Real Carlos , qui fut promptement embrasé ;

les flammes qui le dévoraient gagnèrent bientôt l'Hermenegilde qui ne put s'en séparer. Les deux escadres étaient mêlées, amis et ennemis, témoins de ce, désastre, ignorant quelles en étaient les victimes, s'éloignaient de cet horrible et vaste incendie : les deux vaisseaux sautèrent à vingt minutes de distance ; la double explosion retentit au loin, et produisit dans Cadix l'effet d'un tremblement de terre. Trois cents hommes seulement, de deux mille qui composaient les équipages de ces deux vaisseaux à trois ponts, échappèrent à la mort en se précipitant dans les embarcations; et pour comble de malheur ils abordèrent le SaintAntoine au moment où celui-ci amenait son pavillon au Superbe et au César qui l'avaient entièrement démâté.

La frégate la- Sabine dont les feux à tête de mât (signal de ralliement) attiraient l'attention de l'ennemi, fut vivement poursuivie et canonnée pendant cette affreuse

nuit. Le jour seul put éclairer l'amiral Moreno sur les pertes qu'il avait faites; il rallia

; le reste de l'escadre combinée, à l'exception du Formidable, dont il entendit le combat dans la partie de l'est, et qu'il n'aperçut que par ses fumées : la brise était du sud-est; l'amiral fit former la ligne de bataille promptement, et sans égard aux postes, pour aller au secours du vaisseau engagé. Le Formidable , qui n'avait que

des tronçons de mâts greffes et de basses voiles ,

dans l'obscurité de la nuit, suivre le mouvement de l'escadre combinée. Vers minuit il essuya le feu des cinq vaisseaux anglais, et s'aperçut qu'ils tiraient à boulets rouges, ayant sans doute à bord les grils qu'ils avaient préparés pour incendier les vaisseaux français au mouillage d’Algésiras. Le capitaine Troude, loin de répondre, alluma les mêmes feux qu'il apercevait à leurs bords, et parvint ainsi à leur échapper; il fut reconnu au point du jour par trois vaisseaux et une frégate ; c'était le Vénérable, le César, le Superbe et la Tamise , qui lui

n'avait pu,

donnèrent chasse et l'atteignirent vers sept heures du matin : le capitaine Troude fit bonne contenance, et ménageant son feu, lâchant tour à tour ses bordées sur celui qui l'approchait le plus, il poursuivit sa route en rangeant la terre: la fortune le seconda; le Superbe et le César restèrent en arrière, soit parce que le vent mollissait, soit à cause d'avaries dans leurs manoeuvres ; mais le Vénérable et la Tamise s'obstinèrent à

poursuivre le Formidable , se tenant à demiportée et le canonnant vivement en poupe et par la hanche. Le capitaine Troude après avoir sévèrement repoussé la frégate, préta hardiment le travers au Vénérable , le laissa approcher à portée de mousqueterie, et presque vergue

à
vergue;

il fit alors un feu terrible, bien soutenu, et uniquement dirigé sur la mature et le gréement : il fut si bien obéi par son excellent équipage, ses canonniers pointèrent avec tant de sang-froid et de justesse, qu'il vit successivement tomber tous les mâts du Vénérable, qui après une heure et demie de combat, se trouva rasé

conime un ponton, et faisant eau de toutes parts; la frégate et les embarcations des autres vaisseaux lui portèrent de prompts secours, et le remorquèrent en abandonnant le champ de bataille.

Après ce glorieux engagement, le brave commandant du Formidable continua sa route, et entra à Cadix aux acclamations des Espagnols, qui de la côte et du château Saint-Pierre, avaient été témoins du combat. Le reste de la flotte combinée mouilla aussi à Cadix, dans la même journée 13 juillet.

L'heureux Saumarez rallia dans la baie du Rosier son escadre très-maltraitée; il la répara avec cette activité et cette adresse

par lesquelles les Anglais surpassent, pour ces travaux à la mer, tous les autres peuples navi

. gateurs; l'amiral Saumarez ne tarda

pas

à reprendre sa station devant Cadix.

La perte des deux plus beaux vaisseaux de la marine espagnole causa dans le royaume une consternation générale; la nouvelle de cet événement dont l'histoire des guerres maritimes n'offre aucun autre exemple, par

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