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plusieurs circonstances graves el importantes se réunirent pour opérer dans l'esprit des ministres anglois une conviction morale qu'ils crurent suffisante pour autoriser une mesure vigoureuse par laquelle devoit être écarté le danger dont leur patrie étoit menacée. Telles furent ces expressions évidemment dirigées contre le Danemark, qu'on lit dans un bulletin françois, publié après la bataille de Friedland: « Bientôt le blocus du continent ne sera plus un vain nom!»; la demande faite au Danemark, en même temps qu'on lui donna connoissance du décret de Berlin, de retirer ses troupes du Holstein et de fermer ses ports au commerce anglois et suédois ; les menaces que Buonaparte proféra contre le prince royal dans une audience accordée à Posnanie aux députés de la ville de Hambourg; enfin la proposition faite au roi de Suède par Murat2 de se réconcilier avec la France aux dépens du Danemark, auquel il enlèveroit la Norwège. Malheureusement l'exécution de la mesure ordonnée par les ministres anglois éprouva une résistance à laquelle ils parurent ne s'être pas attendus; et la nécessité de bombarder Copen

1 Ce fait a été affirmé dans la chambre des communes de la Grande-Bretagne, au mois de janvier 1808, par M. Garlike, qui avoit été ministre résidant à Copenhague.

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Cette proposition fut faite au comte de Moerner, officier suédois, fait prisonnier à l'affaire de Lubeck.

hague pour s'emparer de la flotte qui se trouvoit à l'abri sous les remparts de cette ville, fut accompagnée de circonstances qui révoltèrent, nous ne dirons pas l'opinion publique (car l'opinion publique du continent n'étoit pas libre alors), mais ces hommes de bien qui, jugeant les autres d'après leur propre caractère, croyoient encore qu'il existoit des bornes pour l'ambition de Buonaparte.

Si, comme il paroît probable, Buonaparte vouloit renverser le gouvernement danois ou l'entraîner dans la ligue du continent contre la Grande-Bretagne, le ministère danois, soit qu'il se fût abandonné à une sécurité fatale, soit qu'il eût trop présumé de ses forces, paroît n'avoir pas été convaincu du danger qui le menaçoit, puisqu'il a déclaré, à la face de l'Europe, qu'aucune proposition dirigée contre la Grande-Bretagne ne lui avoit été faite par Buonaparte'; mais nous pensons que, si la manière dont la Séelande a été envahie par les Anglois n'est pas, sous tous les rapports, exempte de reproches, la postérité combinant les événemens de 1807 avec ceux de 1808, ne blâmera pas le cabinet de Londres d'avoir prévenu son ennemi, en soustrayant à sa puissance une ma

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Il faut excepter la proposition de fermer ses ports aux bâtimens anglois, que ce ministre regardoit peutêtre comme dirigée contre le commerce anglois plutôt que contre le gouvernement britannique.

rine

que celui-ci espéroit bien pouvoir diriger contre l'Angleterre.

Le ministère, formé le 5 février 1806, avoit perdu son principal appui par la mort de Fox: il conduisit d'une main foible le gouvernail de l'état jusqu'au 25 mars 1807 qu'il fut remplacé. Le duc de Portland fut alors placé à la tête de l'échiquier, dont Spencer Perceval fut nommé sous-trésorier; M. Canning fut nommé secrétaire-d'état au département des affaires étrangères; lord Castlereagh, ministre de la guerre. Le nouveau ministère, uni de principes et de vues, annonça une énergie dont le défaut étoit reproché aux hommes qui l'avoient précédé au timon des affaires. On prépara sur-lechamp, dans les ports du royaume, une expédition formidable. Les troupes hanovriennes, qui avoient été envoyées à l'armée suédoise en Pomeranie, en furent rappelées, en vertu de l'article séparé de la convention du 17 juin 1807, pour être employées à l'expédition projetée. Le public en ignoroit la destination, et un des ministres dit, le 51 juillet, au parlement, que ceux qui en étoient l'objet n'en entendroient parler que lorsqu'ils seroient frappés du coup de mort.

La flotte que la Grande-Bretagne équipa se composoit de 23 vaisseaux de lignes, de 9 frégates, 22 petits bâtimens de guerre et 500 vaisseaux de transport sur lesquels on embarqua la légion allemande qui s'étoit accrue jusqu'à

18,000 hommes, y compris ceux qui se trouvoient à Stralsund, avec 15,000 hommes de troupes nationales. Cette formidable armée se mit en mer, en deux divisions, le 27 juillet et le 2 août, et l'Europe attendit avec une vive inquiétude l'objet d'une telle expédition. Une des deux divisions, sous les ordres du commodore Keats, cingla vers le grand Belt qui sépare les îles de Séelande et de Fionie, passage anciennement jugé impraticable aux gros vaisseaux. Le but de ce mouvement fut de couper toute communication entre les îles danoises et la Chersonèse cimbrique. L'amiral Gambier, avec l'autre division de la flotte et les troupes de débarquement commandées par lord Cathcart, se présenta, le 3 août, devant Kronenbourg, château fort qui ferme l'entrée du Sund.

Le prince royal se trouvoit à Kiel à la tête de l'armée, se croyant à l'abri de tout autre danger que celui dont le menaçoit le voisinage des troupes françoises. Ce fut dans cette ville que se présenta, le 6 août, devant le comte de Bernstorff, et ensuite devant le prince royal lui-même, sir Francis Jackson qui, quelques années auparavant, avoit été ministre plénipotentiaire du roi d'Angleterre à la cour de Berlin. Ce négociateur déclara, au nom de son gouvernement, que celui-ci s'étant procuré la preuve que l'intention de Buonaparte étoit de forcer le Danemark à fermer ses ports aux Anglois, et à prendre part au système con

tinental, l'interêt et la sûreté de la GrandeBretagne et l'indépendance du Danemark, exigeoient que la cour de Copenhague contractât une étroite alliance avec l'Angleterre, et consentît à ce que sa flotte fût conduite en Angleterre pour la soustraire à Buonaparte, avant que la rigueur de la saison ne l'eût confinée dans les ports de Copenhague. M. Jackson protesta solennellement que la flotte seroit rendue à la paix. Il offrit au prince royal l'alliance intime de la Grande-Bretagne, la garantie de toutes ses possessions, et même une augmentation de territoire : en un mot, il mit à sa disposition tout ce que les flottes, les armées et le trésor de l'Angleterre pouvoient faire pour le soutenir dans ce moment, et pour le mettre à l'abri de toute vexation future. Il ajouta que si, de la part du gouvernement danois, on craignoit de se compromettre, les forces armées qui se tenoient en face de Copenhague étoient si considérables, qu'on pourroit donner une apparence de violence au parti qui auroit été convenu. Le prince royal ayant rejeté avec fermeté et indignation toutes ces propositions, le négociateur anglois ne lui cacha pas que son gouvernement mettoit une si haute importance à l'exécution de cette mesure, qu'on emploieroit la force pour l'obtenir. Le prince partit sur-le-champ pour Copenhague, où M. Jackson le suivit.

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