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s'attendre au premier échec qu'éprouveroient ses armes: sur-le-champ il résolut de renverser le trône des Bourbons en Espagne 1.

Il restoit à Buonaparte de délibérer sur le choix des moyens. En attaquant à forces ouvertes une nation brave et fidèle, on risquoit de lui inspirer cet enthousiasme qu'engendre l'amour de la patrie. On étoit loin, il est vrai, d'apprécier le danger auquel on s'exposoit, parce que la prévention croyoit le peuple de la péninsule plongé dans l'indifférence et la mollesse; toutefois il étoit plus avantageux de neutraliser ses forces, en trompant la famille royale et en flattant les passions des ministres, jusqu'à ce que les uns et les autres se trouvassent au bord du précipice. De ces deux partis, celui de la force ouverte auroit convenu à un grand homme; Buonaparte choisit celui de la perfidie.

Dès le commencement de 1807, une armée françoise s'assembla dans les environs de Bayonne. Etoit-elle destinée contre l'Espagne? menaçoit-elle le Portugal? Elle devoit subjuguer l'un et l'autre ; mais par un raffinement de machiavélisme, on voulut s'assurer la coopération de l'Espagne pour renverser le trône du Portugal. L'espoir de faire oublier sa proclamation aveugla le gouvernement de Madrid; il ne vit le piége qu'on lui avoit tendu que

'M. de Pradt déclare qu'il le lui a dit souvent.

Fontainebleau du

quand il se fut livré entre les mains de son ennemi.

Conventions de On proposa à Charles IV le partage du Por37 octobre 1807 tugal: deux conventions secrètes furent signées

à Fontainebleau, le 27 octobre 1807, entre
Michel Duroc et le ministre d'Espagne don Eu-
genio Izquierdo. Le Portugal fut divisé en trois
portions. La province d'Entre Duero e Minho,
habitée par environ 900,000 âmes, fut des-
tinée, à titre de royaume de la Lusitanie sep-
tentrionale, au roi d'Etrurie, contre le royaume
qu'on avoit donné à son père peu d'années au-
paravant, et que Buonaparte se réserva. La
province d'Alentejo, et le royaume des Al-
garves, ayant environ 400,000 habitans, fu-
rent promis au prince de la Paix à titre de
principauté des Algarves. Le roi de la Lusi-
tanie, et le prince des Algarves, et leurs des-
cendans dans l'ordre de succession espagnole ',
devoient posséder ces états en pleine souve-
raineté, mais reconnoître le roi d'Espagne
comme leur protecteur, sans le consentement
duquel ils ne pourroient faire ni
guerre ni paix.
A l'extinction de leur descendance mâle et fé-
minine, le roi d'Espagne disposera de ces états
par forme d'investiture, de manière qu'ils ne
pourront être réunis sur la même tête ni à
la couronne d'Espagne. Les deux parties con-
tractantes se réservèrent de disposer, à la paix

'D'après cet ordre, les femmes succèdent à défaut de toutes les lignes masculines.

générale seulement, du reste du Portugal, savoir des provinces de Beira, Traz los Montes et Estramadure, ayant environ un million d'habitans. On se proposoit de les rendre à la maison de Bragance, dans le cas où l'Angleterre voudroit les racheter par la restitution de Gibraltar et de l'île de la Trinité. On convint que le futur possesseur seroit obligé de reconnoître la protection de l'Espagne, de la même ma→ nière que le roi de la Lusitanie septentrionale et le prince des Algarves la reconnoissoient. Par des articles de la convention, Napoléon Buonaparte garantit au roi d'Espagne la possession de ses états du continent de l'Europe, situés au midi des Pyrénées. Par un autre, il s'engage à reconnoître S. M. C. comme empereur des Deux-Amériques, « lorsque tout sera prêt, pour que S. M. C. puisse prendre ce titre; ce qui pourra arriver à la paix générale, ou, au plus tard, dans trois années. » Les deux parties contractantes se réservèrent le partage des fles, colonies et possessions portugaises outre

mer.

La seconde convention du même jour règle tout ce qui regarde l'exécution des arrangemens pris par la première. Un corps françois de 25,000 hommes d'infanterie et de 3,000 chevaux entrera en Espagne, et marchera directement sur Lisbonne. Huit mille hommes d'infanterie espagnole et 3,000 de cavalerie s'y joindront. En même temps un corps de

10,000 Espagnols prendra possession de la province d'Entre Duero e Minho, et 6,000 hommes occuperont l'Alentejo et les Algarves. Les trois provinces qui doivent rester séquestrées, seront administrées par le général commandant les troupes françoises, qui en percevra les contributions; les provinces occupées par les Espagnols seront administrées pour le compte du roi catholique; le corps du centre sera commandé par le général françois, à moins que le roi d'Espagne ou le prince des Algarves ne juge à propos de s'y rendre. Une seconde armée françoise de 40,000 hommes se réunira jusqu'au 20 novembre à Bayonne pour entrer en Portugal, dans le cas où les Anglois y enverroient du secours ou menaceroient d'une attaque 1.

1

DON PEDRO CEVALLOS, qui a le premier publié ces deux conventions, dans son Exposé des moyens employés par l'empereur Napoléon pour usurper la couronne d'Espagne, publié à Madrid le 1 septembre 1808, et traduit par M. Netternent. Paris, 1814, in-8°, assure que le déparment des affaires étrangères, à la tête duquel il se trouvoit placé, n'avoit pas la moindre connoissance de la mission de don Eugenio Izquierdo à Paris, et qu'on lui avoit caché sa nomination, ses instructions et sa correspondance. De même M. DE PRADT, dans ses Mémoires historiques sur la révolution d'Espagne, Paris, 1816, in-8.o (p. 28 de la troisième édition), assure que M. de Talleyrand-Périgord n'eut aucune part à ce traité, et que, dès qu'il en apprit l'existence, il en avertit le comte de Lima, qui, sans perte de temps, écrivit à Lisbonne

Le ministère qui avoit conclu, le monarque qui avoit ratifié cette convention, avoient pris par cela même l'engagement de se soumettre à tout ce qu'il plairoit à Buonaparte d'exiger de leur complaisance. Le roi adopta le système continental, par un décret du 8 janvier 1808, ainsi conçu:

« L'abominable attentat commis par des vaisseaux de guerre anglois, en l'année 1804, par ordre exprès du gouvernement anglois, contre les quatre frégates de la flotte royale, qui, naviguant sous l'entière assurance de la paix, ont été injustement surprises, attaquées et forcées de se rendre, m'a déterminé à rompre toutes relations avec le cabinet britannique, et à me considérer comme en état de guerre contre une puissance qui a si iniquement violé le droit des gens et de l'humanité une agression aussi atroce me donnoit des motifs suffisans pour rompre tous les liens qui unissent une nation à une autre, lors même que je n'aurois pas considéré ce que je devois à moi-même à l'honneur et à la gloire de ma couronne et de mes amés vassaux. Deux années de guerre se sont écoulées sans que la Grande-Bretagne ait modéré son orgueil ni renoncé à l'injuste domination qu'elle exerce sur les mers; mais, au contraire, confondant tout à la fois ses amis, ses ennemis et les neutres, elle a manifesté l'intention formelle de les traiter tous avec la même tyrannie.

«Par ces considérations, je me déterminai, en février de l'année dernière, en me conformant aux

pour tenir en garde son gouvernement sur ce qui alloit

se passer.

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