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350 LE SENTIMENT DU DEVOIR RETIENT FABERT A SON POSTE.

grande infirmité, du moins celle qui me fait le plus de peine je ne trouve point d'homme dont la manière d'agir ne me fâche à la longue, et je ne suis pas capable de me gêner chez moi, ainsi que je fais dans le monde, où l'habitude donne facilité à faire. les choses que je ne pourrais faire étant retiré pour vivre en liberté '. »

Sous l'empire d'un autre sentiment, celui du devoir, qui l'animait en toute circonstance, Fabert faisait suivre sa confidence de cette réflexion : « Il faut aussi que le roi soit le maître et parle de lui-même avant qu'abandonner un lieu capable de faire bien du mal, tombant entre les mains d'un mal intentionné. » Devant cette considération, le soldat resta à son poste; mais toute velléité de retraite ne s'était pas encore évanouie dans son esprit.

Lorsque Fabert annonçait à Chavigny son intention de rompre avec le monde, il venait de recevoir de la faveur royale de quoi y figurer avec plus d'éclat, c'est-à-dire un titre honorifique et le brevet de la charge militaire la plus élevée après celle de maréchal de France. Par lettres patentes du mois de mai, enregistrées à la chambre des comptes de Dijon, le

1. Lettres (aut.) de Fabert à Chavigny, du 4 décembre. (Arch. nat., K, 118 A.)

2. Lettre (aut.) de Fabert à Chavigny, des 29 janvier et 13 février 1651. (Arch. nat., K, 118 A.) Il dit dans celle du 13 février : « Je quitterais avec joie mon emploi, si je croyais le pouvoir faire en conscience et mettre la place en main aussi assurée pour le roi que la mienne. » A ce moment Fabert se montrait très affecté de la mort d'Abraham Rambour; il perdait dans ce ministre un précieux auxiliaire.

LARREY ÉRIGÉ EN MARQUISAT EN FAVEUR DE FABERT. 351 1er juillet, le roi avait érigé en marquisat, au profit de Fabert et de ses enfants, les terres de Larrey, Cerilly, Poinçon et Bissey1, situées dans le bailliage de la Montagne 2, en Bourgogne, acquises par lui, le 26 avril précédent, du maréchal de Gramont, au prix de cinquante-sept mille écus, soit cent soixante et onze mille livres3. Le 20 septembre suivant, il lui avait

1. Ces quatre localités appartiennent aujourd'hui au canton de Laignes (arrond. de Châtillon-sur-Seine), dans la Côte-d'Or. 2. Châtillon-sur-Seine était le siège de ce bailliage.

3. Ces lettres patentes figurent dans les registres de la chambre des comptes de Dijon. (Arch. gén. de la Côte-d'Or, B, 46). L'original en a été communiqué à la Société de l'Histoire de France (Bulletin de l'année 1853) par M. Chevreul fils. Il en existe un exemplaire imprimé à la Bibliothèque Sainte-Geneviève. Le tome CXXII des Archives du Dépôt de la Guerre contient la minute du préambule des mêmes lettres.

La création était faite en faveur de Fabert et de ses enfants mâles, et, à défaut de ces derniers, au profit des enfants mâles de ses filles. Plusieurs lettres (aut.) de 1649 et de 1650, de Fabert à Chavigny (Arch. nat., K, 118 A), une lettre déjà citée de Fabert à Mazarin, du 13 octobre 1650, et enfin un acte notarié (min. orig. signée Fabert et Claude de Clevant), de l'étude de Ducloux, notaire, du 9 septembre 1650 (actuellement étude de Me Gibert, à Sedan), contiennent quelques détails sur. es négociations auxquelles donna lieu la cession de Larrey. Fabert ne put payer d'abord, sur sa fortune personnelle, qu'une faible part du prix d'achat. M. de Roquepine et un bourgeois de Sedan lui prêtèrent 25 000 écus. Il prit des arrangements, pour le reste, avec les créanciers du maréchal de Gramont.

La reprise de fief eut licu le 5 juillet 1650. Le 10 décembre de la même année, Fabert présenta le dénombrement de Larrey. L'original de cette déclaration, qui porte la date du 24 octobre 1650, est signé de Fabert et de deux notaires de Sedan, Jean Ducloux et Toussaint Berchet; il appartient à S. A. R. Mgr le duc d'Aumale, et fait partic des Archives de Gondé.

D'après des documents conservés aux Archives de la Côte-d'Or, et dont nous devons la communication à l'obligeance de M. Garnier, Fabert vendit, le 29 décembre 1661, le marquisat de Larrey, au prix de 255 000 livres, à Pierre Lenet, ancien procureur général au par

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LE ROI ENVOIE A FABERT

«

accordé les provisions de lieutenant général en l'armée de Flandre, en l'absence et sous l'autorité du maréchal du Plessis-Praslin1». Lettres et brevet constataient que, depuis l'âge de dix-huit ans, Fabert avait assisté à cinquante-neuf sièges de places con

lement de Dijon, conseiller d'État, l'auteur bien connu des Mémoires contenant l'histoire des guerres civiles des années 1649 et suivantes. Le 15 mai 1662, la chambre des comptes de Dijon procédait à l'entérinement des lettres patentes, données à Paris, par lesquelles le roi confirmait l'aliénation faite à Lenet par Fabert, et l'autorisait à substituer le nom de Larrey-Lenet à celui de Fabert. Le 7 juin, Lenet était admis à remplir ses devoirs de fief.

Par actes des 27 juin et 16 avril 1675, les héritiers de Lenet s'engagèrent à vendre Larrey par décret aux princes de Conti et de la Roche-sur-Yon. En 1736, Monsieur le Duc (Louis-Henri, duc de Bourbon, prince de Condé et premier ministre de Louis XV à la mort du duc d'Orléans) abandonna une notable partie du domaine de Larrey à l'hôpital de Chantilly. (Arch. de Condé.)

Le château de Larrey existe encore, mais en ruine et inhabité ; il appartient à M. Le Moine, banquier à Bar-sur-Aube.

1. Archives du Dépôt de la Guerre (min.), t. CXXII.

On voit par la lettre rimée, ci-après, du gazetier Jean Loret (Muse historique), du 1er janvier 1651, adressée à la duchesse de Longueville, que le bruit de la mort de Fabert dut courir à Paris vers la fin de 1650.

« On tient Fabert mort dans Sedan,
Mais s'il est mort, c'est à son dan *,
Car c'est une triste aventure
Que d'entrer dans la sépulture.
De Navaille, par grand bonheur,
En est aujourd'hui gouverneur.
Comminge espérait cette grâce,
Mais quand il demanda la place,
On lui dit d'un cœur assez dur:
<< Mon ami, vous avez Saumur. »>
Mais, ô parents du sieur Navaille,
Je ne dis ici rien qui vaille;
Rengaînez donc le doux plaisir
Qui vous était venu saisir.

*Donimage, de damnum.

LES PROVISIONS DE LIEUTENANT GÉNÉRAL.

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quises par les armes du roi, ainsi qu'à plusieurs batailles, rencontres et combals.

Cette nouvelle est apocriphe,
Et point du tout sur le tarife,
Fabert lui-même ayant mandé
Qu'il n'est pas encor décédé. »

On sait que Loret était le thuriféraire en titre de Me de Longueville. Le vicomte de Navailles, qui venait d'épouser Suzanne de Neuillan, fille d'honneur de la reine Anne d'Autriche, et M. de Comminges étaient très dévoués à Mazarin; la raillerie à leur adresse est transparente.

CHAPITRE IV

(1651-1652.)

Misérable état de la Champagne.

courses. Tours défensives sur la Meuse.

Ce qu'on nommait autrefois des Fabert traite avec les délégués de l'évêque de Liège. Proteste contre les excès des Allemands (1651). — Ordonnance royale en faveur des Lazaristes de Champagne et de Picardie. Mazarin délivre les princes; sa fuite. — Il mande Fabert à Rethel. - Détresse à laquelle il est réduit. — Accueil qu'il reçoit de Fabert à Sedan. Arrive à Brühl. Chavigny rentre au conseil; trouve Fabert trop déférent pour Mazarin fugitif. Fabert explique sa conduite à Chavigny; se réjouit de son retour aux affaires. Avances de Mazarin à Chavigny par l'intermédiaire de Fabert. Mazarin se plaint à Fabert des procédés que Chavigny emploie pour le discréditer. - Traité d'échange

-

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de la principauté. Fabert fait supprimer la clause qui place Sedan dans le ressort du parlement de Paris.

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La reine veut

s'approprier le domaine de Sedan. Retraite de Chavigny. Fabert engage Chavigny à revenir à la cour. Correspondance active de Fabert avec Mazarin. Mazarin fait part à Fabert des alarmes que lui causent les discordes civiles. Défection du prince de Condé. Fabert presse en vain Chavigny de venir à Sedan. Prévient Mazarin contre l'ambition du coadjuteur; l'engage à rentrer en France à la tête d'une armée. - Mazarin décide d'amener des troupes au roi. — Fabert dirige les levées. Sert de diverses manières les projets de Mazarin. Ressentiment du duc d'Orléans contre Fabert. Nouveau soupçon élevé par

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