Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

choix. Si j'osais dire quelques-unes de mes préférences, j'indiquerais peut-être, pour l'attrait sévère du dessin, le tableau de l'Oratoire renaissant, peint dans un style sobre et fort, où respire pourtant je ne sais quelle naïveté et tendresse. Je mettrais encore à part, cette fois pour la fermeté et l'élévation des vues, les réflexions sur la vie de communauté, sur les sacrifices qu'elle impose, sur ses difficultés plus délicates dans une société libérale, telle que l'est l'Oratoire il y a là quatre ou cinq pages (pp. 175-180), dont le sens sérieux et la portée n'échapperont à personne. Je voudrais signaler enfin les deux derniers chapitres du livre (le Concile, la mort), qui sont beaux d'intelligence lucide, de jugement équitable, de discret pathétique. Mais pourquoi des préférences quand tout vaut d'être lu? Je sais quelques-uns de nos Universitaires de marque, qui, après avoir entrepris la lecture de l'ouvrage, n'ont pu s'en arracher; j'en sais de ceux-là mêmes qui l'ont relu, et à son occasion déjà profitablement médité. Nos collègues chrétiens, ou les simples curieux de vie morale et de psychologie, tous ceux qui ont à cœur de connaître les grandes manifestations de la pensée religieuse au siècle dernier, voudront aussi connaître ce livre. Ils y puiseront une connaissance plus intime, une intelligence et une admiration plus nettes du génie de Gratry. Je crois pouvoir affirmer qu'ils aimeront aussi le livre lui-même, pour révéler chez son auteur un don de penser et d'écrire, une fermeté de jugement, une élévation de vue, et, pardessus tout une droiture, qui n'ont rien de médiocre.

2.

G. LE BIDOIS.

Saint Anselme, par le comte Domet de Vorges, un vol. in-8°, vi-334 pages, Paris, Alcan, 1901.

Le saint Anselme que nous donne M. le comte Domet de Vorges, dans la collection des Grands philosophes dirigée par M. Piat, est plein de vie et d'intérêt. L'auteur place, avec science et habileté, son saint philosophe dans le cadre historique où il faut le considérer pour le bien comprendre, et l'y montre comme disciple de saint. Augustin, original néanmoins, et précurseur de la grande scolastique du xe siècle, dont saint Thomas fut le définitif organisateur.

La doctrine philosophique de saint Anselme est examinée sous huit titres bien choisis pour la mettre en relief: Théorie de la connaissance, La vérité, Réalisme et nominalisme, Le composé humain, L'âme, La liberté, Dieu, L'argument de saint Anselme.

Cet examen doctrinal est précédé de quatre chapitres d'histoire étudiés avec soin: La civilisation chrétienne au XI° siècle, La science

aux débuts du moyen âge, Écoles précolastiques, Vie de saint Anselme, et d'une analyse sommaire des Ouvrages de saint Anselme complétée par l'indication des principaux auteurs récents « qui ont essayé une revue générale de ses opinions ».

L'ouvrage se termine par une appréciation fort juste du caractère général de la philosophie de saint Anselme et de son influence sur TÉcole.

Puisque, comme le dit l'auteur avec finesse, ce beau génie a eu cette singulière destinée de n'être resté célèbre que par son œuvre la plus contestable (p. 1), le fameux argument qui porte son nom, pour démontrer l'existence de Dieu par l'idée de l'Être le plus grand que l'on puisse concevoir, disons tout de suite que cet argument est remarquablement critiqué par M. Domet de Vorges, qui en fait ressortir le défaut capital au point de vue de la logique : « On ne peut passer de l'ordre idéal à l'ordre réel sans s'appuyer sur un fait réel. L'argument de saint Anselme, tel qu'il le présente, prouverait tout au plus que l'Etre tel qu'on n'en peut concevoir un plus grand comprend l'existence nécessaire, doit être conçu comme existant par nature, si toutefois il existe; il ne prouve nullement qu'un tel être existe en fait (p. 319). »

Signalons aussi, particulièrement, le chapitre sur le Réalisme et le Nominalisme, où le problème redoutable des universaux est traité, à la fois historiquement et philosophiquement, avec beaucoup de savoir. Nous aurions peut-être quelques réserves à faire sur la théorie de la connaissance qu'adopte M. Domet de Vorges et sur l'interprétation qu'il donne de la thèse de saint Thomas relative à l'intellect agent; mais, comme il s'agit principalement de saint Anselme, nous nous contenterons de dire que l'on pourrait développer la vérité contenue dans cette citation du Monologium: « Dans la pensée de l'homme, quand il pense quelque chose qui est en dehors de son esprit, l'expression de la chose pensée ne naît pas de la chose même, puisque celle-ci est absente du regard de la pensée, mais de quelque similitude de la chose ou image qui est dans la mémoire du sujet pensant, ou peut-être qui, lorsqu'il pense, vient de la chose présente au moyen du sens corporel, et de là, est portée dans l'esprit.

>>

Terminons en faisant observer, après M. Domet de Vorges, que ce saint Anselme à qui l'on doit la formule : « Je ne crois pas que je comprends pour croire, mais je crois pour comprendre, car ce que je crois, si je ne le croyais pas, je ne le comprendrais pas », ce même théologien philosophe, en s'efforçant d'appliquer la raison naturelle à l'intelligence des vérités enseignées par l'Église, a préparé la con

stitution de la philosophie sur un domaine distinct de celui qui appartient en propre à la théologie. « Les plus grands changements se produisent la plupart du temps d'une manière inconsciente. Saint Anselme croyait ne faire que de la théologie; déjà il couvait l'embryon de la philosophie. Bientôt cette science allait se développer dans son individualité propre. Elle devait rester encore quelque temps liée à la théologie comme auxiliaire: telle fut sa situation au XIIIe siècle. Puis, elle sortira du cloître, respectueuse toutefois de la vérité religieuse. Enfin, surviendra la tentation trop souvent écoutée de s'élever contre la théologie elle-même. La philosophie a été pour l'Église une grande force; elle l'a exposée aussi à de grands dangers. Les hommes ignorent trop souvent, les conséquences, bonnes ou mauvaises, des principes qu'ils posent, et, dans l'état actuel de l'humanité, on ne peut leur mettre en mains une puissance qui ne devienne pas quelquefois un péril (p. 328). ».

J. G.

Erratum : Dans notre dernier numéro, quelques erreurs se sont glissées par notre faute dans l'article nécrologique consacré à M. Alix; nous nous empressons de les signaler et de les corriger.

Page 457. Au lieu de : Les satisfactions que lui prodigua sa famille, lire la famille.

Page 458 Au lieu de: En invoquant l'image, lire en évoquant l'image.

Le Gérant: CH. BAULES.

MACON, PROTAT FRÈRES, IMPRIMEURS

SEPTIÈME ANNÉE.

Mars-Avril 1902.

N° 2

[graphic]

L'INSTITUT CATHOLIQUE

I. L'intelligence d'après Aristote....... CLODIUS PIAT.

II.

III.

IV.

[ocr errors]

V. Les sources d'Aymerillot...

VI.

VII. VIII.

SECRÉTARIAT DE L'INSTITUT CATHOLIQUE

« REVUE DE L'INSTITUT CATHOLIQUE »

paraît le 5 des mois de février, avril, juin, août, décembre,

SOUS LA DIRECTION DE

MM. Charles Chobert, professeur de Code civil; de Lapparent professeur de Géographie physique; Rousselot, professeur de Phonétique expérimentale; Vigouroux, professeur d'Écriture sainte, et G. Le Bidois, maître de conférences de Littérature française, secrétaire de la rédaction.

Chaque numéro contient 96 pages, dont 80 d'articles et 16 de « Notes et Nouvelles », chronique de l'enseignement supérieur en France et à l'étranger et de comptes rendus d'ouvrages.

(Il sera rendu compte de tout ouvrage envoyé en double exemplaire.)

LE PRIX D'ABONNEMENT EST DE :

Paris et Départements, 5 francs. — Étranger, 6 francs. Le prix du numéro, de 1 fr. 25.

Tout ce qui concerne la rédaction doit être adressé à M. G. LE BIDOIS, et tout ce qui concerne l'administration à M. JOSEPH CHOBERT, secrétaire général de l'Institut catholique, 74, rue de Vaugirard.

Les six premières années de la Revue sont en vente au Secrétariat.

Chaque volume broché, 5 francs, franco.

« ZurückWeiter »