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« REVUE DE L'INSTITUT CATHOLIQUE »

paraît le 5 des mois de février, avril, juin, août,

décembre,

SOUS LA DIRECTION DE

MM. Cauvière, professeur de droit criminel; de Lapparent, professeur de Géographie physique; Rousselot, professeur de Phonétique expérimentale; Vigouroux, professeur d'Écriture sainte, et G. Le Bidois, maître de conférences de Littérature française, secrétaire de la rédaction.

Chaque numéro contient 96 pages, dont 80 d'articles et 16 de « Notes et Nouvelles », chronique de l'enseignement supérieur en France et à l'étranger et de comptes rendus d'ouvrages.

(Il sera rendu compte de tout ouvrage envoyé en double exemplaire.)

LE PRIX D'ABONNEMENT EST DE :

Paris et Départements, 5 francs. Étranger, 6 francs.

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Le prix du numéro, de 1 fr. 25.

Tout ce qui concerne la rédaction doit être adressé à M. G. LE BIDOIS, et tout ce qui concerne l'administration à M. JOSEPH CHOBERT, secrétaire général de l'Institut catholique, 74, rue de Vaugirard.

Les six premières années de la Revue sont en vente au Secrétariat.

Chaque volume broché, 5 francs, franco.

LES GRANDES LIGNES

DE

LA GÉOGRAPHIE DE L'ASIE

Les parties du monde auxquelles les leçons de cette année doivent être consacrées sont certainement les plus importantes, sous le rapport de la surface occupée comme sous celui du chiffre de la population. L'ensemble de l'Asie, de l'Afrique et des terres océaniennes représente près de 60 % de la superficie continentale, et sur 1.500 millions d'habitants que compte aujourd'hui notre globe, un bon milliard, c'est-à-dire les deux tiers, appartiennent aux unités en question.

Il semble donc que ces unités devraient peser d'un poids prépondérant dans l'histoire du développement de l'humanité. Pourtant, sans les préoccupations coloniales, auxquelles nulle puissance n'échappe aujourd'hui, ce qui se passe dans ces immenses contrées pourrait être ignoré du monde civilisé. On raconte qu'à l'époque où Montesquieu publiait ses Lettres persanes, un bel esprit, qui ne faisait en cela que trahir la pensée commune, se serait écrié : « Peut-on bien être persan? » De la même façon, il en est beaucoup parmi nous qui diraient volontiers: Peuton bien être hindou, chinois, afghan, mongol ou touareg? Tant ces peuples nous demeurent étrangers par leurs cou

1. Cet article est la reproduction d'une leçon faite, le 11 avril 1902, au Cours de géographie pour les jeune filles, professé à l'Institut catholique.

REVUE DE L'INSTITUT CATHOLIQUE, 1902, N° 4.

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tumes, leurs préoccupations et leur religion, notre civilisation ne trouvant rien à leur emprunter que quelques curiosités artistiques. On serait vraiment tenté de croire que ces nations ont eu une existence distincte, tout à fait indépendante de la nôtre, si l'histoire et l'archéologie ne s'accordaient pour nous démontrer que c'est à elles qu'il faut demander le secret de nos origines.

En effet, toute l'Asie méridionale et le nord-est de l'Afrique ont gardé les traces indiscutables de civilisations bien plus anciennes que toute autre, et qui étaient parvenues à leur complet épanouissement alors que l'Europe n'était encore habitée que par des tribus sauvages. C'est de là qu'est venue l'impulsion qui devait faire germer la culture grecque, dont nous sommes les héritiers directs, comme aussi, plus tard, c'est de l'Asie que sont parties les vagues humaines qui, à diverses reprises, ont reflué sur le monde occidental.

D'où vient que l'Europe, ce fragment presque insignifiant de l'ancien monde, ait pu acquérir et garder l'incontestable prépondérance dont elle jouit depuis si longtemps? Pour quelles causes les régions qui avaient été le berceau de notre humanité sont-elles retombées dans la barbarie, ou ont-elles subi ce long engourdissement qui les a rendues impropres à tout progrès? Voilà des questions qui semblent du domaine exclusif de l'histoire et de la philosophie. Pourtant, quand on cherche à les résoudre, on s'aperçoit bien vite qu'une part considérable d'influence revient à ce qu'on peut appeler les conditions géographiques d'un peuple. La nature du sol, son relief, son climat, ses productions, ses relations avec les territoires voisins, figurent au premier rang parmi les causes qui déterminent la destinée des nations. C'est pourquoi, aujourd'hui que la terre commence à être bien connue sur toute sa surface, il est intéressant d'envisager à ce point de vue chacune de ses parties, en les considérant

telles que la nature les a faites, et non suivant les groupements que le hasard des révolutions ou des conquêtes a pu faire prévaloir.

C'est à cette étude de géographie physique que nous soumettrons cette année l'Asie et l'Afrique, nous efforçant d'y reconnaître toutes les unités homogènes dont elles se composent, et de faire ressortir le genre particulier de direction que chacune d'elles devait forcément imprimer à l'activité de ses habitants.

Mais, pour faire utilement cette recherche, il est nécessaire de rappeler tout d'abord quelques principes généraux. Les anciens distinguaient ici-bas quatre éléments: la terre, l'air, l'eau et le feu. Ces éléments constituaient pour eux des substances simples, et là était l'erreur de nos pères. Mais, cette erreur une fois rectifiée, il n'en reste pas moins vrai qu'ils avaient bien raison d'attribuer une prééminence particulière aux choses désignées par ces quatre noms; car ce sont en vérité les éléments fondamentaux de toute vie.

L'homme, pour subsister, a besoin de la terre qui non seulement le porte, mais renferme le principe de tout ce qui est nécessaire à son existence. Pour respirer, l'air lui est indispensable. Non moins indispensable est l'eau, véhicule de toutes les réactions, condition sine qua non de la vie des plantes et, par conséquent, des animaux qui s'en nourrissent. Enfin le feu, c'est-à-dire l'ensemble de la chaleur et la lumière, est l'agent d'impulsion universel, sans le concours duquel les autres éléments demeureraient inertes.

Sous l'influence du feu, l'eau des océans est en partie vaporisée, et se répand dans l'air, où les vents l'emportent, pour la faire descendre sur les continents en pluie bienfaisante. Cette pluie féconde la terre, y fait éclore les germes, et engendre la végétation, dont le développement est ensuite assuré par le concours de la chaleur et

de la lumière. De cette végétation dépend l'existence des animaux, que l'homme chasse pour en faire sa nourriture, ou qu'il utilise en les domestiquant. En même temps l'excédent de la pluie, par sa concentration en torrents, en rivières et en fleuves, met à la disposition du genre humain de grandes forces naturelles, et du même coup lui offre, pour la mise en exercice de sa sociabilité, des facilités auxquelles s'ajoute la navigation le long des côtes maritimes, partout où celles-ci sont favorablement disposées.

Or, rien n'est plus variable que la répartition réciproque de ces divers éléments. Ici la terre est, par elle-même, à la fois meuble et fertile, tandis qu'ailleurs elle se laisse difficilement travailler ou manque de ce qui convient à la végétation. Tantôt le relief du sol est doux, et tantôt il présente des aspérités impropres, par la raideur de leurs pentes, à tout essai de culture, ou se dressant entre les peuples voisins comme des obstacles infranchissables. Si, en général, l'altitude de la terre ferme est modérée, il est des surfaces étendues qui appartiennent, soit aux latitudes voisines du pôle, où règnent les glaces éternelles, soit à ces hautes régions de l'atmosphère où l'air, trop raréfié pour être facilement respirable, ne sait plus emmagasiner la chaleur solaire, ce qui rend impossible l'existence de la végétation. Ici des courants d'air venant d'une mer chaude apportent sur la terre ferme une humidité bienfaisante, tandis qu'ailleurs souffle, presque en toute saison, un vent desséchant, qui transforme la surface en un désert.

A ces différences viennent se joindre celles qui résultent du développement tout à fait inégal des artères fluviales et de leur réseau d'affluents, comme aussi de la configuration plus ou moins découpée des rivages maritimes, et des facilités diverses qu'ils peuvent offrir aux communications de proche en proche.

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