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son origine, son évolution, etc... D'ailleurs le plan paraît bien vaste, car l'auteur semble avoir voulu présenter, à propos de l'homme, une rapide synthèse des problèmes soulevés dans la pensée moderne : idéalisme, scepticisme, matérialisme, positivisme, biologie, sociologie, critique... Ainsi qu'il se l'était proposé, l'auteur ne donne de tous ces objets d'étude qu'une « esquisse », que « les conclusions les plus importantes et les plus générales ». Du moins M. Boulay a apporté à ce travail ainsi conçu, « la double contribution d'une saine philosophie et d'une science sûre »>, et nous dirons volontiers, en continuant d'emprunter les paroles de Mgr Baunard, « que ce livre de peu de pages mais de solide mérite sera considéré comme un guide nécessaire par les disciples et les maîtres de nos écoles supérieures. » J.-L. G.

8.

L'Inquiétude religieuse.

Aubes et lendemains de conver

sion, par M. Brémond, S. J. Librairie académique, Perrin, Paris, 1901. Un vol. in-16.

L'Académie française, en couronnant le beau livre du R. P. Brémond, n'a fait que répondre au secret sentiment de tous ceux-là, et ils sont déjà fort nombreux -, qui l'ont lu et médité. Rarement recueil d'articles réunis en volume offrit plus d'unité, et peu d'ouvrages posent devant le lecteur de plus hautes et plus poignantes questions. Mais à vrai dire, il n'y en a qu'une, qui est la question vitale, pour qui veut mériter le nom d'homme, c'est celle de la croyance. Comment et à quel prix la foi se conquiert-elle ? Pourquoi telle âme reste-t-elle en détresse aux abords de la lumière, quand cette autre, contre vents et marée, prend possession du port? Pourquoi, chez ceux qui entrent, une si grande différence d'allure, ceux-ci, toutes voiles dehors, à vive pression, pour ainsi dire, et à droit fil de l'eau, ceux-là, au contraire, avec plus de timidité et de lenteur, et comme en louvoyant? Voilà des questions que nous nous posons tous les jours, et qui ne sont pas seulement curieuses et spéculatives, car elles intéressent la psychologie de l'homme et, bien plus, elles engagent sa moralité.

Ces hautes questions, le livre de M. Brémond les résout, il les résout ou en avance singulièrement la solution. Nous quittons sa lecture, plus renseignés sur les autres et sur nous-mêmes, plus attentifs aux conditions et au mode d'opérer de la foi, plus avertis sur les moyens à mettre en œuvre pour nous en faire, au besoin, les diligents, discrets et utiles auxiliaires. C'est donc, en vérité, un ouvrage de haute portée que ce livre qui ne compte guère plus de trois cents pages; c'est un des plus bienfaisants que l'on puisse lire.

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La merveille, c'est qu'il soit si plein de pensées, si propre à en exciter en nous et je dis des plus profondes sans être jamais abstrait, ni aride. Partout, la plus exacte doctrine; rien, nulle part, qui sente le système ou aucun parti pris de penser séparément; rien aussi, dans la forme d'exposition, qui ait une allure scolastique et doctrinale, et qui rappelle le traité ou l'école. L'auteur ne procède pas par théorie. Il se contente d'observer la vie. Il l'évoque devant nous, ce qui est la meilleure façon de la définir. Il possède un rare don de peindre et d'animer. Qu'il nous représente (d'après A. Chevrillon) la joviale figure, bien nourrie et haute en couleur de Sydney Smith, ou celle de l'austère Pusey au sourire rare et un peu compassé, ou le grand Newmann, génie profond, âme fine, vibrante et délicate, ou encore Wiseman et Manning, nous les voyons, nous les connaissons vraiment, comme pour les avoir fréquentés, tant la plume qui les retrace est souple, déliée, experte aux nuances de la vie et savante à marquer, d'un contour ferme, sans jamais trop appuyer, le trait caractéristique et la nuance fine qui décide de la ressemblance. Nous les voyons vivre, et, dès lors, nous les comprenons. Le tempérament épais et matériel de Smith; l'intelligence forte, mais raide et rectiligne, étrangère à l'inquiétude et à l'humilité, de Pusey; la sensibilité toute tendre et frémissante, surtout la conscience infiniment délicate de Newmann voilà quelques traits de nature choisis parmi ceux que nous offre l'auteur, propres à nous faire bien comprendre le christianisme bourgeois du premier, et cette opiniâtreté qui immobilisera le second dans sa stalle de Christchurch, et le sûr et puissant élan qui finira par soulever Newmann jusqu'aux sublimités de la foi catholique.

A ces belles et attachantes études sur les grands chrétiens anglais du XIXe siècle, l'auteur en a joint quelques autres : un chapitre sur La logique du cœur, où il explique, avec une grande finesse de dialectique et un sens pénétrant, en quel sens M. Brunetière a pu parler de « l'irrationnel » de la foi; un autre sur L'idéal et la réalité dans la vie catholique (à propos du roman de Me Ward, One poor scruple), qui, je dois le déclarer à l'auteur, a paru à plus d'un la perle de son recueil; un chapitre final, Christus vivit, qu'il y a de bonnes raisons de mentionner ici puisqu'il fut écrit à propos du livre Un siècle auquel plusieurs de nos collègues ont collaboré. Ces dernières études ajoutent à l'intérêt du livre; elles n'en compromettent pas l'unité. D'un bout à l'autre de l'ouvrage, la « psychologie de la conversion »> (comme dit quelque part l'auteur) est l'objet constant de la pensée, le problème heureusement poursuivi et fécond en solutions lumineuses. En finissant, M. Brémond appelle de ses vœux le vrai

savant qui entreprendrait l'étude expérimentale de la vie du Christ. dans les âmes. « Imagine-t-on, dit-il, l'œuvre admirable qu'écrirait sur un tel sujet un Sainte-Beuve chrétien? » Oui, on se l'imagine. Mais, de plus, on le souhaite, on l'attend, ce « Sainte-Beuve chrétien ». Et, pour moi, je l'avoue, en plus d'un endroit de ce livre, j'ai cru le

rencontrer.

G. LE BIDOIS.

9. Les Études du clergé, par J. Hogan, prêtre de Saint-Sulpice, supérieur du séminaire de Boston. Traduit de l'anglais par l'abbé A. Boudinhon, professeur à l'Institut catholique de Paris. Introduction par Mgr l'archevêque d'Albi. Un vol. in-8° de 571 pages. Rome, Pustet; Paris, Lethielleux.

C'est avec une surprise attristée que les amis et les élèves de M. Hogan apprirent, en 1884, le départ de l'éminent professeur pour l'Amérique, où, comme l'a dit Mgr l'archevêque d'Albi, il allait

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prêter son expérience et l'autorité de son nom aux évêques dans l'oeuvre aussi importante que difficile de la fondation de séminaires nouveaux aux États-Unis ». Et aussi, avec quelle joie apprîmes-nous naguère que le supérieur du séminaire de Boston revenait définitivement à Paris; et comme nous nous promettions, dirai-je, de réparer le temps perdu, et de reprendre avec M. Hogan des entretiens interrompus depuis dix-sept ans! M. Hogan revit la France, il se réinstalla dans ce séminaire de Saint-Sulpice tout plein des souvenirs de sa laborieuse et féconde maturité; mais il ne revit la France et le séminaire de Saint-Sulpice que pour y mourir.

M. Hogan était de ceux qui ne meurent pas tout entiers. Il vit dans la mémoire fidèle de ceux qui l'ont connu, auxquels, comme en se jouant, il ouvrait des horizons jusqu'alors inconnus; il vit dans l'œuvre que des mains pieuses ont recueillie, et que nous sommes heureux d'annoncer. « M. Hogan, dit encore Mgr Mignot, n'a pensé à écrire que lorsqu'il a cessé d'enseigner. Dans un milieu nouveau, où tant de choses étaient à créer, il était naturel que M. Hogan utilisât les résultats de sa longue pratique des sciences sacrées et de la direction des âmes sacerdotales puisée à sa meilleure source dans le plus célèbre des séminaires français... De là une série d'articles parus d'abord dans l'American Ecclesiastical Review, puis publiés sous le titre de Clerical Studies. » Traduit par la plume habile de M. l'abbé Boudinhon avec une aisance qui nous ferait presque croire que nous lisons un original, le livre de M. Hogan «< se trouve être (c'est toujours l'archevêque d'Albi qui parle) le programme le plus complet et le plus judicieux des études ecclésiastiques,

ou mieux encore l'exposition la plus précise, la plus loyale de l'esprit dans lequel elles doivent être faites à notre époque ».

Le chapitre consacré à la théologie morale révélerait, s'il en était besoin, l'observateur sagace, le délicat psychologue, le prêtre qui juge les hommes comme il les dirigeait, avec une intelligence éclairée et avivée par le cœur, mente cordis sui. Dans d'autres chapitres, dans ceux qui traitent de la théologie dogmatique et de la Bible, M. Hogan pose des questions dont quelques-uns s'étonneront, s'alarmeront peut-être; ils auraient tort. Outre que de telles questions aujourd'hui s'agitent un peu partout en rumeurs confuses ou en formules précises, et que l'auteur d'un livre sur les Études du clergé ne pouvait consentir à les ignorer, M. Hogan était trop Irlandais, trop Sulpicien, trop catholique enfin, pour tracer ses plus hardis. points d'interrogation d'une main qui ne fût pas discrète et docile à l'Église. L'avenir s'essaiera à résoudre tous ces problèmes, et l'autorité souveraine, quand elle le jugera bon, dira le dernier mot. Quant au ton de cet ouvrage, je le qualifierai d'un trait que j'emprunte à Mgr Duchesne. J'appliquerai à M. Hogan ce que l'illustre professeur disait un jour du cardinal Newman: « C'est un gentleman qui parle à des gentlemen. »

10.

A. LARGENT.

Premiers principes d'Économie politique, par H. Rubat du Mérac, professeur à la Faculté de droit de l'Institut catholique de Paris. Un petit vol. in-16. Lib. Bloud, Paris, 1902.

Ce n'est point chose facile que de mettre à la portée des lecteurs les mieux préparés à ce genre d'études les principes les plus essentiels de cette science si complexe qui s'appelle l'économie politique et pourtant c'est bien faire œuvre utile que d'en tenter la vulgarisation, à une époque où tout le monde prétend résoudre les problèmes qu'elle soulève sans se soucier d'apprendre quelles lois régissent les phénomènes qu'elle observe. Aussi ne pouvons-nous qu'applaudir à l'heureuse initiative de notre collègue M. du Mérac, qui, dans un petit traité aussi clair qu'élégamment écrit, a réussi à condenser en 80 pages tout ce qu'il est indispensable de connaître pour parler des questions économiques autrement qu'avec sa sensibilité. Là, au moins, on puisera cette idée si saine et pourtant si peu en faveur aujourd'hui, que l'État n'est pas tout en ce monde et que si son intervention peut se justifier là où se manifestent des défaillances, des lacunes ou des abus, il faut se garder, dans un excès de réaction contre l'individualisme égoïste, d'élargir outre mesure le cercle de ses attributions. On saura gré surtout à l'auteur d'avoir mis bien en relief l'importance de

REVUE DE L'INSTtitut catholique, 1902. No 3.

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l'homme dans l'ordre économique en le plaçant au premier rang des facteurs de la production. Assurément ce n'est point là une œuvre dogmatique et profonde qui ait la prétention de fournir à ceux qui savent un complément à ce qu'ils ont appris. Mais ceux qui ont oublié retrouveront aisément, dans ce résumé vraiment très substantiel, le fil directeur qui les ramènera sur la voie des principes essentiels qu'il n'est jamais inutile de se remettre en mémoire; et ceux qui aspirent à connaître, s'assimileront en peu de temps, grâce à ce petit manuel, tout ce qu'il faut savoir pour être autorisé à dire sans trop de forfanterie : « Je sais ce que c'est que l'économie politique!

11.

Le Christ-Jésus.

J. LEPELLETIer.

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Instructions d'apologétique, par M. Léon Désers, curé de Saint-Vincent de Paul. Un volume in-18 jésus, Paris, Poussielgue, 1901.

En rendant compte, l'an passé, des premières instructions d'apologétique de M. Désers, Dieu et l'homme, nous félicitions l'auteur de sa méthode à la fois pratique et efficace, et du bon choix des points de vue où il se place avec ses auditeurs. Dans son nouveau livre, M. le curé de Saint-Vincent de Paul reste fidèle à cette méthode. La

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première partie État de la question, pose nettement le problème capital: « Qu'est Jésus-Christ?' Est-ce un Dieu ? Est-ce un homme?» A cette question, l'auteur fait répondre d'abord les Strauss et les Renan; il n'a pas de peine à faire toucher du doigt la bizarrerie, la vanité de leurs réponses. Dans la seconde partie : Les Sources historiques de la vie du Christ, il met le lecteur sur la route droite et solide qui mène à la solution. Et, alors, quand il nous a approchés de Jésus, il nous met bien en face de Lui, nous fait considérer brièvement, mais attentivement sa physionomie intellectuelle et sa physionomie morale, nous fait entendre de cette bouche même la haute et calme affirmation de sa divinité, nous aide à discerner le son, l'accent divin de cette voix. Puis il analyse ses idées et sa doctrine, d'où le divin émane aussi et rayonne en tout sens. Enfin, il passe la revue des autres signes de divinité les miracles de l'annonce prophétique, ceux de la vie du Christ, de sa Résurrection, le miracle non moins saisissant et toujours perpétué de sa survivance dans le cœur de la portion la plus parfaite, la plus divine de l'humanité."

Nous n'insisterons pas davantage sur l'analyse et l'éloge de ce petit livre si nourri. Le jeune homme qui le possédera et le méditera

1. Le texte porte (p. 11): « Qui est Jésus-Christ? C'est évidemment une faute d'impression.

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