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semblée les égards qu'elle doit à l'empereur Napoléon ce n'est pas au moment où il est malheureux, que vous l'abandonnerez à la malveillance (1).

Je desire que vous vous occupiez sans délai de la nomination d'une commission que vous chargerez de négocier auprès des puissances alliées, afin que la commission puisse partir demain (2).

(1) Rien de plus juste sans doute, que ces égards envers Napoléon, qui a déserté si à propos son île d'Elbe pour faire le bonheur de la France. Quel dommage si ce bon Corse, revenu pour nous gouverner paternellement, et trompé dans ses espérances libérales, était abandonné à la malveillance!... La malveillance! quel mot heureux! il ne compromet personne.

(2) C'est ici sur-tout qu'on voit le renard

Cependant Paris a capitulé ; son plus mortel ennemi a disparu, laissant à jouer la fin de son rôle au plus habile de ses comédiens politiques: son ministre tient encore pour un moment les rênes de la France; mais leur propriétaire légitime est aux portes de sa capitale. Qui pourrait exprimer tout ce qu'éprouve ce serviteur infidèle? autour de lui l'allégresse est dans tous les cœurs; tous les voeux appellent le bon successeur

politique; il est à la tête du gouvernement; mais il ne veut rien prendre sous sa responsabilité. Il a deja tout arrangé, lorsqu'il témoigne le desir qu'on nomme une commission, absolument inutile, pour entreprendre des arrangemens. Du reste, si l'on n'avait à lui reprocher que ce trait machiavélique, nous n'aurions jamais songé à écrire sa vie.

d'Henri IV; Fouché seul ne peut partager la joie commune; il a toujours devant ses yeux une tête sacrée qui lui reproche le plus grand de tous les crimes, et remplit son âme de l'horrible image d'un avenir épouvantable.

Ce n'est pas qu'il soit tourmenté de remords; la Providence l'a reconnu trop coupable pour lui accorder cette consolation; mais une frayeur involontaire le glace; autant il avait tressailli d'allégresse au retour de l'usurpateur, autant il est abattu à l'approche du juge formidable qui va le rapprocher de plus près de så personne, pour mieux sonder ses sentimens et sa conduite.

Dans cette perplexité, il ne lui reste qu'un moyen de dissiper ses craintes, celui d'intimider, d'effrayer

à son tour son juge même; c'est ce qu'il essaye, en écrivant à S. M. la lettre suivante, le 7 juillet, la veille de sa rentrée dans la capitale :

Ce n'est point Votre Majesté qui est redoutée; on a vu, ; on a vu, pendant un an, que la France s'est soutenue par la confiance dans votre modération et votre justice, au milieu des inquiétudes que lui inspirait un parti formé dans votre cour (1).

(1) Ce début est remarquable par l'audace des idées et la nudité des expressions. Fouché ne craint point Louis XVIII. ( Eh! quel Bourbon inspira jamais des motifs de crainte?) Il ne redoute que les vrais amis de ce prince, qui sont bien disposés à ne pas le laisser exposé au sort de son auguste frère. Quant aux inquiétudes qu'il attribue à la France, il n'en faut imputer la cause qu'aux hommes tels que lui, coalisés pour semer de fausses alarmes, et donner par-là un prétexte au rappel de Bonaparte.

« Tout le monde sait que ce n'est ni l'expérience, ni le savoir qui manquent à Votre Majesté ; vous connaissez la France et votre siècle ; vous connaissez la puissance de l'opinion; mais votre bonté vous a trop souvent disposé à prêter l'oreille aux vœux de ceux qui vous ont suivi dans l'adversité (1). Depuis ce mo

(1) Chaque mot est pesé dans ce paragraphe; on y voit tour-à-tour le professeur de 1788, le sans-culotte de 1793, et le courtisan de 1815. Cependant le représentant de 1793 y domine; il en appelle encore à la puissance de l'opinion, extrêmement formidable sans doute, lorsqu'elle est inspirée, dirigée, commandée par des hommes qui prêchent que tout est permis à quiconque agit dans le sens de la révolution ; voilà, suivant Fouché, les hommes que S. M. devrait écouter, et non pas ceux qui n'ont point marché dans le sens révolution naire.

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