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il parvint heureusement, à force de zèle et en employant tout le crédit qu'il avait déjà acquis sur l'esprit du peuple, à calmer une émeute des plus menaçantes et à prévenir l'effusion du sang. Le gouverneur de la province avait donné des ordres réitérés pour qu'on arrêtât Moreau, mais on tenta vainement de les exécuter. Il se montrait cependant tous les jours dans les rues et sur les places publiques, n'ayant souvent avec lui qu'une faible escorte de jeunes étudians; mais son courage imposait à la force ouverte, et son habileté lui fit éviter les embûches secrètes qui lui étaient dressées. Un de ses nombreux historiens affirme qu'il montra alors une fermeté de caractère et une loyauté qui ne se démentirent jamais. On serait heureux de pouvoir porter le même jugement sur toutes les époques de la vie d'un homme qui s'est illustré à la tête des armées françaises par tant de faits d'armes glorieux, par des talens militaires si éminens. En 1788, Moreau parut avoir, sous quelques rapports, changé de système; il seconda les mesures du gouvernement qui se trouvaient plus en harmonie avec ses propres opinions. Adoptant les espérances que la promesse d'une prompte convocation des états- généraux avait fait naître, quoique le mode en déplût aux anciens nobles et parlementaires de la Bretagne, le général du parlement commanda, dès le commencement de 1789, les réunions armées, qu'opposèrent les villes de Rennes et de Nantes à ce même parlement et aux états de Bretagne. Une confédération générale de la jeunesse bre

T. XIV.

tonne s'étant formée à Pontivy, en 1790, Moreau en fut nommé président; il devint aussi commandant du premier bataillon de volontaires qui s'organisa dans le département du Morbihan, et se rendit avec ce corps à l'armée du Nord. Dès ce moment, Moreau s'occupa avec ardeur de la théorie comme de la pratique de l'art militaire, et acquit ces hautes connaissances qui l'ont fait distingner parmi les meilleurs tacticiens de l'Europe. La nouvelle de la révolution du 10 août 1792 arriva à l'armée du Nord; le 13 du même mois, Moreau et son bataillon y donnèrent leur adhésion, et se prononcèrent avec enthousiasme en faveur de la république, lorsqu'elle fut décrétée le 22 septembre de la même année. Il parut s'être rallié franchement à ce système de gouvernement jusqu'à l'époque du 31 mai 1793; mais la chute du parti de la Gironde, dans lequel il comptait de nombreux amis, et les excès commis après cette désastreuse journée par le parti vainqueur, l'affectèrent vivement; il n'accepta qu'avec une extrême répugnance, qu'il ne cachait point à ses amis, la constitution de 1793, présentée à l'armée dans le mois de septembre; cependant son bataillon faisait chaque jour des prodiges sous ses ordres, et était cité dans tous les rapports comme un des plus braves et des mieux organisés de l'armée. Pichegru, général en chef de celle du Nord, contribua de tout son pouvoir à la fortune militaire de Moreau, qu'il résolut de s'attacher par les liens de la reconnaissance, et dès lors s'établit entre eux une

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liaison intime, qui cut depuis des suites funestes à tous deux. Sur les demandes instantes de son chef et de son ami, Moreau fut nommé général de brigade à la fin de 1793, et général de division le 14 avril 1794. Il eut aussitôt le commandement d'un corps séparé, destiné à agir dans la Flandre maritime, où il justifia la confiance du gouvernement par la conduite la plus brillante, s'empara de Menin, le 50 avril, après un blocus de quatre jours, et d'Ypres le 17 juin, après douze jours de tranchée ouverte. Le 29 du même mois, il prit Bruges, et dans le mois suivant, Ostende, Nieuport et l'île de Cassandria. Il attaqua ensuite le fort de l'Écluse, qui se rendit par capitulation le 26 août. Il est douloureux d'avoir à rappeJer qu'au moment où le fils faisait de si glorieuses conquêtes pour la république, la tête de son vénérable père, accusé de fédéralisme, tombait à Brest sous la hache de stupides et sanguinaires proscripteurs. Moreau continua cependant à servir la république, et prit une part glorieuse à cette mémorable campagne d'hiver de 1794, pendant laquelle il commanda l'aile droite de l'armée de Pichegru, qui, traversant des fleuves et des bras de mer sur la glace, soumit toute la Hollande. Ce fut aussi lui qui conçut un plan général de défense pour ce pays, plan qui fut adopté par le gouvernement français, et dont l'exécution fut confiée aux généraux Daendels et Dumonceau. Nommé au commandement en chef de l'armée du Rhin et de la Moselle, après la retraite de Pichegru, il ouvrit, en 1796, une campagne devenue non moins

fameuse, qui fonda sa réputation militaire, et le couvrit de gloire. Il força d'abord près de Franckenthal le camp du général Wurmser, qui fut obligé de chercher son salut sous les murs de Manheim. Dans la nuit du 23 au 24 juin, Moreau fit passer le Rhin à l'armée française, près de Strasbourg. Les troupes autrichiennes qui se trouvaient à Kehl furent forcées de fuir en désordre, et une partie tomba entre les mains du vainqueur. Il envoya ensuite le général Férino contre l'armée de Condé, qui se trouvait faiblement soutenue par quelques petits corps autrichiens, et qui fut dispersée. Lui-même marcha contre la grande armée autrichienne commandée par l'archiduc Charles, et après avoir, par d'habiles manoeuvres, forcé à la retraite toutes les troupes qui occupaient le Brisgau, il attaquale prince à Rastadt, le 6 juillet, et l'obligea après la plus opiniâtre résistance à se retirer sur Ettlingen, où il l'attaqua de nouveau le 9, et le battit complètement. L'archiduc gagna alors la forte position de Pfortzheim, où il se croyait inex. pugnable. Moreau parvint cependant à l'en déloger le 15, et dès ce moment il ne cessa de se porter en avant pour pénétrer dans le cœur de l'Allemagne. Les généraux des deux nations déployèrent dans toutes ces affaires, des talens remarquables, et les soldats le plus grand courage. Moreau avait trouvé tous ses généraux divisionnaires dignes de lui. Le brave Desaix, dont un trépas glorieux immortalisa depuis le nom à Marengo, commandait sous lui, et rendit les plus grands ser

il parvint heureusement, à force de zèle et en employant tout le crédit qu'il avait déjà acquis sur l'esprit du peuple, à calmer une émeute des plus menaçantes et à prévenir l'effusion du sang. Le gouverneur de la province avait donné des ordres réitérés pour qu'on arrêtât Moreau, mais on tenta vainement de les exécuter. Il se montrait cependant tous les jours dans les rues et sur les places publiques, n'ayant souvent avec lui qu'une faible escorte de jeunes étudians; mais son courage imposait à la force ouverte, et son habileté lui fit éviter les embûches secrètes qui lui étaient dressées. Un de ses nombreux historiens affirme qu'il montra alors une fermeté de caractère et une loyauté qui ne se démentirent jamais. On serait heureux de pouvoir porter le même jugement sur toutes les époques de la vie d'un homme qui s'est illustré à la tête des armées françaises par tant de faits d'armes glorieux, par des talens militaires si éminens. En 1788, Moreau parut avoir, sous quelques rapports, changé de système; il seconda les mesures du gouvernement qui se trouvaient plus en harmonie avec ses propres opinions. Adoptant les espérances que la promesse d'une prompte convocation des états-généraux avait fait naître, quoique le mode en déplût aux anciens nobles et parlementaires de la Bretagne, le général du parlement commanda, dès le commencement de 1789, les réunions armées, qu'opposérent les villes de Rennes et de Nantes à ce même parlement et aux états de Bretagne. Une confédération générale de la jeunesse bre

T. XIV.

tonne s'étant formée à Pontivy, en 1790, Moreau en fut nommé président; il devint aussi commandant du preinier bataillon de volontaires qui s'organisa dans le département du Morbihan, et se rendit avec ce corps à l'armée du Nord. Dès ce moment, Moreau s'occupa avec ardeur de la théorie comme de la pratique de l'art militaire, et acquit ces hautes connaissances qui l'ont fait distingner parmi les meilleurs tacticiens de l'Europe. La nouvelle de la révolution du 10 août 1792 arriva à l'armée du Nord; le 13 du même mois, Moreau et son bataillon y donnèrent leur adhésion, et se prononcèrent avec enthousiasme en faveur de la république, lorsqu'elle fut décrétée le 22 septembre de la même année. Il parut s'être rallié franchement à ce système de gouvernement jusqu'à l'époque du 31 mai 1793; mais la chute du parti de la Gironde, dans lequel il comptait de nombreux amis, et les excès commis après cette désastreuse journée par le parti vainqueur, l'affectèrent vivement; il n'accepta qu'avec une extrême répugnance, qu'il ne cachait point à ses amis, la constitution de 1793, présentée à l'armée dans le mois de septembre; cependant son bataillon faisait chaque jour des prodiges sous ses ordres, et était cité dans tous les rapports comme un des plus braves et des mieux organisés de l'armée. Pichegru, général en chef de celle du Nord, contribua de tout son pouvoir à la fortune militaire de Moreau, qu'il résolut de s'attacher par les liens de la reconnaissance, et dès lors s'établit entre eux une

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liaison intime, qui eut depuis des suites funestes à tous deux. Sur les demandes instantes de son chef et de son ami, Moreau fut nommé général de brigade à la fin de 1793, et général de division le 14 avril 1794. Il eut aussitôt le commandement d'un corps séparé, destiné à agir dans la Flandre maritime, où il justifia la confiance du gouvernement par la conduite la plus brillante, s'empara de Menin, le 50 avril, après un blocus de quatre jours, et d'Ypres le 17 juin, après douze jours de tranchée ouverte. Le 29 du même mois, il prit Bruges, et dans le mois suivant, Ostende, Nieuport et l'île de Cassandria. Il attaqua ensuite le fort de l'Ecluse, qui se rendit par capitulation le 26 août. Il est douloureux d'avoir à rappeler qu'au moment où le fils faisait de si glorieuses conquêtes pour la république, la tête de son vénérable père, accusé de fédéralisme, tombait à Brest sous la hache de stupides et sanguinaires proscripteurs. Moreau continua cependant à servir la république, et prit une part glorieuse à cette mémorable campagne d'hiver de 1794, pendant laquelle il commanda l'aile droite de l'armée de Pichegru, qui, traversant des fleuves et des bras de mer sur la glace, soumit toute la Hollande. Ce fut aussi lui qui conçut un plan général de défense pour ce pays, plan qui fut adopté par le gouvernement français, et dont l'exécution fut confiée aux généraux Daendels et Dumonceau. Nominé au commandement en chef de l'armée du Rhin et de la Moselle, après la retraite de. Pichegru, il ouvrit, en 1796, une campagne devenue non moins

fameuse, qui fonda sa réputation militaire, et le couvrit de gloire. Il força d'abord près de Franckenthal le camp du général Wurmser, qui fut obligé de chercher son salut sous les murs de Manheim. Dans la nuit du 23 au 24 juin, Moreau fit passer le Rhin à l'armée française, près de Strasbourg. Les troupes autrichiennes qui se trouvaient à Kehl furent forcées de fuir en désordre, et une partie tomba entre les mains du vainqueur. Il envoya ensuite le général Férino contre l'armée de Condé, qui se trouvait faiblement soutenue par quelques petits corps autrichiens, et qui fut dispersée. Lui-même marcha contre la grande armée autrichienHe commandée par l'archiduc Charles, et après avoir, par d'habiles manœuvres, forcé à la retraite toutes les troupes qui occupaient le Brisgau, il attaqua le prince à Rastadt, le 6 juillet, et l'obligea après la plus opiniâtre résistance à se retirer sur Ettlingen, où il l'attaqua de nouveau le 9, et le battit complètement. L'archiduc gagna alors la forte position de Pfortzheim, où il se croyait inexpugnable. Moreau parvint cependant à l'en déloger le 15, et dès ce moment il ne cessa de se porter en avant pour pénétrer dans le cœur de l'Allemagne. Les généraux des deux nations déployèrent dans toutes ces affaires, des talens remarquables, et les soldats le plus grand courage. Moreau avait trouvé tous ses géné– raux divisionnaires dignes de lui. Le brave Desaix, dont un trépas glorieux immortalisa depuis le nom à Marengo, commandait sous lui, et rendit les plus grands ser

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