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voici le moment de nous rallier autour du vieux étendard tricolore, celui de 89, celui de la liberté, de l'égalité et de l'ordre public; c'est celui-là seul que nous avons à défendre contre les prétentions étrangères et contre les tentatives intérieures. >>

Ces dernières paroles faisaient allusion à un bruit qui courait depuis le matin. On disait que Napoléon, pour simplifier sa situation et sauver matériellement la patrie, préparait contre l'Assemblée un nouveau brumaire. Les résolutions que propose Lafayette sont destinées à prévenir ces dangers intérieurs et extérieurs.

« ART. 1. La chambre des Représentants déclare que l'indépendance de la nation est menacée.

«< 2° La Chambre se déclare en permanence. Toute tentative pour la dissoudre est un crime de haute trahison. Quiconque se rendrait coupable de cette tentative sera traître à la patrie, et sur-le-champ jugé comme tel.

« 3° L'armée de ligne et les gardes nationales qui ont combattu et combattent encore pour défendre la liberté, l'indépendance et le territoire de la France, ont bien mérité de la patrie.

«< 4" Le ministre de l'intérieur est invité à réunir l'état-major général, les commandants et majors supérieurs de la garde nationale parisienne, afin d'aviser aux moyens de donner des armes et de porter au plus grand complet cette garde citoyenne, dont le patriotisme et le zèle éprouvés depuis vingt-six ans offrent une sûre garantie à la liberté, aux propriétés, à la tranquillité de la capitale et à l'inviolabilité des représentants de la nation.

«< 5° Les ministres à portefeuille, c'est-à-dire ceux qui peuvent avoir des communications importantes à donner à la Chambre, et pour plus de précision, les ministres de la guerre, des relations extérieures, de la police et de l'intérieur, sont invités à se rendre sur-le-champ dans le sein de l'Assemblée. »

Ces résolutions sont adoptées, à l'exception de la quatrième,

ajournée jusqu'après l'audition des ministres. Un message est envoyé à la chambre des Pairs et à l'Élysée, porteur du décret de l'Assemblée. Dans l'intervalle arrive une communication de l'empereur, qui annonce son retour dans la capitale, cherche à pallier le désastre de Mont-Saint-Jean, et termine en disant qu'il est venu à Paris « pour conférer avec les ministres sur les moyens de rétablir le matériel de l'armée, et pour se concerter aussi avec les Chambres sur les mesures législatives qu'exigent les circonstances. >>

Solennels et pleins de gravité, les événements demandaient une grande énergie. Les deux pouvoirs législatif et exécutif se trouvaient en présence, c'est-à-dire la liberté et le despotisme, chacun épiant la conduite de l'autre, et prêt à profiter de la moindre faute de son adversaire pour l'absorber et l'anéantir. Quand l'ennemi était à nos portes, quand toutes les forces régulières du pays venaient d'être si violemment rompues par la catastrophe du 18 juin; lorsque les forces populaires, si puissantes dans leur irrégularité, pouvaient seules désormais sauver la patrie les rouages compliqués de la pondération des pouvoirs et de la royauté constitutionnelle devenaient un embarras fatal. Mais la dictature serait-elle exercée par Napoléon ou par les représentants de la nation; par les ministres, instruments do ciles d'un maître, ou par un comité de salut public, bras intelligent et rapide de la souveraineté du peuple?

Les ministres n'ont point encore accédé à l'invitation. Un second message plus pressant leur est transmis. Enfin Carnot, Caulincourt, Fouché et Davoust écrivent au président qu'ils vont se rendre au sein de l'Assemblée. Quelques instants après, Lucien Bonaparte et les ministres sont introduits. Lucien a été nommé par l'empereur commissaire extraordinaire; sa mission est de se concerter avec l'Assemblée sur des mesures de prudence. Il demande le comité secret. Les tribunes sont évacuées; le voile des fictions officielles va se déchirer.

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