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<< Sire, organes de la plupart des HONNÊTES GENS de Troyes, nous venons mettre aux genoux de Votre Majesté Impériale l'hommage de notre humble respect, et la supplier d'agréer le vœu que nous faisons tous pour le rétablissement de la maison. royale de Bourbon sur le trône de France. >>

A une demande aussi nette, il fallait une réponse sans ambages. Alexandre déclara que les alliés n'étaient point venus en France pour imposer aux Français un gouvernement, mais pour abattre un ennemi commun de la paix intérieure et extérieure « Nous voulons seulement connaître les intentions de << la France; c'est à elle à se déclarer, » dit en terminant l'empereur de Russie.

L'on se rappelle ce que nous avons dit de la tactique des alliés, qui refusaient de prendre à l'avance aucun engagement avec les partisans de la dynastie des Bourbons, afin que celle-ci, dans le cas d'une restauration, subît les conditions les plus onéreuses et les charges les plus lourdes. Cette tactique était spéciale à l'Angleterre, et l'ambassadeur britannique, tenant entre ses mains tous les fils du congrès de Châtillon, dirigeait la politique des souverains suivant les intérêts de son propre cabinet.

Les royalistes de Troyes comprirent la réponse d'Alexandre; ils se hâtèrent d'expédier un des leurs au comte d'Artois, pour lui porter copie de leur adresse, et l'engager à provoquer par ses agents des manifestations semblables. Le comte d'Artois se trouvait alors sur le territoire français, à Vesoul, d'où il lança quelques jours plus tard une proclamation.

Cette petite intrigue devait aboutir à une sanglante péripétie. Considérée en elle-même, elle était pourtant sans aucune espèce de valeur, et procédait de la folie seule de certains chevaliers de Saint-Louis, qui ne voyaient pas de nation hors du cercle étroit de leurs préjugés et de leurs relations de 1788. Les comités royalistes de Bordeaux, de Troyes et même celui

de Paris n'eussent en rien influencé les événements, sans un précieux concours qui leur arriva des régions officielles. Un homme vint à eux, qui admis dans les conseils intimes de la politique impériale, grand dignitaire, hautement considéré par les puissances étrangères, découvrit le germe d'une immense réaction dans l'œuf microscopique de la légitimité; ce fut lui qui couva lentement cet œuf, pour une éventualité dont il avait le secret. Nous voulons parler du comte de Bénévent, de l'ex-évêque constitutionnel dont Napoléon avait fait tour à tour son ministre des affaires extérieures, son plénipotentiaire, son confident intime, son vice-grand-électeur, et dont il s'était instinctivement éloigné en dernier lieu, le tenant avec raison pour suspect. M. de Talleyrand, prévoyant en 1814 la chute prochaine de l'empire, faisait comme tant d'autres : il se préparait à sauver sa fortune politique du cataclysme; mais avec cette adresse, avec cette habileté, cette supériorité de vue, cette logique des déductions, dont il devait donner tant de preuves dans sa longue carrière diplomatique. Ici, pour l'entente des faits qui vont se dérouler, nous rechercherons avec soin les nuances de la situation où le comte de Bénévent se trouvait; elles nous révéleront le secret de sa politique pleine d'ambiguités et d'énigmes.

M. de Talleyrand en 1799 avait puissamment contribué à l'élévation du général Bonaparte; il fut l'un des principaux coopérateurs, pour ne pas dire le plus actif, des fameuses journées des 18 et 19 brumaire. C'était un des complices de l'attentat contre les droi' du peuple, dont Napoléon désormais devait subir le joug et les intrigues sans oser s'en séparer définitivement. Fouché était aussi de ces complices. Le prince de Bénévent et le duc d'Otrante furent deux boulets de plomb pour l'empereur. D'abord fort dévoué au nouveau système qu'il voulait pousser jusqu'à ses plus extrêmes limites, c'est-à-dire jusqu'à l'empire et au pouvoir absolu, Talleyrand servit Napoléon

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