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Grammont qu'il voulait la liberté des princes, mais qu'il ne la voulait que par la Cour, parce qu'il n'y avait qu'elle qui pût la donner sans guerre civile; et qu'il avait découvert que les frondeurs ne la voulaient pas dans le fond. Les amis de M. le Prince firent voir au premier président, que comme nous les voulions tromper en nous servant d'eux pour pousser Mazarin, sous prétexte de servir M. le Prince, ils se voulaient servir de nous pour donner la liberté à M. le Prince, sous prétexte de pousser Mazarin. Je donnais par mes manières toutes les apparences possibles à ces discours et à ces soupçons, et cette conduite fit tous les effets que nous voulions : elle échauffa pour le service des princes le premier président, et tous ceux du corps qui avaient de la disposition contre la Fronde; elle empêcha que le cardinal ne se précipitât dans quelque résolution qui ne nous plût pas, parce qu'elle lui donna lieu d'espérer qu'il détruirait les deux partis l'un par l'autre; et elle couvrit si bien notre marche, que l'on ne faisait pas seulement réflexion sur les avis qui venaient de toutes parts à la Cour contre nous. On y croyait savoir le dessous des cartes. Le premier président ne pouvait quelquefois s'empêcher de dire à sa place de certaines paroles équivoques, qu'il croyait que nous n'entendions pas, et qui nous avaient été expliquées la veille chez la Palatine. Nous nous y réjouissions du maréchal de Grammont, qui disait que les frondeurs seraient bientôt pris pour dupes. Enfin, il y eut sur ce détail mille farces dignes du ridicule de Molière. Revenons au Parlement.

La Saint-Martin de l'année 1650 arriva. Le premier président et l'avocat général Talon exhortèrent la compagnie à demeurer tranquille, pour ne point donner avantage aux ennemis de l'Etat.

Deslandes-Payen, conseiller de la grande chambre, dit qu'il avait été chargé la veille, à neuf heures du soir, d'une requête de madame la Princesse. On la lut. Elle concluait à ce que les princes fussent amenés au Louvre; qu'ils y fussent gardés par un officier de la maison du roi; que le procureur général fût mandé pour déclarer s'il avait quelque chose à proposer contre leur innocence; et que faute de ce faire, il fût incessamment pourvu à leur liberté.

Ce qui fut assez plaisant à l'égard de cette requèle, est qu'elle fut concertée l'avant-veille chez madame la Palatine, entre Croissi, Viole et moi, et qu'elle fut minutée la veille chez le premier président, qui disait aux deux autres « Voilà servir les princes dans les formes et en gens de bien, et non pas comme des factieux. »> On mit le soir même sur la requête le soit montré; ce qui était de la forme. Elle fut renvoyée au parquet l'on prit jour pour délibérer, au mercredi d'après, qui était le 7 décembre 1650.

Ce jour-là les chambres étant assemblées, Talon, avocat général, qui avait été mandé pour prendre ses conclusions sur la requête, dit que la veille la reine avait mandé les gens du roi, pour leur ordonner de faire entendre à la compagnie que son intention était que le Parlement ne prit aucune connaissance de la requête présentée par madame la Princesse, parce que tout ce qui regardait la prison des princes n'appartenait qu'à l'autorité royale. Les conclusions de Talon, au nom du procureur général, furent que le Parlement renvoyât par une députation la requète à la reine, et la suppliat d'y avoir quelque égard. Talon n'eut pas achevé de parler, que Crespin, doyen de la grande chambre, rapporta une autre requête de mademoiselle de Longueville, par laquelle elle demandait la liberté de monsieur son père, et la permission de demeurer à Paris pour la solliciter.

Aussitôt que la requête eut été lue, les huissiers vinrent avertir que Desroches, capitaine des gardes de M. le Prince, était à la porte, qui demandait à la compagnie qu'il lui plût de le faire entrer pour lui présenter une lettre des trois princes. On lui donna audience. Il dit qu'un cavalier des troupes qui avaient conduit M. le Prince au Havrede-Grâce, lui avait apporté cette lettre. Elle fut lue. On y demandait qu'on leur fit leur procès, ou qu'on leur donnât la liberté.

Le vendredi 9, le Parlement s'étant assemblé pour délibérer, Saintôt, lieutenant des cérémonies, apporta à la compagnie une lettre de cachet, par laquelle le roi ordonnait de surseoir toutes les délibérations, jusqu'à ce qu'on eût député vers lui pour apprendre ses volontés.

MÉMOIRES.

Tome I.

15

On députa dès l'après-dinée. La reine reçut les députés dans le lit, où elle leur dit qu'elle se portait fort mal. Le garde-des-sceaux ajouta que l'intention du roi était que le Parlement ne s'assemblat pour quelque affaire que ce pût être, avant que la santé de la reine sa mère ne fût un peu rétablie, afin qu'elle pût elle-même travailler avec plus d'application à tout ce qui serait de leur satisfaction.

Le 10, le Parlement résolut de ne donner de délai que jusqu'au 14; et ce fut ce jour-là que Crespin, doyen du Parlement, ne sachant quel avis prendre, porta celui de demander à M. l'archevêque une procession générale, pour demander à Dieu la grâce de n'en point prendre que de bons.

Le 14, on eut une lettre de cachet pour empêcher qu'on ne délibérât. Elle portait que la reine donnerait satisfaction au plus tôt sur l'affaire de MM. les princes. On n'eut aucun égard à cette lettre de cachet. Le Nain, conseiller de la grande chambre, fut d'avis d'inviter M. le duc d'Orléans de venir prendre sa place, et la chose passa au plus de voix. Vous jugez, par tout ce que vous avez vu ci-devant, qu'il n'était pas encore temps que Monsieur parût. Il répondit aux députés qu'il ne se trouverait point à l'assemblée; qu'on y faisait trop de bruit; que ce n'était plus qu'une cohue; qu'il ne concevait pas ce que le Parlement prétendait; qu'il était inouï qu'il eût pris connaissance de semblables affaires; qu'il n'y avait qu'à renvoyer les requêtes à la reine. Remarquez que cette réponse, qui avait été résolue chez la Palatine, parut par l'adresse de Monsieur lui avoir été inspirée par la Cour. Il ne répondit à Doujat et à Menardeau (1), qui lui avaient été députés, qu'après en avoir conféré avec la reine, à qui il tourna son absence du Parlement d'une manière si délicate, qu'il se la fit demander. Ce qu'il dit aux députés acheva de confirmer la Cour dans l'opinion que le maréchal de Grammont voyait clair dans ses véritables intentions; et le premier président en fut encore plus persuadé, que les frondeurs demeuraient les dupes de l'intrigue. Comme il ne l'était pas lui-même du Mazarin, à beaucoup près tant que le maréchal de Grammont, il n'était pas fâché que le Parle

(1) Gratien Menardeau, conseiller au Parlement de Paris.

ment lui donnât des coups d'éperons; et quoiqu'il fit toujours semblant de les rabattre de temps en temps, il n'était pas difficile à connaître, quelquefois par lui-même et toujours par ceux qui dépendaient de lui dans la compagnie, qu'il voulait la liberté des princes, quoiqu'il ne la voulût pas par la guerre.

Le 15, on continua la délibération.

Le 17, de même, avec cette différence que DeslandesPayen, rapporteur de la requète de MM. les princes, ayant été interrogé par le premier président s'il n'avait rien à ajouter à son avis, qu'il avait porté dès le 14, et répété dès le 15, y ajouta que, si la compagnie jugeait à propos de joindre aux remontrances qu'il ferait de vive voix et par écrit, pour la liberté des princes, une plainte en forme contre la conduite du cardinal Mazarin, il ne s'en éloignerait pas. Broussel opina encore plus fortement contre lui. Je ne sais pas la raison pour laquelle le premier président s'attira, même contre les formes, cette répétition d'avis du rapporteur; mais je sais bien qu'on ne lui en voulut pas de mal au Palais-Royal, et d'autant plus que le cardinal fut nommé dans cette répétition.

Le 18, la nouvelle arriva que le maréchal du Plessis avait gagné une grande bataille contre M. de Turenne; que le dernier, qui venait au secours de Réthel, et qui l'avait trouvé déjà rendu au maréchal du Plessis par Delliponti, qui y commandait la garnison espagnole, s'étant voulu retirer, avait été forcé de combattre dans la plaine de Sommepuis; qu'il s'était sauvé à toute peine lui cinquième, après y avoir fait des merveilles; qu'il y avait eu plus de deux mille hommes tués sur la place, du nombre desquels était un des frères de l'électeur Palatin, et six colonels, et près de quatre mille prisonniers, entre lesquels était Don Estevan de Gamarre, la seconde personne de l'armée; Bouteville, qui est aujourd'hui M. de Luxembourg; le comte de Bossu, le comte de Quintin-Haucourt, Sensy, le chevalier de Jersai, et tous les colonels. On ajoutait que l'on avait pris vingt drapeaux et quatre-vingtquatre étendards. Vous ne doutez pas de la consternation du parti des princes. Je n'eus toute la nuit chez moi que des pleurs et des désespérés. Je trouvai Monsieur atterré.

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