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s'avance au-devant de lui, et arrive le 12 à Burgos sans l'avoir rencontré. Apprenant que Napoléon n'avait pas quitté Bayonne, il lui écrit aussitôt; et, trois jours après, il reçoit une réponse qui aurait dù le dissuader d'aller plus avant (1). Mais, cédant aux instances du général Savary qui l'accompagnait, il se laisse entraîner jusqu'à Bayonne. Godoy, tiré de sa prison par Murat, arrive aussi dans cette ville, et, bientôt après, le vieux roi et la famille royale. Charles IV était furieux contre son fils, qu'il accusait de l'avoir précipité du trône. Il fut reçu par l'Empereur comme roi légitime; mais, se trouvant assez heureux de retrouver son ami Godoy et voulant vivre tranquille, il signa, le 5 mai, un traité de renonciation à sa couronne en faveur de Napoléon. Il reçut en échange le château de Chambord et la jouissance de celui de Compiègne, avec une liste civile de trente millions de réaux. Ferdinand, traité de rebelle par son père, avili par sa mère, et n'ayant plus d'espoir de se faire reconnaître, résigna aussi ses droits à la couronne. Les autres membres de la famille royale adhérèrent successivement à l'acte de renonciation. Napoléon sanctionna cet acte, convoqua une assemblée de notables pour discuter

(1) Voir pièces justificatives, no 10.

les bases d'une constitution, et désigna son frère Joseph Bonaparte comme roi d'Espagne.

Bien que les Espagnols ignorassent ces nouveaux événements, déjà ils étaient indignés de la conduite des Français: le voyage de Ferdinand, la délivrance de Godoy, la fuite de Charles, la nomination de Murat comme membre de la junte du gouvernement, et les mouvements des troupes françaises qui s'avançaient de toutes parts sur Madrid, excitaient les plus vives alarmes; une fermentation générale agitait les esprits.

Le 2 mai, le mécontentement fit explosion à Madrid. Au moment où la reine d'Étrurie, fille du roi Charles IV, et l'infant D. François de Paule, second frère de Ferdinand, se disposaient à partir pour rejoindre la famille royale en France, le peuple ne put contenir son indignation. Il entoura les voitures de voyage, insulta l'officier français commandant de l'escorte, et l'aurait massacré sans une patrouille qui vint à son secours. Le feu s'engagea de part et d'autre; et, dans un moment, toute la ville fut en insurrection. Murat, obligé de combattre, fit avancer au pas de charge, dans la ville, plusieurs corps de troupes qui dissipèrent tous les rassemblements. Dès le soir même l'ordre fut rétabli, mais non sans effusion de sang. Les troupes françaises perdirent peu de monde dans. le combat, mais un grand nombre de leurs offi

ciers furent assassinés isolément. Du côté des Espagnols il y eut cent vingt morts; une quarantaine d'individus, surpris les armes à la main, furent fusillés le lendemain, et à peu près le même nombre de prisonniers furent, par représailles, massacrés dans les camps par les soldats.

Ces exécutions comprimèrent pour quelque temps les efforts de la capitale; mais le contrecoup en fut ressenti dans toutes les parties de la monarchie; et lorsque parut la proclamation du 20 mai, qui annonçait formellement que Charles et Ferdinand avaient abdiqué en faveur de Napoléon (1), l'indignation générale n'eut plus de borne. Les chefs civils et militaires, et tous ceux qui avaient quelque chose à perdre, tremblaient encore à la seule idée de lutter contre le pouvoir colossal de la France; mais les moines et les prêtres préchèrent partout la révolte, et excitèrent le peuple. Un seul cri retentit alors dans toute l'Espagne: Vive Ferdinand VII! meurent les Français!

La principauté des Asturies se souleva la première, et fit les premières demandes de secours aux Anglais, qui commencèrent à prêter leur appui aux Espagnols. La Galice, la province de Santander, et une partie du royaume de Léon, ne tardèrent pas à suivre cet exemple. A Valence, trois

(1) Voir pièces justificatives, no 11.

cents Français qui se trouvaient dans la ville furent massacrés. A Cadix, le capitaine général Solano, envoyé par Murat pour commander la place, fut assassiné par la populace; et le' général Morla, ayant pris le commandement, fit tirer les batteries du port sur cinq vaisseaux français et une frégate, qui, échappés à la bataille de Trafalgar, s'étaient réfugiés dans la rade de Cadix. Le vice-amiral Rosily qui les commandait fut obligé de se rendre. A Séville, le peuple mit au pillage les maisons de tous ceux qui étaient désignés comme partisans de Godoy et des Français, et forma une junte centrale qui prit les rênes du gouvernement.

Des scènes de désordre à peu près semblables eurent lieu également à Saragosse, à Badajoz, à Valladolid. Dès le mois de juin, le soulèvement était général, partout on courait aux armes; de nouvelles levées renforcèrent les troupes de ligne; des armées s'organisèrent dans toutes les provinces, effrayant par leur indiscipline et leurs excès tous ceux que l'âge, les infirmités ou leur insouciance, retenaient encore dans leurs foyers. Ce fut à travers ce terrible incendie que Joseph Bonaparte, le nouveau roi, s'avança vers Madrid.

Les différents corps de l'armée française entrés en Espagne, depuis le 1er janvier 1808, présentaient une force de quatre-vingt mille hommes, mais composée de jeunes gens de dix-huit ans,

pris, par anticipation, dans la dernière conscription et réunis seulement depuis quelques mois; vus de trop près par les Espagnols, de tels hommes n'avaient pu leur inspirer une haute opinion des troupes françaises. Aux premiers symptômes du soulèvement, tous ces corps se mirent en marche pour en arrêter les progrès.

Le maréchal Bessières, qui gardait avec ses troupes la grande route de Burgos, détacha de Vitoria le général Verdier avec deux mille hommes contre une bande d'insurgés réunis à Logroño. Ce général avait l'ordre de marcher ensuite sur Saragosse, ville importante par sa population et par l'influence qu'elle pouvait avoir sur la grande route de France. D'un autre côté, le général LefebvreDesnouettes se porta directement de Pampelune sur cette ville avec quatre mille hommes, et commença les premières attaques pour la réduire (voyez la relation de ce siége, tome II). Sur un autre point, le général Frère s'empara de Ségovie, et y prit trente pièces de canon. Le général Lasalle battit les Espagnols à Torquemada, et entra à Palencia où se trouvait une grande manufacture d'armes. S'étant réuni ensuite au général Merle, il battit, à Cabezon, un corps espagnol sous les ordres du général Cuesta, capitaine général de la vieille Castille; Valladolid se soumit. Le maréchal Bessières, se voyant maître de la plaine, dirigea

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