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obstacles, il lui fallait, écrivait-il le 26 à Bonaparte, son ardent désir de répondre à la confiance que le général en chef lui avait témoignée.

Desaix, à Civita-Vecchia, était inquiet de n'avoir point encore reçu l'aviso qui devait lui apporter l'ordre de mettre à la voile, et l'attendait avec impatience. Il avait expédié un brick pour explorer la Méditerranée. Il n'avait rien appris sur l'apparition des Anglais. « S'il était au pouvoir de l'homme, écrivait-il à Bonaparte, 4 prairial (23 mai), de commander aux vents, croyez, mon général, que vous seriez bien vite à ma hauteur; car je suis dans la plus vive impatience de me réunir à vous, et surtout dans un pays où, sous vos auspices, nous pourrons tant ajouter aux triomphes et à la gloire de la république. »>

Une lettre que Sotin, ministre de la république française à Gênes, écrivit à Bonaparte, 5 prairial (24 mai), contenait un aperçu assez juste de la situation de l'Europe, qui aurait été capable d'alarmer an autre homme que le vainqueur de l'Italie. Elle était ainsi conçue :

« La République Ligurienne est en guerre avec le Piémont; la République Cisalpine s'apprête probablement à se mêler de la querelle. Nous nous prendrons le parti que notre gouvernement ordonnera. Il est sûr que le roi de Sardaigne s'est compromis envers nous, en ne répondant pas à une note que lui avait remise Ginguené, et en attaquant les Liguriens qui avaient bien quelques petits torts envers lui, mais pour la réparation desquels nous

offrions notre intervention à des conditions raisonnables.

Naples ne cesse pas ses armemens; la Toscane fait de même; les conférences de Rastadt traînent en longueur : celle de Seltz est si nouvelle et on sait si peu de quoi il s'y agit, qu'on ne peut prévoir la tournure qu'elle prendra, et cependant, vous, l'élite de l'armée d'Italie et des généraux, allez on ne sait où. Il est sûr que les Anglais vous suivent de très-près. Vous n'êtes pas, heureusement, facile à décourager, car si vous aviez la moitié des inquiétudes que vous nous inspirez, vous n'y résisteriez pas. »

Que faisait, pendant ce temps-là, le

ment anglais?

gouverne

Toujours persuadé que les armemens qui avaient lieu en Italie ne se faisaient que pour lui donner le change; que la flotte de Toulon passerait le détroit, opérerait sa jonction avec la flotte espagnole à Cadix; qu'elles arriveraient ensemble devant Brest, et conduiraient une armée en Angleterre et une autre en Irlande, il se contenta d'équiper en toute hâte une nouvelle escadre; et aussitôt qu'elle apprit que Bonaparte était parti de Toulon, l'amirauté anglaise expédia l'amiral Roger avec dix vaisseaux de guerre pour renforcer l'escadre anglaise devant Cadix, où commandait l'amiral lord Saint-Vincent, qui, par ce renfort, se trouva avoir 28 à 30 vaisseaux. Une autre escadre d'égale force était devant Brest.

L'amiral Saint-Vincent tenait, dans la Méditer

ranée, une escadre légère de 3 vaisseaux, qui croisait entre les côtes d'Espagne, de Provence et de Sardaigne, afin de recueillir des renseigneet surveiller cette mer.

Nelson commandait ces trois vaisseaux, lorsque, dans la nuit du 19 mai, il essuya un coup de vent qui les endommagea et démâta celui qu'il montait ; il fut obligé de se faire remorquer. Il voulait mouiller dans le golfe d'Oristan, en Sardaigne; mais il ne put y parvenir, et gagna la rade des îles Saint-Pierre, où il répara ses avaries. C'est dans cette même nuit que l'escadre française appareillait de Toulon.

La France allait-elle envahir une des provinces de la Porte, son ancienne alliée, sans son assentiment, ou du moins sans l'avoir rassurée sur le but de cette expédition? On a vu que Talleyrand avait mandé à Bonaparte, 2 vendémiaire (23 septembre 1797): «Un si grand service rendu aux Turcs les engagerait aisément à nous laisser en Égypte toute la prépondérance et tous les avantages commerciaux dont nous avons besoin. » Il paraît que, quelque hasardée qu'elle pût être, l'opinion de ce ministre fut partagée par le Directoire et par Bonaparte. Mais encore fallait-il prévenir les Turcs du grand service qu'on voulait leur rendre, s'assurer des dispositions qu'on leur supposait, et du moins, en même temps que l'expédition sortait des ports, envoyer un négociateur à Constantinople, où, depuis la mort d'Aubert Dubayet, la république n'avait point d'ambassadeur. Ce fut en effet un point convenu entre Bo

naparte et le Directoire. Cette mission exigeait de l'habileté; elle était de la plus haute importance; elle fut confiée à Talleyrand auquel on accordait de grands talens diplomatiques. Ce fut dans la confiance de voir les négociations seconder son entreprise que Bonaparte mit à la voile.

En attendant le départ de l'ambassadeur, pour imposer à la Porte, on envoya des agens et même un certain nombre d'officiers à Passwan-Oglou, qui avait, en Servie, levé l'étendard de la rébellion. Le général Chabot, commandant à Corfou, reçut l'ordre de s'aboucher avec Ali, pacha de Janina, et de sonder ses dispositions. Le moyen était-il bien choisi pour rendre la Porte favorable à l'expédition d'Égypte?

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Les journaux annoncèrent la nomination de Talleyrand à l'ambassade de Constantinople, et son remplacement au ministère par François de Neufchâteau, directeur sortant; mais il ne partit pas. Peu curieux de changer son ministère contre une ambassade qui pouvait le mener aux SeptTours, il s'en déchargea sur Descorches qui avait été déjà ministre plénipotentiaire près la Porte Ottomane'. L'on verra plus tard que cette ambassade fut différée et n'eut aucun résultat.

I

Moniteur, 4, 10 prairial, 17 fructidor an vi.

CHAPITRE II.

Navigation de la flotte.-Force de l'armée navale et de l'armée de terre.-Prise de Malte.—Organisation civile et militaire.— Mission de Lavalette auprès d'Ali-Pacha.-La flotte remet à la voile.-Mouvemens des Anglais dans la Méditerranée.

L'armée était partie de Toulon au bruit répété du canon des batteries et de tous les vaisseaux. Le temps était superbe et le vent favorable. L'escadre rangea les côtes de Provence jusque vers Gênes, et rallia le convoi parti de cette ville. Elle tourna ensuite vers le Cap Corse, y fut rejointe par le convoi d'Ajaccio. Elle attendit inutilement plusieurs jours celui de Civita-Vecchia. On a vu quelle importance Bonaparte attachait à cette partie de l'armement, ses instructions à Desaix, la route qu'il lui avait tracée. L'amiral Brueys expédia la frégate l'Arthémise à la recherche de ce convoi, et lassé d'attendre son retour, se dirigea sur l'île de Malte.

Pendant cette traversée, Bonaparte avait de fréquentes conférences avec les principaux officiers de l'état-major, les chefs de service et les savans attachés à l'expédition, dont une partie était à bord de l'Orient. Avant le départ de Toulon, une bibliothèque avait été formée par les soins d'Arnault, pour l'usage du général Bonaparte.

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