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habitans armés de fusils, et bordant le revêtement
de terrasse dont il était entouré; toutes les portes
étaient fermées. Voyant cette contenance hostile,
Fugières demanda à parler au cheyk et aux prin-
cipaux hahitans. On lui répondit qu'ils ne vou-
laient ni lui parler, ni le voir. Il les somma d'ou-
vrir leurs portes; ils refusèrent, disant qu'ils
étaient les maîtres chez eux, et qu'on n'y
'y entrerait
pas. Il les somma de mettre bas les armes cette
sommation ne fut pas mieux reçue. Il fit fermer
et garder par des pelotons de distance en distance
les issues du village, en attendant l'arrivée du
général Zayonschek, qu'il avait envoyé prévenir.
Pendant ce temps là, les habitans d'un village
contigu appelé Tétar, se réunirent à ceux de
Remerieh; on fit feu sur le bataillon de la 19.
Zayonschek arriva avec un renfort. Il conseilla à
Fugières de faire une fausse attaque, tandis que
lui tenterait l'assaut avec ses grenadiers.

Le chef de brigade Lefebvre se mit à leur tête fit enfoncer une des portes par les sapeurs et pénétra dans le village, mais il y trouva la plus vigoureuse résistance. Hommes et femmes, tous les habitans, armés de piques et de fusils, se battaient avec un acharnement qui tenait de la rage. De tous côtés, la troupe entra dans le village, et l'on se battit toujours avec la même fureur. Il fallut forcer partout les habitans, et les passer par les armies. Des femmes se jetaient à la gorge des soldats pour les étrangler; on fut forcé d'en tuer quelques-unes ; 4 à 500 habitans furent tués, le reste prit la fuite, on emmena 30 prisonniers.

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Il ne fallut pas moins que le nombre et la résolution des troupes pour les réduire. Les Français eurent un sapeur tué et une douzaine de blessés.

Fugières ayant épuisé toutes ses munitions, ne jugea pas prudent de s'engager dans un pays insoumis et très-peuplé ; il rétrograda sur Menouf, et écrivit au général en chef pour en obtenir de nouvelles munitions, un bataillon de renfort et deux pièces d'artillerie '.

Soupçonnant que le divan de Menouf et Geor gio, intendant cophte de la province, avaient suscité cette affaire, Zayonschek les distitua, les fit arrêter, les remplaça; et, douze heures après, n'ayant pas de preuves contre eux, les mit en liberté. Du reste, il était persuadé que tous les villages avaient à peu près le même esprit, et que, pour en être maître, il fallait pouvoir les désarmer, enlever leurs portes et abattre leurs murs d'enceinte ".

«Je n'ai pas vu avec plaisir, lui répondit Bonaparte, la manière dont vous vous êtes conduit envers le cophte: mon intention est qu'on ménage ces gens-là, et qu'on ait des égards pour eux. Articulez les sujets de plainte que vous avez contre lui, je le ferai remplacer. Je n'approuve pas non plus que vous ayez fait arrêter le divan sans avoir approfondi s'il était coupable ou non ; il a fallu le relâcher douze heures après ce n'est le moyen de se concilier un parti. Étudiez les

pas

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Lettre de Fugières à Bonaparte, du 26 thermidor. *Lettre de Zayonschek à Bonaparte, ibid.

peuples chez lesquels vous êtes; distinguez ceux qui sont le plus susceptibles d'être employés; faites quelquefois des exemples justes et sévères, mais jamais rien qui approche du caprice et de la légèreté. Je sens que votre position est souvent embarrassante, et je suis plein de confiance dans votre bonne volonté et votre connaissance du cœur humain ; croyez que je vous rends la justice qui vous est due '. »

Après le combat de Salhieh, le général Dugua était parti pour aller prendre possession de la province de Mansourah, dans le chef-lieu de laquelle Vial avait, comme on l'a vu, laissé en passant un faible détachement de troupes. Dugua marcha, pendant douze heures, et arriva, le 27 thermidor au soir, au bord du canal Saffra, près du village d'El-Lebaïdeh. C'était précisément le moment où l'inondation commençait. A la droite de la division Dugua s'étendait la vaste plaine de Daqhelieh, couverte par l'inondation pendant huit à neuf mois de l'année, et qui avait l'aspect d'un grand lac. Le canal Saffra, rempli depuis huit jours, avait neuf pieds de profondeur et dixhuit toises de large. N'y trouvant point de bateaux, Dugua fit construire un radeau avec quelques poutres et des portes prises dans le village. Il était extrêmement inquiet sur ses subsistances, et ne découvrait point de légumes; les habitans avaient fui et emmené leurs bestiaux ; il faisait son possible pour les rassurer, les rassurer, afin d'avoir des vivres

'Lettre du 29 thermidor.

le soir, ne pouvant espérer d'arriver à Mansou

rah

que

le lendemain '.

Ayant peu d'espoir d'exécuter son passage avec le radeau, Dugua envoya, en amont du canal, un détachement qui lui amena, de deux lieues, avec beaucoup de peine, une barque capable de passer trente hommes à la fois. Il l'eut le 28 à midi, et 29 à la même heure, toute sa division fut de

le

l'autre côté du canal.

Le 3. bataillon de la 75°. qui était passé le 28, se porta de suite en avant, vers le canal d'Arnout pour y préparer les moyens de passage. On fit construire par les paysans six ou sept radeaux qui ne pouvaient porter chacun que deux ou trois hommes à la fois. Le bataillon mit sept heures pour passer. Il en aurait fallu plus de 60 pour toute la division. Heureusement le hasard fit découvrir une communication d'un canal à l'autre par laquelle on fit venir la barque en huit heures. Le 30, à midi, toute la division était sur la rive droite du canal d'Arnout. On fit passer un obusier et les pièces de canon à la prolonge, sur leurs affûts leur servant de radeau.

Mais de nouveaux canaux se remplissaient avec une promptitude effrayante. On arriva sur le bord d'un canal aussi large que celui de Saffra; le général Dugua le traversa sur-le-champ à la tête des grenadiers, ayant de l'eau jusqu'à la poitrine; les canonniers passèrent leurs pièces à bras. Dans

'Lettre de Dugua à Bonaparte, du 28 thermidor..

la crainte que les chameaux chargés de provisions ne s'abattissent dans la vase et dans l'eau, les canonniers ouvrirent les caisses, formèrent la chaîne, et passèrent les munitions de main en main, de manière que rien ne fut avarié. Cette opération dura trois heures.

Enfin, après avoir constamment traversé des champs et des canaux, où l'on voyait à chaque instant croître l'eau, Dugua et sa division arrive rent le 1. fructidor, à cinq heures du matin, à Mansourah.. 7

་་་f,

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On ne peut se faire une idée des cruelles inquiétudes qué lui avait fait éprouver le débordement des eaux et le manque de subsistance. Vingtquatre heures plus heures plus tard, il lui eût été impossible d'emmener du pays qu'il avait traversé, ni artillerie, ni chevaux, ni chameaux, ni munitions d'aucune espèce; trop heureux s'il en avait retiré les hommes !:

Dugua apprit à Mansourah l'attaque faite le 23 thermidor contre le détachement que le général Vial y avait laissé, avait laissé, et sa retraite sur le Kaire. Il

était dans une situation très-embarrassante. Il n'y trouva ni l'intendant cophte, ni l'agent français. La plupart des habitans s'étaient sauvés sur la rive opposée du Nil. Les boutiques et les maisons étaient fermées. Il fit proclamer que les Français accordaient protection aux propriétés et aux individus; quelques habitans rentrèrent; les marchands commencèrent à vendre. Il était

'Lettre de Dugua à Bonaparte, du 2 fructidor.

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