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Nomination de l'émir-haggi.-Fête du Nil.-Fête du prophète. -Protestations pacifiques de Bonaparte envers la Porte et les puissances de l'Orient.-Mesures pour la santé et la salubrité publiques. Institut d'Égypte.-Mesures relatives à divers services de l'armée et à la police du Kaire.-Koraïm décapité.Fête du 1er. vendémiaire an vII.-Assemblée du divan général.-Finances de l'Égypte.

La caravane de la Mekke avait à la fois un objet religieux et commercial. Elle partait des extrémités de l'empire de Maroc, recueillait dans sa route les pélerins d'Alger, de Tunis et de Tripoli, et venait au Kaire pour achever son voyage avec la caravane d'Égypte, dont elle précédait ou suivait la marche, à une journée de distance. Il s'y joignait des négocians qui portaient en Arabie des marchandises fines, telles que des draps, de la cochenille, du girofle, etc., et en rapportaient du café, réputé le meilleur, parce qu'il ne passait pas la mer, des schals, des essences et généralement tout ce qui a une grande valeur et peu de poids.

Dans le principe, et sans doute lorsqu'elle n'était que religieuse, la caravane était respectée par les Arabes; mais lorsqu'elle fut devenue commerciale, elle excita leur cupidité. Solyman la

prit sous sa protection, chargea un fonctionnaire, l'émir-haggi (prince des pélerins), de l'escorter, et lui alloua sur son trésor un fond pour cette dépense. Cette protection ne fut pas toujours efficace. On n'en fut pas moins obligé de payer des subsides aux Arabes, pour que la caravane ne fût point inquiétée. Souvent ils se jouèrent de leurs promesses, et il fallut, quoiqu'on pactisât avec eux, maintenir et même successivement augmenter l'escorte.

C'était par cette caravane que l'on envoyait à la Mekke les fondations faites par les souverains de l'Égypte. 1°. le kesouèn. On appelait ainsi les tentures destinées à revêtir le temple de la Mekke et à décorer le tombeau de Fatmeh à Médine. On les fabriquait dans la citadelle du Kaire. 2o. le sorreh ; c'était un fond affecté au paiement des rentes et pensions, et dont le schérif de la Mekke faisait l'emploi.

Le général en chef nomma Mustapha-Bey, kiaya du pacha, émir-haggi, le revêtit d'une superbe pelisse verte, en présence du divan et des schérifs, et lui fit présent de diamans et d'un cheval harnaché. Il sortit de chez Bonaparte accompagné de plusieurs aides-de-camp, et fut salué de six coups de canon que répétèrent les batteries de la citadelle.

Pour plaire aux Égyptiens, les éblouir, entretenir l'enthousiasme de l'armée et lui procurer quelque distraction, le général en chef fit célébrer des fêtes et leur donna un grand éclat. Le

débordement périodique du Nil, et l'ouverture des eaux lui en fournirent la première occasion. C'est la fête la plus populaire, car l'Égypte n'existe que par ce fleuve, il en est le père nourricier, la providence. Il commence à s'élever vers le solstice d'été ; l'inondation croît jusqu'à l'équinoxe et diminue ensuite progressivement. C'est entre septembre et mars que se font les travaux de la campagne, les semences et les récoltes. Dès le commencement de la crue des eaux, le cheik, chargé du soin et de la garde du meqyas ou nilomètre, fait annoncer journellement ses progrès par des crieurs dans toutes les rues et aux portes des maisons les habitans se font un plaisir de leur donner du pain et de l'argent. Le khalyg ou canal s'ouvre au-dessous du Vieux-Kaire sur la petite branche du Nil, formée par l'île de Roudah, et traverse le Kaire. L'oualy est chargé de former une digue à 50 pas en dedans du khalyg pour empêcher le fleuve d'y pénétrer, jusqu'à ce que ses eaux soient suffisamment élevées. La rupture de la digue a lieu du 15 au 20 août. Le 30 thermidor, une barque peinte, décorée de pavillons et de banderolles, armée de quatre canons qui faisaient un feu continuel, partit de Boulaq et vint se placer à l'ouverture du canal. On tira un feu d'artifice sur ses bords dès que la nuit fut venue. Le peuple afflua dans les quartiers voisins se livrant à la gaîté; les eaux se couvrirent de barques nombreuses. Les femmes elles-mêmes, cachées dans leur harem pendant le reste de l'année, partici

paient à l'allégresse commune en voguant, séparées des hommes, dans des nacelles où se faisaient entendre des chants et de la musique.

Le 1er. fructidor (18 août), à 6 heures du matin, accompagné des généraux, de l'état-major, du kiaya, du divan, du mollah, de l'aga, du qady et de plusieurs autres fonctionnaires ou personnages distingués, Bonaparte se rendit à l'entrée du khalig. Un peuple immense couronnait tous les monticules qui bordent le Nil et le canal. La flottille était pavoisée; une partie de la garnison sous les armes ; le coup-d'oeil imposant. L'arrivée du cortége fut annoncée par des salves d'artillerie. Les musiques française et arabe exécutaient différens airs. Le cheyk du meqyas annonça que le Nil s'était élevé à la 15. coudée (25 pieds ). Le procès-verbal en fut dressé et signé. On travailla à couper la digue; l'effort du fleuve seconda les ouvriers, elle disparut, et la barque de l'oualy du Vieux-Kaire vogua la première sur les eaux qui roulèrent en torrent dans le canal. Hommes, femmes et enfans tous s'y précipitèrent, attribuant des vertus à ce bain tumultueux. Les femmes y jetaient des mèches de cheveux, des morceaux d'étoffe, attendant de ces offrandes la fécondité ou d'autres biens. Bonaparte jeta au peuple plusieurs milliers de médins et des pièces d'or au bateau qui le premier entra dans le canal. Il revêtit de la pelisse noire le mollah, de la pelisse blanche le nakib-redjah, et fit distribuer 38 caftans aux principaux officiers civils et militaires du pays. Le cortége retourna sur la place

d'Esbekyeh, suivi par le peuple qui chantait les louanges du prophète et de l'armée française et maudissait les beys et leur tyrannie « Oui, disait-il, vous êtes venus nous délivrer par l'ordre de Dieu miséricordieux; car vous avez pour vous la victoire et le plus beau Nil qu'il y ait eu depuis un siècle. Ce sont deux bienfaits que Dieu seul peut accorder. »>

« La fête qu'on a célébrée ici pour l'ouverture du canal du Nil, écrivit Bonaparte aux généraux Vial et Menou, a été très-belle, et a paru faire plaisir aux habitans. Celle du prophète le sera encore davantage 2. »

Elle fut en effet célébrée au Kaire avec une grande pompe et par les commandans dans plusieurs provinces. Elle commença le 2 fructidor et dura quatre jours. Il y eut grande parade des troupes de la garnison. Tous les officiers généraux et supérieurs allèrent faire visite et présenter leurs félicitations au cheik El-Bekry, reconnu pour le premier descendant de Mahomet, nommé le matin le Nakik-el-Ascheraf ou chef des cheyks, en remplacement d'Osman-Effendi qui avait pris

1 C'était une flatterie de la part du vaincu envers le vainqueur; car telles furent, pendant le séjour des Français, les crues du Nil à partir des plus basses eaux qui ne sont presque jamais au dessous de 5 pieds:

An 6, 22 pieds 6 pouces. Bonne.

7, 21

8, 24

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A 20 pieds, la crue ne suffirait pas pour arroser la très-grande majorité des terres.

2 Lettres des 1er. et 3 fructidor.

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