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habitans et être maître du pays. Qu'était le pillage de la caravane auprès d'un si grand intérêt? L'événement répondit à l'attente du général en chef; Ibrahim-Bey fut rejeté dans la Syrie et ne parut plus en Égypte.

<< Si la caravane se présentait pour venir, écrivait Bonaparte au général Reynier, deux jours avant de se mettre en marche contre les Mamlouks, vous l'accueillerez de votre mieux. »

<< Non loin de Belbeïs, dit Miot, témoin oculaire, nous rencontrâmes la caravane de la Mekke qui s'avançait lentement dans le désert: elle avait été pillée par les Mamlouks et les Arabes; Bonaparte en fit escorter les débris jusqu'au Kaire '. »

« Les Arabes qui escortaient la caravane, dit Martin lui-même, comme s'il avait été dans leur confidence, présumant que la malheureuse caravane allait devenir la proie, ou des Français ou d'Ibrahim, crurent devoir les prévenir, et se mirent à piller les bagages. » Mais loin d'ajouter que Bonaparte en fit accompagner les débris au Kaire, il suppose que les Français se les approprièrent, et fait cette peinture romanesque des soldats qui se servaient de schals précieux comme de toile d'emballage. Quelques individus de l'armée purent abuser de la désorganisation de la caravane pour faire payer leur protection aux marchands qui vinrent la réclamer; mais il y avait loin de ces abus particuliers à un système de pil

'Miot. Mémoires sur l'Expédition d'Égypte, page 58.

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lage médité par le général en chef. Son intérêt et sa politique lui prescrivaient de favoriser le commerce, de protéger la religion, et de rassurer les Musulmans que ces deux motifs attiraient de toutes parts en Égypte. Tel était le système de Bonaparte, et il y fut constamment fidèle depuis son entrée dans ce pays jusqu'au moment où il en sortit.

Cependant Ibrahim-Bey battait en retraite, et Bonaparte, jugeant que le moment pouvait être favorable pour entamer une négociation, lui écrivit aussitôt après le combat:

« La supériorité des forces que je commande ne peut plus être contestée : vous voilà hors de l'Égypte et obligé de passer le désert. Vous pouvez trouver dans ma générosité la fortune et le bonheur que le sort vient de vous ôter. Faites-moi de suite connaître votre intention. Le pacha du grand-seigneur est avec vous, envoyez-le-moi porteur de votre réponse, je l'accepte volontiers comme médiateur >>

I

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Cette lettre resta sans réponse :

Il ne suffisait pas à Bonaprrte d'avoir rejeté Ibrahim et ses Mamlouks hors de l'Égypte; il fallait les empêcher d'y rentrer et se préparer les moyens de faire marcher l'armée vers la Syrie, si jamais un ennemi menaçait cette frontière. Bonaparte résolut de réunir à Salhieh des magasins de vivres et de munitions pour une armée de 30,000 hommes pendant un mois. Il était indis

'Lettre du 24 thermidor.

pensable que ces magasins fussent contenus dans une forteresse qui les mît à l'abri d'être enlevés par une attaque de vive force, et dans laquelle une garnison de 7 à 800 hommes obligeât l'ennemi à nn siége d'autant plus pénible qu'il ne pouvait voiturer son artillerie qu'après une traversée de neuf jours dans le désert. Une fois cette forteresse construite, on pourrait, si on le jugeait convenable, y appuyer un camp retranché, soit pour tenir pendant longtemps les corps de l'ennemi éloignés, soit pour protéger un corps d'armée inférieur en forces, mais trop considérable pour y tenir garnison. Le général en chef chargea le général du génie de travailler d'après ces données, et de diriger les travaux de manière que dans 40 ou 50 jours cette forteresse eût déjà l'avantage d'un fort poste de campagne, et qu'avec une garnison plus nombreuse que celle qu'on y tiendrait lorsqu'elle serait achevée, les magasins pussent être déjà à l'abri d'une attaque de vive force.

Il donna l'ordre au général Dommartin de se concerter avec celui du génie pour tous les établissemens de l'artillerie, indépendamment des magasins nécessaires à l'approvisionnement pour 3 ou 4 pièces de campagne, et 5 ou 600,000 cartouches.

Jusqu'à ce que la forteresse fût construite, il était indispensable que Salhieh fût occupé en force. Bonaparte y laissa donc Reynier avec sa division, comme gouverneur de la province de Charqyeh; lui recommanda d'envoyer des espions en Syrie, pour se tenir instruit de tous les mou

vemens qu'on pourrait faire de ce côté-là; de se mettre en correspondance suivie avec le général Vial, à Damiette, cette ville étant plus en état de recevoir par mer des nouvelles de Syrie; de bien reconnaître Salhieh, par rapport aux différens canaux du Nil et à la mer. Quand on aurait reconnu la route qui, de la mer, conduit à Salhieh, l'intention du général en chef était d'avoir une frégate et un ou plusieurs avisos à portée de ce point, pour apporter du vin, du canon, canon, des outils que l'on avait à Alexandrie et les bagages de la division. Il prescrivit à Reynier de répandre, soit dans sa province, soit en Syrie, le plus de proclamations qu'il pourrait ; et de prendre des mesures pour que tous les voyageurs qui arriveraient de ce côté-là lui fussent amenés pour être interrogés. Indépendamment de ces fonctions militaires, Reynier en avait encore d'administratives à remplir. Il était chargé d'organiser la province Charqyeh, dont le chef-lieu était à Belbeïs. Il devait commencer par se mettre en correspondance avec toutes les tribus arabes, afin de connaître les camps qu'ils occupaient, les champs qu'ils cultivaient, et dès-lors le mal qu'il pourrait leur faire lorsqu'ils désobéiraient à ses ordres. Cela fait, il avait deux buts à remplir: le premier, de leur ôter le plus de chevaux possible; le second, de les désarmer. Il fallait ne leur laisser entrevoir que peu à peu cette intention, et ne leur demander d'abord qu'une certaine quantité de chevaux pour remonter la cavalerie. Après les avoir obtenus, on verrait à prendre d'autres mesures; mais

auparavant, il fallait s'occuper de connaître les intérêts qui liaient les Arabes aux Français; ce qui seul pourrait diriger dans les menaces et le mal que l'on serait dans le cas de leur faire '.

Comine dans toutes les provinces, Reynier installa, avec solennité, son divan à Belbeïs.

Lés généraux commandans saisirent cette circonstance pour se rendre auprès des magistrats du pays, les interprètes des principes et des sentimens du général en chef. Pour donner une idée du langage que tenait le vainqueur au peuple conquis, nous citerons le discours que le général Reynier prononça dans cette circonstance :

<< L'intention des Français, dit-il, en chassant les esclaves mamlouks de l'Égypte, n'a pas été d'imposer un nouveau joug à ses habitans, mais de leur rendre l'exercice des droits que la nature leur a donnés. Le peuple d'Égypte sera gouverné par ses magistrats, sous la protection des Français. Justice lui sera rendue, car l'arbitraire a dû disparaître avec les Mamlouks. Habitans du Charqyeh, vous devez respecter vos magistrats, parce qu'ils sont les organes de la justice; et vous, membres du divan, gouvernez toujours dans les intérêts du peuple et à l'avantage de la République française, car les Français sont les amis des Musulmans. Cette amitié doit vous être précieuse, parce que les Français protègent leurs amis et terrassent leurs ennemis. Vous allez jurer obéis

Lettres du 26 thermidor ( 13 août).

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