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contestation, tira un pistolet de sa ceinture, fit sauter le crâne au malheureux Desnanots, et rendit de sang-froid les cent piastres au messager, pour qu'il les rapportât au général en chef.

La division Desaix reprit l'avant-garde. Le 28, Farmée coucha à Algam; le 29, à Abounochabeh, et le 30, au gros village de Ouardam; là elle bivouaqua dans une grande forêt de palmiers. Le soldat commencait à connaître les usages du pays et à déterrer les lentilles et autres légumes que les félláh avaient coutume de cacher sous la terre. Mais le pain et le vin manquaient; le biscuit apporté d'Alexandrie était consommé depuis longtemps. On trouvait d'immenses tas de blé; on n'avait ni fours ni moulin. Pour tirer parti du grain, on était réduit à le piler entre deux pierres, ou à le faire griller et à le manger en galettes ou en bouillie. Le général en chef, pour donner l'exemple, bivouaquaît au milieu de l'armée, dans les endroits les moins comniodes. Le dîner de l'étatmajor consistait dans un plat de lentilles. La soirée du soldat se passait en conversations politiques sur les résultats de la campagne qui venait de s'ouvrir. Quelques-uns allaient jusqu'à dire que le Directoire les avait déportés en Égypte, et qu'il n'existait pas de ville du Kaire. Leur imagination était tellement tourmentée que deux dragons se jettèrent tout habillés dans le Nil et s'y noyèrent. Mais dans ce malaise extrême, au milieu même des murmures ét des clameurs des soldats on retrouvait toujours la gaîté française. Ils accusaient Caffarelly d'être l'agent dont s'était

servi le Directoire pour tromper Bonaparte et l'armée, et ils disaient, en faisant allusion à sa jambe de bois : Il se moque bien de cela, lui, il a un pied en France.

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-L'armée passa toute la journée du 1. thermidor à Quardam, pour se délasser des fatigues de la route, réparer l'artillerie, nétoyer les armes et se préparer au combat. Le 2 thermidor, elle se mit en marche et alla coucher au village d'On-Dinar, à six lieues du Kaire, presque à la hauteur de la pointe du Delta, dite en arabe Badel-Baqarah (ventre de la vache ), où le général Zayonscheck prit position avec sa troupe. Là, Bonaparte fut instruit que Mourad-Bey avait réuni dans la plaine d'Embabeh tous ses Mamlouks, lá milice du Kaire et un grand nombre d'Arabes, résolu de livrer une bataille décisive. Soll 13 treat

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Le 3 thermidor, à deux heures du matin, l'armée partit d'Om-Dinar. Pour la première fois, depuis Chébreis, elle rencontra un corps de Mamlouks; c'était l'avant-garde de Mourad-Bey. Elle se replia avec ordre et sans rien tenter. Tout annonçait que cette journée déciderait du sort de l'Égypte. Les soldats reprirent courage, instruits qu'ils approchaient du terme de leurs souffrances une ardeur martiale régnait dans tous les rangs. Lorsque le soleil parut à l'horizon, l'armée aperçut les Pyramides. Aussitôt elle posa ses armes, et fit une halte spontanée pour les contempler. Soldats! s'écria Bonaparte, dont la figure s'anima tout-à-coup d'un noble enthousiasme, soldats, vous allez combattre aujourd'hui

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les dominateurs de l'Égypte ; songez que du haut de ces monumens quarante siècles vous contemplent!».

A dix heures, l'armée aperçut Embabeh et les ennemis en bataille; à deux heures après midi, les deux armées se trouvèrent en présence, séparées par une plaine d'une demi-lieue. L'armée ennemie s'étendait depuis le Nil jusqu'aux Pyramides. Elle était forte d'environ 60,000 hommes. Les janissaires et les spahis, au nombre de 20,000, gardaient un grand camp retranché pratiqué près du village d'Embabeh, et garni d'une quarantaine de canons que l'on avait tirés de la flottille.

Les Mamlouks occupaient le centre; ce corps s'élevait à 9 ou 10,000 cavaliers, servis chacun par trois fellâh à pied. Un corps de 3,000 cavaliers arabes tenaient l'extrême gauche jusqu'aux Pyramides. Ces dispositions étaient formidables.

Cette évaluation est extraite des Mémoires de Napoléon. Gourgaud, tome 11, page 234.

Miot, témoin occulaire, rapporte que l'armée ennemie était forte de 6,000 Mamlouks environ, et d'une foule d'Arabes et de fellâh.

Jomini dit 6,000 Mamlouks, soutenus par une foule innombrable de Cophtes, de Grecs, de fellâh et d'Arabes à cheval. Nous ignorons sur quelle autorité cet écrivain s'est fondé; on ne voit nulle part qu'il y ait eu des Cophtes et des Grecs.

Berthier dit que Bonaparte fut instruit à Om-Dinar que Mourad-Bey était retranché à la tête de 6,000 Mamlouks, une foule d'Arabes et de fellâh. Ceci n'établit pas la force des Manilouks au moment où les deux armées se trouvèrent en présence.

On sait que la milice des Mamlouks s'élevait à 12,000 hommes: Ibrahim-Bey en avait sur la rive droite environ 2,000. Il n'y en avait alors dans aucun autre endroit de l'Égypte; quelques centaines seulement escortaient la caravane de la Mekke. Reste donc pour Mourad-Bey 9 à 10,000.

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L'armée française ne s'était point encore mesurée contre les janissaires et spahis; mais elle avait éprouvé l'impétueuse bravoure des Mamluks. Le général en chef forma son ordre de bataille comme à Chébreis, mais de manière à présenter plus de feu à l'ennemi. Desaix commandait la droite, formée de sa division et de celle du général Reynier. La division Kléber, aux ordres du général Dugua, tenait le centre. La division Bon, et celle de Menou, commandée par le général Vial, occupaient la gauche appuyée au Nil.

Bonaparte, instruit que l'artillerie du camp retranché n'était pas sur affûts de campagne, et par conséquent ne pouvait sortir de l'enceinte, résolut de prolonger sa droite et de faire suivre le mouvement de cette aile à toute l'armée, en passant hors de la portée du camp retranché. Par-là. l'armée française n'avait affaire qu'aux Mamlouks; l'infanterie et l'artillerie de janissaires ne pouvaient être d'aucun secours à l'ennemi.

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Mourad-Bey vit les colonnes de Desaix s'ébranler et ne tarda pas à deviner le but de Bonaparte. Quoique ce chef ne connût point la tactique, la nature l'avait doué d'un grand caractère, d'un courage à toute épreuve, et d'un coup-d'oeil pénétrant. La bataille de Chébreis lui avait servi d'expérience. Il sentit avec une habileté qu'on pourrait à peine attendre du général européen le plus consommé, que le destin de la journée consistait à empêcher les Français d'exécuter ce mou

vement, et à profiter de l'avantage de sa nombreuse cavalerie pour les attaquer en marche.

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Il détacha un de ses bey les plus braves avec un corps d'élite de 6 à 7,000 Mamluks qui, avec la rapidité de l'éclair, chargea les divisions Desaix et Reynier. Elles n'eurent pas le temps de' se former et furent un instant compromises; mais la tête des Mamlouks qui avait commencé le choc était peu nombreuse; leur masse n'arriva que quelques minutes après; ce retard suffit pour former les carrés. Lorsque les Mamluks furent à cinquante pas du front, on les accueillit par une mitraille et une grêle de balles qui en fit tomber un grand nombre. En vain ces braves s'élancèrent à plusieurs reprises sur les carrés français. Les grenadiers immobiles firent pleuvoir sur eux un feu meurtrier, et leur opposèrent un rempart impénétrable. C'est alors qu'un bey audacieux, voyant tous ses efforts échouer contre le front des Français, se dévoua, avec 40 de ses Mamlouks, de la manière la plus héroïque pour ouvrir un passage à Mourad. Ils acculèrent leurs chevaux contre les baïonnettes des grenadiers et les renversèrent sur eux. Par-là, ils parvinrent à faire unè brèche dans le carré; mais elle se referma aussitôt; ils périrent tous; il en vint mourir une trentaine aux pieds de Desaix. Bonaparte, qui était dans le carré du général Dugua, saisit cè moment décisif, fit partir les généraux Bon et

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