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Mamlouk Sélim. Des fuyards d'Alexandrie avaient traversé Rosette pour se cacher dans l'intérieur du Delta, et y avaient entraîné des habitans. Les mosquées s'étaient remplies de dévots qui s'abandonnaient à Mahomet; les femmes poussaient des cris, et emportaient leurs enfans dans les campagnes. Les Candiotes insultaient les Français établis; il y en eut même un de massacré. Heureusement la proclamation du général en chef était arrivée au milieu de ces excès; elle appaisa les alarmes du peuple qui prit les Français sous sa protection, et pria l'un d'eux, le négociant Varsy, d'aller à la tête d'une députation porter des paroles de paix au général en chef.

Le kachef Selim, voyant ces dispositions, avait remonté le Nil pour rejoindre les Mamlouks à Rahmanieh, et avait été tué dans le premier combat.

Cependant le général Dugua s'était avancé sur Rosette; on était allé au-devant de lui et on lui avait remis les clefs de la ville. Varsy, le muphti, le serdar-aga et le chaouieh s'étaient constitués otages, les Français étaient dans la ville sans coup férir. Dugua avait ordonné la formation d'une administration provisoire, et, laissant à Rosette une garnison de 200 hommes, il s'était mis en route pour rejoindre l'armée. Il arriva au quartier-général de Rahmanieh après une marche forcée, et annonça que la flottille était heureusement entrée dans le Nil; mais, les eaux étant basses, elle remontait le fleuve avec difficulté. Elle arriva enfin dans la nuit du 24.

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TOME I. Guerre d'Égypte.

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Cette nuit

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même, l'armée partit pour Minieh-Salameh. Elle y coucha, et le 25, avant le jour, elle était en marche pour livrer bataille à l'ennemi partout où elle pourrait le rencontrer.

Bonaparte apprit que Mourad-Bey, à la tête d'un corps de 4,000 Mamlouks, attendait les Français à Chébreis. Sa droite était appuyée à ce village où il avait placé quelques pièces de canon, et au Nil, sur lequel il avait une flottille de 10 chaloupes canonnières et de djermes armées.

Bonaparte avait ordonné à la flottille française, composée de trois chaloupes canonnières, un chebek et une demi-galère, de continuer sa marche, en se dirigeant de manière à pouvoir appuyer la gauche de l'armée sur le Nil, et attaquer la flottille ennemie au moment où l'on attaquerait les Mamlouks et le village de Chébreis. Malheureusement la violence des vents ne permit pas de suivrė en tout ces dispositions. La flottille dépassa la gauche de l'armée, gagna une lieue sur elle, se trouva en présence de l'ennemi, et se vit obligée d'engager un combat d'autant plus inégal qu'elle avait à la fois à soutenir le feu des Mamlouks', des fellah et des Arabes, et à se défendre contre la flottille ennemie. Il fut extrêmement opiniâtre. On tira de chaque côté plus de 1,500 coups de canon. Les felláh, conduits par les Mamluks, se jettèrent, les uns à l'eau, les autres dans des

Les Égyptiens appellent ce village Chobráris; nous lui conserverons néanmoins le nom de Chebreis, sous lequel il est plus

connu.

djermes, et parvinrent à prendre à l'abordage la demi-galère et une chaloupe canonnière. Le chef de division Perrée, quoique blessé au bras d'un coup de canon, disposa aussitôt ce qui lui restait de forces, et parvint à reprendre à l'ennemi ses deux bâtimens sous la protection de son chebek qui vomissait de tous côtés le feu et la mort, et brûla des chaloupes canonnières à l'ennemi. Il fut puissamment secondé par l'intrépidité et le sangfroid du général Andréossy, qui commandait un corps de troupes de debarquement; les citoyens Monge, Berthollet et Bourienne montrèrent beaucoup de de courage. L'ordonnateur en chef Sucy fut grièvement blessé en défendant avec vigueur une chaloupe canonnière chargée de vivres.

Cependant le bruit du canon avait fait connaître au général en chef que sa flottille était engagée. Il fit marcher l'armée au pas de charge; elle s'approcha de Chébreis, et aperçut les Mamlouks rangés en bataille en avant de ce village. Bonaparte reconnut leur position et forma l'armée ; elle était composée de cinq divisions: chacune d'elles formait un carré qui présentait à chaque face six hommes de hauteur; l'artillerie était placée aux angles; au centre, étaient les équipages et la cavalerie. Les grenadiers de chaque carré formaient des pelotons qui flanquaient les divisions, et étaient destinés à renforcer les points d'attaque.

Les sapeurs, les dépôts d'artillerie, prirent position et se barricadèrent dans deux villages en arrière, afin de servir de point de retraite, en

cas d'événement. L'armée n'était qu'à une demilieu des Mamlouks. Tout-à-coup ils s'ébranlèrent par masses, sans aucun ordre de formation, et inondèrent la plaine. Ils débordèrent les ailes des Français, et caracolèrent sur les flancs et les derrières, cherchant le point le plus faible pour pénétrer; mais partout la ligne était également formidable et leur opposait un double feu de flanc et de front, D'autres masses chargèrent avec impétuosité la droite et le front de l'armée. On les laissa approcher jusqu'à portée de la mitraille. Aussitôt l'artillerie se démasqua et les mit en fuite. Quelques-uns de ces braves fondirent, le sabre à la main, sur les pelotons de flanqueurs. Attendus de pied ferme, presque tous furent tués par le feu de la mousqueterie ou par la baïonnette. Animée par ce premier succès, l'armée s'ébranla et marcha au pas de charge sur Chébreis, que l'aile droite avait ordre de déborder. Ce village fut emporté après une faible résistance. Les Mamlouks opérèrent leur retraite en désordre vers le Kaire. Leur flottille prit également la fuite en remontant le Nil, et termina ainsi un combat acharné qui durait depuis deux heures. Les cavaliers démontés embarqués sur cette flottille, et commandés par le général Zayonschek, sous les ordres d'Andréossy, contribuèrent beaucoup à la gloire de cette journée. La perte de l'ennemi fut de plus de 600 hommes tués ou blessés ; celle des Français d'environ 70.

Après le combat, le général Zayonschek eut ordre de suivre la rive droite du Nil, avec 1,500

hommes, à la hauteur de la marche de l'armée qui s'avançait sur la rive gauche.

Le chef de division Perrée fut nommé contreamiral; le général de brigade d'artillerie Dommartin fut promu au grade de général de division.

L'armée coucha le 25 à Chébreis. Le lendemain, elle se mit en marche pour aller coucher à Chabour. Cette journée était forte; on marchait en ordre de bataille et au pas accéléré dans l'espérance d'atteindre la flottille ennemie; mais les Mamlouks brûlèrent les bâtimens qu'on était sur! le point d'atteindre. Le 26 au soir, Parmée bivouaqua à Chabour, sous de beaux sycomores et trouva des champs pleins de pastèques, espèce de melons d'eau formant une nourriture saine et rafraîchissante. Le 27, l'armée coucha à Koûm-Chérik. Elle était sans cesse harcelée par les Arabes. On ne pouvait s'éloigner à une portée de canon sans tomber dans quelque embuscade. S'ils étaient les plus nombreux, ils assassinaient et pillaient; ils prenaient la fuite à nombre égal et lorsqu'il fallait combattre. L'adjoint aux adjudans-généraux, Gallois, officier distingue, fut tué en portant un ordre du général en chef. L'adjudant Desnanots, neveu du savant Lacepède, tomba entre leurs mains et fut emmené à leur camp. Bonaparte envoya au chef de la tribu un pressager porteur d'une lettre et de 100 piastres pour le rachat de ce jeune homme. Il s'éleva une vive querelle sur le partage de la somme entre ceux qui l'avaient fait prisonnier. Ils étaient prêts à en yenib aux mains, lorsque le chef, pour terminer la

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