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reux pays. Un si grand service rendu aux Turcs les engagerait aisément à nous y laisser toute la prépondérance et tous les avantages commerciaux dont nous avons besoin. L'Égypte, comme colonic, remplacerait bientôt les productions des Antilles, et, comme chemin, nous donnerait le commerce de l'Inde; car tout, en matière de commerce, réside dans le temps, et le temps nous donnerait cinq voyages contre trois par la route ordinaire. >>

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On a vu toutes les dispositions sérieusement faites par le Directoire et Bonaparte pour la descente en Angleterre; par un changement subit tous leurs efforts vont se diriger vers l'expédition d'Égypte. Comment et pourquoi l'une futelle substituée à l'autre? C'est un point sur lequel le Directoire et Bonaparte ne se sont point expliqués; on ne peut donc que former des conjectures. La paix arrêtait tout-à-coup Bonaparte au milieu de sa carrière. Il fallait un nouveau théâtre à son activité, à son génie. La descente en Angleterre le lui présentait; mais rien n'était prêt, et la saison était trop avancée. Plus de six mois devaient s'écouler avant que les préparatifs fussent terminés et que les longues nuits d'hiver fussent venues. Restera-t-il en France, à Paris, pendant ce long intervalle, point de mire de tous les partis et du Directoire, spectateur tranquille de leurs débats, insensible à leurs attaques, sourd à leurs espérances; dans un pays où s'usent facilement

Voyez Campagne d'Italie, chapitre dernier.

les plus grandes renommées ? Laissera-t-il refroidir sa gloire au sein de l'oisiveté ? Ambitieux du pouvoir, prêtera-t-il une oreille favorable à ceux qui lui conseillent de s'en emparer? Il l'oserait t; mais, pour réussir, les temps ne sont pas mûrs. Ils mûriront pendant une expédition lointaine. Ce parti concilie tous les intérêts, apaise toutes les inquiétudes; l'Égypte revient à sa pensée, sa conquête est résolue. Le Directoire n'en avait point abandonné le projet; Rewbell l'avait particulièrement étudié. On saisit avec empressement l'occasion d'éloigner un guerrier dont on envie l'influence, dont on redoute le grand caractère la gloire importune. Du reste, le gouvernement et le général ne renoncent point à attaquer corps à corps l'Angleterre; mais conquérir l'Égypte c'est aussi porter un grand coup à l'éternelle rivale de la France.

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L'attention du Directoire fut définitivement fixée sur cette expédition, par une note et des états que Bonaparte lui remit le 15 ventôse, et dans lesquels il indiquait les forces et les fonds nécessaires. Tels étaient ses calculs et ses combinaisons :

Il fallait, pour s'emparer de Malte et de l'Égypte, 20 à 25,000 hommes d'infanterie, et 2 à 3,000 hommes de cavalerie, sans chevaux.

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Ces troupes s'embarqueraient en Italie et en France.

2 Elles seraient commandées par les généraux Belliard, Friand, Muireur, Barraguay-d'Hilliers, Vaux Vial, Murát, Ménard, Bon, Brune, Ram

pon, Pigeon et Leclerc. Ces généraux et les troupes sous leurs ordres avaient en grande partie fait les guerres d'Italie.

La cavalerie s'embarquerait avec les harnais et sans chevaux, et chaque cavalier armé d'un fusil. Tous les corps avec leur dépôt, cent cartouches par homme; de l'eau dans les bâtimens pour un mois, des vivres pour deux.

Il fallait joindre à ces troupes 60 pièces d'artillerie de campagne, 40 grosses bouches à feu de siége, 2 compagnies de mineurs, un bataillon d'artillerie, 2 compagnies d'ouvriers et un bataillon de pontonniers, et en outre les compagnies de canonniers des demi-brigades.

Ces troupes devaient être prêtes au commencement de floréal. Le rendez-vous général était dans le golfe d'Ajaccio, pour en partir à la fin de floréal.

Le général Masséna noliserait à Civita-Vecchia les plus grands bâtimens qu'il pourrait trouver dans ce port, y embarquerait les troupes et l'artillerie, et les ferait partir sur-le-champ pour se rendre et rester jusqu'à nouvel ordre à Ajaccio.

On pourrait prendre sur les contributions de Rome de quoi subvenir aux frais de cet embarquement; on y affecterait spécialement celles des galères du pape qui seraient en état de tenir la mer.

Le général, commandant dans la Cisalpine, ferait à Gênes les mêmes dispositions; mais on y enverrait les fonds nécessaires pour noliser les bâtimens de transport, et on demanderait au Directoire de la république cisalpine deux galères

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pour servir à conduire les troupes et escorter le

convoi..

A Nice, Antibes et Marseille, le ministre de la marine frêterait les plus gros bâtimens de com- . merce en assez grand nombre pour porter les troupes et l'artillerie, et assurer les approvisionnemens...yom asi

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Le ministre de la guerre réunirait sur ces points les troupes, l'artillerie et les munitions néces

saires.

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Il y avait à Toulon six vaisseaux de guerre, des frégates et des corvettes; il fallait y joindre six tartanes canonnières.

Ces bâtimens réunis suffiraient pour porter la partie des troupes qui devait être embarquée à Toulon.!

L'escadre, selon le rapport du ministre de la marine, serait prête à partir sous 15 jours. Mais elle manquait de matelots; il proposait donc de mettre l'embargo sur les bâtimens nécessaires au transport de l'artillerie, et les noliser.

Sans compter les dépenses ordinaires, tant pour l'approvisionnement, l'armement et la solde de l'escadre, la solde, la nourriture et l'habillement des troupes, que pour l'artillerie et le génie, auxquelles il était indispensable de pourvoir en effectif, il faudrait une dépense extraordinaire de 5 millions, par conséquent, 8 ou 9 en tout 1.. Pour remplir promptement le grand objet de l'armement de la Méditerranée, le Directoire prit

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une série d'arrêtés rédigés par Bonaparte et minutés de sa main. Le secrétaire général ne fut pas mis dans le secret; ils furent expédiés, par Merlin qui venait d'être nommé président, aux minis+ tres et à Bonaparte. « Vous êtes chargé en chef de leur exécution lui écrivit le Directoire, vous voudrez bien prendre les moyens les plus prompts et les plus sûrs. Les ministres de la guerre, de la marine et des finances sont prévenus de se conformer aux instructions que vous leur transmettrez, sur ce point important, dont votre patriotisme a le secret, et dont le Directoire ne pouvait pas mieux confier le succès qu'à votre génie et à votre amour pour la vraie gloire » '.

Dès ce moment, Bonaparte eut la dictature de l'expédition, et donna l'impulsion la plus rapide à ses préparatifs. L'exécution en fut confiée sous ses ordres directs à une commission dite de l'armement des côtes de la Méditerranée, composée du contre-amiral Blanquet-Duchayla, nommé inspecteur de ces côtes, de l'ordonnateur de la marine Leroy, de l'ordonnateur en chef de l'armée de terre Sucy, et du général Dommartin, inspecteur de l'artillerie...

Les officiers civils et militaires de la marine, les commissaires du gouvernement près les administrations, les officiers commandant sur les différens points de la côte, devaient obtempérer aux réquisitions qui leur seraient faites par la

commission.

'Lettre du 15 ventôse (5 mars 1798), signée La RéveillèreLepaux, Merlin et Barras,

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