Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

qui aurait exigé plus de trois cents jours pour donner de l'eau aux troupes françaises. Oser ainsi insulter une armée de la République, commandée par le général Bonaparte .....!

[ocr errors]

Et cependant, il faut l'avouer, depuis le 10 octobre 1793 jusqu'au 21 prairial an vi, malgré quelques complaisances du grand-maître pour les ennemis de la France, on ne citait, de sa part, aucun acte d'hostilité; car on ignorait encore le traité conclu entre lui et la Russie, qui, sans être positivement hostile contre la France, reconnaissait cependant l'empereur Paul, comme protecteur de l'ordre de Malte. La conduite du grandmaître, le 21 prairial, était un acte de prudence que justifiait assez la présence d'un armement formidable, auquel c'eût été livrer les ports de l'île, que de lui en permettre l'entrée. Tous ces griefs n'étaient donc que des prétextes pour colorer une invasion résolue depuis longtemps, parce que, dans le fait, l'occupation de Malte importait essentiellement au succès de l'expédition d'Égypte, et que cette île serait infailliblement tombée au pouvoir des Anglais, si Bonaparte ne s'en était pas emparé d'avance. De toutes manières, c'en était fait de l'indépendance de Malte.

Les conseils législatifs déclarèrent que l'armée française de terre et de mer avait bien mérité de la patrie.

Quant au général, à en juger par les expressions de deux ministres, il était au-dessus de tous les éloges.

« Une des places les plus fortes du monde, lui écrivit Schérer, ministre de la guerre, prise aussitôt qu'assiégée et presque sans effusion du sang français, est encore un de ces prodiges avec lesquels il n'appartient qu'à vous de nous familia

riser.

La conquête d'une île, aussi importante sous tous les rapports, suffirait pour consommer une grande expédition; mais pour votre armée, elle n'est que le début des événemens qui vont continuer d'imprimer à vos travaux le sceau du génie, et leur donner ce caractère de grandeur que les siècles ne peuvent effacer. »

༥ Quelque utile et brillante qu'ait été la carrière militaire et politique que vous avez parcourue jusqu'à ce jour, écrivit le ministre de la marine, Bruix, quelque immensité de gloire que vous vous soyez acquise, jamais, cependant, vous n'avez tenu dans vos mains de plus grands intérêts; jamais vos destinées n'ont été plus étroitement liées aux destinées de votre patrie et à celles du monde.

Comme marin, j'avais les plus vives inquiétudes sur vous et vos vaisseaux; comme Français, je me reposais sur votre génie et sur la fortune qu'il su enchaîner.

L'Europe incertaine et attentive, attendait impatiemment de vos nouvelles. Un revers eût ranimé toutes les haines et toutes les ambitions ; mais vous ne faites parler de vous que par la vic

toire.

Poursuivez, citoyen général! Que la marine vous

doive sa réhabilitation dans l'estime publique et sa part à la gloire nationale!

Je voudrais pouvoir vous aider plus efficacement; je voudrais pouvoir faire passer des secours à ces précieux établissemens de l'Adriatique et de la Mer Égée, utiles fondations par vous faites à la prospérité de vos armes et à l'accroissement de nos richesses commerciales. Mais c'est encore vous, citoyen général, qui suppléerez, par vos heureuses conceptions, à la pénurie de nos moyens. Vous avez vu de près les difficultés, et vous savez tenir compte des sentimens et de la bonne volonté 1. »

Le ministre célébra, dans un banquet splendide, la prise de Malte.

Jusqu'ici la flotte française avait échappé à l'exploration des croisières anglaises. Au départ de l'expédition, Bonaparte avait donné ordre aux vaisseaux qui éclairaient la marche de l'escadre et du convoi, d'arrêter tous les bâtimens qui seraient trouvés dans la Méditerranée, afin de dérober sa marche aux Anglais.

Avant d'arriver à Malte, on rencontra six bâtimens suédois, destinés pour Naples. On amena les capitaines à bord de l'Orient. Bonaparte, au lieu de les retenir, se contenta de leur parole d'honneur, qu'ils entreraient à Cagliari, et qu'ils resteraient quelques jours pour lui donner le temps de faire route. Ils tinrent leur promesse. Le gouvernement suédois fit afficher à la bourse

y

Lettres des 16 et 17 messidor.

[ocr errors]

le récit de ce trait de confiance d'une part et de loyauté de l'autre.oom in/o) Pnoy of lendaby

[ocr errors]

D'après les instructions que Bonaparte avait laissées aux agens français dans tous les ports de la Méditerranée, ils lui transmettaient exactement les nouvelles qui leur parvenaient sur les fortes anglaises, et même sur les dispositions des puissances de d'Utalie. Par les intrigues d'Acton et de lady Hamilton, l'influence de l'Angleterre dominait à Naples. Au moment de quitter son poste où il venait d'être remplacé, l'ambassadeur Garaty alors, comme tout le monde, sous le charme del Bonaparte, lui faisait des offres et lui donnait des conseils où l'on reconnaît le penseur plus propre à la philosophie spéculative qu'au maniement des affaires.lt nel n

[ocr errors]

3 «Je vous avoue, général, écrivait-il, que l'idée d'une révolution faite en Italie par des Italiens me fait horreur. On ne voit pas où s'arrêteraient les bouleversemens des passions et de l'ignorance: d'un autre côté, si les Français font les révolutions et s'ils les font pour eux, ils violent leurs principes et les paroles qu'ils ont tant de fois données. La seule chose donc, qui serait bonne, et qui le serait extrêmement serait de donner ici, à la France, une influence très-prépondérante; elle détruirait celle des Anglais, qui est contre la nature des choses;elle ouvrirait de nouvelles sources de biens et de richesses aux Françaiset, à la fois aux Italiens. Elle amènerait enfin, sans convulsion, l'époque où l'Italie pourra être heureusement constituée et gouvernée, non par nous,

[ocr errors]

mais par nos principes. A mon arrivée à Paris, général, je vous écrirai encore sur cet objet ; il est d'une grande importance par lui-même, il touche par tous les points à l'exécution de toutes vos vues sur la Méditerranée et sur l'Orient.i

[ocr errors]

Je pars demain pour Paris et le plaisir que j'en ai n'est altéré que par le regret de m'éloigner du théâtre de vos belles opérations; mais, si vous le désiriez, général, j'en serais bientôt plus près encore, je serais bientôt avec vous. J'ai beaucoup médité dans ma vie sur les moyens de rendre, à toutes les institutions. d'un peuple, les grands attributs de quelques législations anciennes et les principes rigoureusement démontrés de notre nouvel ordre social; sur le moyen de rendre toutes les classes d'une nation capables d'exercer à la fois leurs bras et leur intelligence, de faire sortir des travaux même de la main les belles sensations et les pensées justes. Le résultat de toutes mes méditations a été de me persuader profondément qu'avec de la force et du pouvoir, en prenant l'espèce humaine telle qu'elle est, on pourrait en créer une autre, en quelque sorte, dans laquelle on ne verrait presque rien de la stupidité et des folies de la première. Eh bien! général, je vous demande une île ou deux, comme un peintre qui a des dessins dans la tête et un pinceau à la main, demande une toile et des couleurs. Vous allez avoir plusieurs îles et plusieurs peuplades à votre. disposition, et toutes sont placées dans les climats les plus propres aux expériences sociales. Si

« ZurückWeiter »