Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

consentement du grand-maître, pour ses créanciers, il leur fit en outre une délégation annuelle de 100,000 fr. sur sa pension jusqu'à l'entière

extinction de ses dettes.

Au moment de quitter l'île qu'il n'avait pas su défendre, ce chef obéré, plus moine que guerrier, ajouta encore à son déshonneur en baisant la main du conquérant qui le dépouillait de ses États.

« J'eusse mis, écrivit-il à Bonaparte, un grand empressement à vous aller offrir l'expression de ma reconnaissance pour les constantes affections que vous avez eues pour moi, et de la manière infiniment prévenante avec laquelle vous avez accueilli les diverses demandes que j'ai cru pouvoir vous faire, si, par une délicatesse qui n'a pour objet que de ne rien faire qui puisse rappeler aux Maltais et ma personne et leur ancien attachement, je ne m'étais déterminé à éviter toute occasion de me montrer en public. Veuillez donc bien recevoir par écrit l'expression de ma sensibilité, mes adieux et mes voeux pour vous.

[ocr errors]

Désirant partir à l'heure la plus tranquille de la nuit, je vous prie, citoyen général, de donner les ordres nécessaires pour que les portes de la ville me soient ouvertes à deux heures du matin, et je me rendrai à bord, sous l'escorte de vos guides que vous avez eu l'attention de me destiner.

Recevez, citoyen général, l'hommage de ma haute estime et de mon sincère attachement. »

Il quitta l'île pour se rendre à Trieste, sous

TOME I.

-

GUERRE D'ÉGYPTE.

7

Bayerische
Staatsbibliothek

München

l'escorte de l'Arthémise qui portait Lavalette à Corfou.

Cependant, ce même homme, qui se montrait plein d'un respect aussi obséquieux pour le général français, s'était mis, quelques jours auparavant, sous la protection de la Russie, et Bonaparte envoya au Directoire, l'original du traité que l'ordre venait de conclure avec cette puissance. Il n'y avait que cinq jours qu'il était ratifié; et le courrier, le même que Bonaparte avait fait arrêter, deux ans auparavant à Ancône, n'était pas encore parti. « Ainsi, écrivait-il, l'empereur de Russie nous doit des remercîmens, puisque l'occupation de Malte épargne à son trésor 400,000 roubles. Nous avons mieux entendu que lui-même les intérêts de sa nation.

Cependant, si son but avait été de préparer les voies pour s'établir dans le port de Malte, Sa Majesté aurait dû, ce me semble, faire les choses un peu plus en secret, et ne pas mettre ses projets tant à découvert. Mais enfin, quoi qu'il en soit, nous avons, dans le centre de la Méditerranée, la place la plus forte de l'Europe, et il en coûtera cher à ceux qui nous en déloge

ront '. >>

Par ce traité, l'empereur Paul, prenant le titre de protecteur de l'ordre de Malte, approuvait l'établissement dans ses États d'un grand prieuré, en remplacement de celui qui avait existé en Pologne, et lui accordait, en compensation des re

Lettre de Bonaparte au Directoire, du 29 prairial.

venus qu'il y avait possédés, une fondation annuelle de 300,000 florins. L'empereur fondait de plus, dans ses États, en faveur de la noblesse grecque, un établissement qu'il dotait d'un revenu annuel de 200,000 roubles.

Avec l'original de ce traité, Bonaparte envoya au Directoire plusieurs vues de l'île de Malte, une galère en argent, modèle de la première galère qu'avait eue l'ordre de Rhodes, objet curieux par son ancienneté; un surtout de table venant de Chine, assez bien travaillé, qui servait au grandmaître, dans les grandes cérémonies.

A la suite du grand-maître, il fit déporter à Rome les consuls d'Angleterre et de Russie '. Un incident, quoiqu'étranger aux affaires de Malte, mérite de trouver ici sa place.

Après l'insurrection qui avait éclaté dans les troupes françaises, à Rome, contre le général Masséna, le Directoire avait manifesté l'intention de faire plutôt poursuivre les dilapidateurs qui avaient occasioné cette insurrection, que ceux qui s'en étaient rendus coupables. Bonaparte n'était pas homme à pactiser avec l'indiscipline, au moment surtout d'une expédition lointaine, au succès de laquelle l'obéissance passive du soldat était indispensable. Quelques-uns des promoteurs de l'insurrection de Rome se trouvaient dans son armée. Il écrivit au Directoire.

« Du moment que le convoi de Civita-Vecchia nous a joints, j'ai été instruit que les ordres que

[blocks in formation]

vous aviez donnés pour arrêter les instigateurs des troubles de Rome, n'avaient pas été exécutés, et que tous les officiers avaient donné leur parole d'honneur de ne pas souffrir leur arrestation; ce qui avait obligé le général Saint-Cyr à se relâcher de l'exécution de vos ordres. J'ai, sur-le-champ, fait arrêter quatre officiers du 7°. de hussards et quatre de la 61*., qui sont désignés par les chefs comme les principaux meneurs. Je les ai destitués et renvoyés en France, comme indignes de servir dans les troupes de la République. N'ayant pas le temps de faire faire leur procès, j'ordonne qu'on les tienne au fort Lamalgue, jusqu'à ce qu'on ait reçu vos ordres '. »

Barraguay-d'Hilliers ne pouvant, à cause du mauvais état de sa santé, suivre l'expédition, Bonaparte le renvoya en France, sur la frégate la Sensible; le chargea de porter au Directoire le grand drapeau de l'ordre et ceux de plusieurs régimens, et lui rendit le témoignage qu'il s'était toujours conduit avec distinction à l'armée d'Italie, et fort bien acquitté des différentes missions qui lui avaient été confiées 2.

La Sensible fut prise par la frégate anglaise le Cheval Marin. Barraguay-d'Hilliers fut fait prisonnier avec le poëte Arnault, qui retournait aussi de Malte en France, et conduit à l'escadre de l'amiral Jervis, devant Cadix. Barraguay-d'Hilliers écrivit de cette ville au Directoire, pour obtenir

2

› Lettre du 29 prairial.

Lettre de Bonaparte au Directoire, du 30 prairial.

son échange. Relâché peu de temps après, sur parole, il apprit, en rentrant en France, qu'il avait été destitué, comme prévenu d'avoir empêché la Sensible de se défendre, pour sauver ce qu'il avait à bord. Il demanda à être jugé, et fut honorablement acquitté.

Le 28 (16 juin), l'escadre commença à sortir de Malte. Bonaparte y laissa le général Vaubois avec une garnison de quatre mille homines, et se renforça d'environ deux mille hommes de troupes maltaises. Le 1°, messidor (19 juin), l'escadre mit à la voile et cingla vers sa destination. Le 13(1. juillet), le Directoire, par un message, instruisit les conseils de la prise de Malte et des griefs qui l'avaient motivée. C'étaient les dispositions hostiles manifestées par le grand-maître contre la République; la permission accordée à l'Espagne et à l'Angleterre, et refusée à la France de recruter des matelots dans l'ile; la persécution des Français et des Maltais qui s'étaient montrés favorables à la cause française; un manifeste du grand-maître, du 10 octobre 1793, par lequel il fermait les ports de Malte aux bâtimens français, et déclarait qu'il ne pouvait, ne voulait, nị ne devait reconnaître la République.

Le 21 prairial de cette année même, ajoutait le Directoire, la demande faite par le commandant des forces françaises dans ces mers, d'obtenir la faculté de faire de l'eau dans les différens mouillages de l'île, a été refusée avec cette forme ironique: Que le grand-maître ne pouvait laisser entrer plus deux bâtimens de transport à la fois; cẹ

« ZurückWeiter »