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NAP.

Les ordres furent donnés pour Rochefort, où se trouvaient les frégates la Saale, et la Méduse, que le gouvernement avait fait armer pour transporter Napoléon aux États-Unis d'Amérique. Ceux qui avaient choisi pour destinée l'adversité de Napoléon, se pressèrent autour de lui. Leurs noms sont beaux à conserver. Ils sont devenus inséparables de celui de Napoléon. Ce sont les comtes Bertrand, Montholon, avec leurs familles, Las-Cases et son fils, le baron Gourgaud. Tout fut prêt pour le départ. Le 29 juin Napoléon avait opposé une sorte de stoïcisme aux adieux déchirans, aux souvenirs plus déchirans encore de la Malmaison; mais à cinq heures du soir, il sentit qu'il était temps de s'arracher aux autres et à lui-même, et il se jeta dans la première voiture qui se trouva. C'était une voiture de suite. La sienne fut occupée par ses officiers.

voulut

Arrivé à Rambouillet, et c'était la dernière séduction du trône qu'il venait de perdre, Napoléon la nuit au château. passer Son projet avait été cependant de gagner Rochefort sans s'arrêter; mais il s'y arrêta jusqu'à 11 heures du matin du jour suivant, où il reçut un courrier de Paris, par lequel on lui annonçait qu'il ne devait plus espérer son rappel à la tête de l'armée. Jusque-là, Napoléon s'y était encore attendu! Immédiatement après, il partit après avoir donné des ordres pour qu'une partie du mobilier lui fût envoyée. Arrivé à Niort, il y trouva un triomphe populaire. Sa

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pressé de m'éloigner...; que je » pourrais encore, au nom de la na»tion, exercer une grande influen»ce en appuyant les négociations » par une armée, à laquelle mon »> nom aurait servi de point de >> ralliement.... Nous espérons que l'ennemi vous donnera le temps » de couvrir Paris, et de voir l'issue » des négociations: Si dans cette » situation la croisière anglaise ar»rète le départ de l'empereur, vous

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» POUVEZ DISPOSER DE LUI COMME

» SOLDAT. » Napoléon mendiait la une aumône, gloire comme sans laquelle il ne pouvait plus vivre. Il ne faut pas chercher de la philosophie dans ce caractère. Il n'y avait pas de place pour elle. Le malheur ne lui convenait point. Le péril, au contraire, lui souriait, parce qu'il ne faut que de la force pour le surmonter. Tant qu'il n'y avait qu'à combattre, Napoléon était sûr de Ini; mais il n'avait plus qu'à souffrir!

Enfin il arriva à Rochefort, où il trouva les issues de la mer occupées par l'ennemi : la veille encore elles étaient libres. Ainsi la fuite elle-même, devenue tout

à-coup sa plus chère espérance,
allait aussi lui être refusée!...

Ce qui s'est passé à Paris de-
puis le séjour de Napoléon à la
Malmaison et depuis son départ,
n'appartient plus à son histoire.
Le 8 juillet, jour où Louis XVIII
faisait sa rentrée dans la capitale,
Napoléon monta à bord de la fré-
gate la Saale, et aborda le lende-
main à l'île d'Aix. Son habitude
le suivit encore dans cette premiè-
re station de son exil. Il visita
les ouvrages, fit mettre la garni-
son sous les armes, et y fut en-
core empereur. Le 10, la croisiè-
re anglaise empêcha d'appareil-
ler. Le 11, il chargea le comte de
Las-Cases d'aller demander à l'a-
miral anglais s'il lui permettrait
de suivre sa route pour l'Améri-
que. L'amiral répondit qu'il n'a-
vait aucune instruction à cet é-
gard, mais qu'il recevrait Napoléon
à son bord, et le conduirait en
Angleterre s'il le désirait. Mécon-
tent de cette réponse, Napoléon
tenta divers moyens de s'échap-
per, et il dut bien alors regret-
ier de n'avoir pas profité du na-
vire américain que le duc De-
crès lui avait proposé à la Mal-
maison. Cependant il fit encore
la même faute; car ayant appris
qu'un navire de cette nation é-
tait à l'embouchure de la Giron-
de, il envoya parler au capitai-
ne, qui se mit lui et son bâ-
timent à sa disposition; mais il
était de sa destinée d'être le captif
de l'Angleterre et le proscrit de
la France, après avoir été la ter-
reur de l'une et l'idole de l'autre.
Une faiblesse pardonnable sans
doute à l'excès de sa misère lui

NAP

fit embrasser le seul parti qu'il ne devait pas prendre, et il céda aux conseils qui lui furent donnés dans son intérieur de se livrer à la génésosité anglaise, et de lui demander l'hospitalité sous le nom du général Duroc. Le 14, il fit prévenir l'amiral anglais de son dessein. Le 15, il se rendit à son bord. Le général Becker le suivit; mais au moment d'aborder le vaisseau anglais, Napoléon lui dit ces belles paroles:

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Retirez-vous, général, je ne » qu'un Français soit venu me li» veux pas qu'on puisse croire dans toute l'histoire aucun grand » vrer à mes ennemis. » Il n'existe caractère qui n'eût été jaloux de cette noble et généreuse pensée. Napoléon n'avait pas d'autre consolation que sa propre grandeur. Son naturel le portait moins à s'élever au-dessus de ses maux qu'au-dessus de ceux qui les causaient. Ce fut dans ce sentiment, qu'il avait écrit de Rochefort au prince-régent d'Angleterre la let général Gourgaud. tre suivante, dont il chargea le

« Altesse royale,

»sent mon pays et à l'ininitié des » En butte aux factions qui divi» plus grandes puissances de l'Eu»politique, et je viens comme »rope, j'ai terminé ma carrière »du peuple britannique. Je me » Thémistocle, m'asseoir au foyer »mets sous la protection de ses lois, que je réclame de V. A. R. » comme du plus puissant, du plus >> constant et du plus généreux de » mes ennemis. »

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Rochefort, 13 juillet 1815.

La coalition se, chargea de la réponse du prince-régent. Napoléon apprit dans la rade de Plymouth qu'il était prisonnier de guerre, et qu'il serait renfermé à Sainte-Hélène! Il protesta en ces termes : « Je proteste solen>>nellement ici, à la face du » ciel et des hommes, contre la » violence qui m'est faite, con»tre la violation de mes droits » les plus sacrés, en disposant par la force de ma personne et de >> ma liberté. Je suis venu libre»ment à bord du Bellerophon. Je »> ne suis pas prisonnier, je suis D l'hôte de l'Angleterre. J'y suis » venu à l'instigation même du » capitaine, qui a dit avoir des » ordres du gouvernement de me >> recevoir et de me conduire en » Angleterre avec ma suite, si ce»>la m'était agréable. Je me suis » présenté de bonne foi, pour ve»nir me mettre sous la protec» tion des lois d'Angleterre. Aus» tôt assis à bord du Bellerophon, »je fus sur le foyer du peuple britannique. Si le gouvernement >> en donnant des ordres au capitai»ne du Bellerophon, de me rece>> voir ainsi que ma suite, n'a vou>> lu que me tendre une embûche, »il a forfait à l'honneur et flétri » son pavillon. Si cet acte se con

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sommait, ce serait en vain que »les Anglais voudraient parler » désormais de leur loyauté, de >> leurs lois et de leur liberté. La >> foi britannique se trouvera per>> due dans l'hospitalité du Bellero» phon. J'en appelle à l'histoire. » Elle dira qu'un ennemi, qui fit » vingt ans la guerre au peuple an» glais, vint librement dans son in>> fortune chercher un asile sous ses

T. XIV.

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Cette protestation eut le sort de la lettre au prince-régent, et l'hospitalité du Bellerophon devint la captivité sur le Northumberland, où Napoléon fut transféré le 16. On mit à la voile. Les vents furent favorables à la vengeance des rois. Le 17, Napoléon passa en vue du cap La Hogue et fit ces adieux à la France :

Adieu, terre des braves! Adieu, » chère France! quelques traîtres » de moins et tu serais encore la »grande nation et la maîtresse »du monde !... »

Trois mois après, le 17 octobre, on lui fit apercevoir les rochers qu'il allait habiter. Le 18, il descendit, pour ne jamais la quitter, sur la terre meurtrière de SainteHélène!

1815, 1816, 1817, 1818,

1819, 1820, 1821. Ainsi finit Napoléon. L'histoire voudrait le suivre sur le rocher de Sainte-Hélène. Mais elle ne trouve pas de place dans l'humble habitation de Longwood pour y continuer le récit des dernières années de Napoléon Bonaparte. Repoussée par la tyrannie qui rétrécit chaque jour l'isolement du captif, elle n'a pu saisir que les

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plaintes de quelques compagnons dont l'affection a été arrachée à Napoléon. Elle a su que dans les intervalles des viles persécutions qui mesurèrent pendant près de six ans l'air, l'eau et la terre au maître du monde il a eu le courage de remplir à SainteHélène la promesse de l'île d'Elbe. « J'écrirai les grandes choses » que nous avons faites. » Jusqu'à ses derniers momens, tout a été inconnu à l'histoire. Elle n'a pu être admise qu'à son lit de mort. La victime ne pouvait plus échapper. La surveillance à la fin s'était endormie avec l'illustre captif. Elle a pu alors recueillir quelques anecdotes, quelques fragmens de cette grande vie, qui s'éteignait au sein des mers, après avoir éclairé le monde.

Trois mois avant la mort de Napoléon, une comète parut à SainteHélène; chacun s'empressa d'aller la voir et d'en parler à Napoléon, dont le silence ne fut reinarqué que par un seul de ses officiers, qui seul aussi ne lui avait point parlé de cette comète. « Vous » m'avez compris, vous, lui dit»il. » Napoléon, de qui un poète avait dit :

Les grands hommes sont tes aïeux,

avait songé à la comète qui parut avant la mort de Jules-César, et, selon lui, celle de Sainte-Hélène prophétisait sa fin. Une mélancolie héroïque accompagna ses derniers jours. « J'ai eu, dit-il » quelque temps après, un songe » dont l'image me poursuit. J'ai »vu Joséphine parée de gloire dans le efel. Ta place est ici, près de moi, m'a-t-elle dit. Dans un

inois tu seras heureux à jamais. » Si César, Alexandre et Charlemagne étaient ses aïeux. Ossian était son poète aussi-bien que Corneille. Il était trop épris de sa propre grandeur pour ne pas croire à l'immortalité de l'âme. I rendit l'hommage du chrétien à ce dogme consolateur. La veille de sa mort, et à l'insu de ses premiers officiers, l'autel se trouva dressé dans la pièce voisine de sa chambre mortuaire. Il reçut le viatique. Il avait tout ordonné lui-même sans passer par ses intermédiaires. Un simple valet de pied avait de sa part, et sous le sceau du secret, averti le chapepelain, et à l'heure indiquée, Napoléon se trouva seul avec le prêtre pour ne donner à cet acte de sa dernière abdication aucun témoin de sa fortune passée.

La maladie dont Napoléon est mort est la maladie de Sainte-Hélène. Il n'a pas été malade sept semaines comme le dit la dépêche du gouverneur sir Hudson Lowe. Il a été malade pendant cinq ans. La correspondance et fa relation de son chirurgien, le docteur O'Méara, ainsi que les rapports de son successeur, le docteur Stokoe, prouvent que Napoléon était déjà dangereusement malade en 1818. Au mois de juin de cette année, M. O'Méara demandait, en raison de l'état du patient, l'avis d'un autre médecin. L'expression si énergique de patient avait été proposée par le grand-maréchal Bertrand et acceptée par le gouverneur sir Hudson Lowe, en remplacement des qualifications d'empereur et de général, dont l'une était refu

sée par les Anglais et l'autre par soigner à Sainte-Hélène Napoléon, les Français.

Le 28 octobre 1818, le docteur O'Meara écrivit au secrétaire de l'amirauté la lettre suivante, qui d'après les lumières et la probité si reconnues de cet honorable chirurgien, est devenue un document historique de la plus haute importance. « Je pense que la vie de Napoléon Bonaparte est en dangers'il réside plus long-temps » dans un climat tel que celui de » Sainte-Hélène; surtout si les » périls de ce séjour sont aggravés par la continuité de ces contraariétés et de ces violations aux» quelles il a été jusqu'à présent » assujéti, et dont la nature de sa maladie le rend particulièrement susceptible d'étre affecté.

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O'MÉARA, dernier chirurgien de Napoléon.

Dans une lettre à S. S. le comte Bathurst, M. O'Meara écrivait en juin 1820:

n

«V. S. me rendra la justice » de se rappeler que la crise actuel»lement arrivée a été prédite par » moi, et officiellement annoncée »à l'amirauté à mon retour de » Sainte-Hélène en 1818. Un >>temps bien court a trop malheu»reusement justifié une opinion » que le simple bon sens suffisait » pour faire prononcer, et que la probité la plus ordinaire obligeait » de divulguer. Cette opinion était » que la mort prématurée de Napoléon était aussi certaine, sinon » aussi prochaine, si le même traite»ment était continue à son égard, » que si on l'avait livré au bourreau. » Le digne M. O'Meara sollicitait par la inême lettre de retourner

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dout il avait pendant trois ans étudié la constitution. Il demandait à partir gratuitement et même à résider à ses frais auprès du patient. Lord Barhurst refusa. Napoléon mourut,

Le gouvernement anglais était suffisamment instruit de l'état mortel où était son captif, par une lettre pressante du comte Bertrand à lord Liverpool, sous la date du 2 septembre 1820, trois mois après celle du bon docteur O'Meara. Le 17 mars 1821, le comte de Montholon écrivait à la princesse Borghèse, « que la mala

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die de foie dont Napoléon était »attaqué depuis plusieurs années, et qui est endémique et mortelle à » Sainte-Hélène, avait fait depuis » six mois des progrès effrayans;

qu'il ne pouvait marcher dans » son appartement sans être soute»nu.... A sa maladie de foie se »joint une autre maladie égale

ment endémique dans cette île. » Les intestins sont gravement atta»qués.... M. le comte Bertrand a écrit au mois de septembre à » lord Liverpool, pour demander que l'empereur soit changé de climat, et lui faire connaître le » besoin qu'il a des eaux minérales. » Le gouverneur sir Hudson Lowe

s'est refusé à faire passer cette let»tre à son gouvernement sous le vain prétexte que le titre d'empereur »y était donné à sa Majesté. L'em»pereur compte sur V. A. pour >> faire connaître à des Anglais in»fluens l'état véritable de sa maladie. Il meurt sans secours sur >> cet affreux rocher. Son agonie » est effroyable. - Le 11 juillet 1821, la princesse Borghèse e

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