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en sa qualité de major-général, de contresigner les décrets, ne doit pas être passé sous silence.

Le 12 mars 1815, Napoléon reprenait la route du pouvoir avec la même pensée, la même volonté,qui lui avaient fait rompre à Châtillon, et même à Prague, les négociations de la paix, qui l'avaient porté à se faire empereur, consul à vie, premier consul, à détruire au 18 brumaire la représentation nationale par la force, à concevoir le projet de conquérir l'Asie à Saint-Jean d'Acre, et la France à Aboukir, à être déjà à sa première entrée à Milan le maître de l'armée de la république, et le souverain de ses conquêtes, et enfin à faire la paix à Léoben sans l'aveu de son gouvernement. Pour arriver à la domination, Napoléon était tout d'une pièce, si on peut le dire, il n'agissait qu'avec un seal moyen. Il séduisait et fanatisait le peuple et les soldats, proclamait son pouvoir en leur nom, restait seul, tout seul hors de l'égalité, traduisait la liberté légale par l'indépendance politique, donnait la législature à un conseild'état, ajoutait la police au code civil, ne concevait la responsabilité des ministres qu'envers lui seul, et couvrait de trophées le joug sous lequel la nation décimée criait: Vive l'empereur ! Dans une telle combinaison, qui fut invariable, aucune aristocratie, ni parlementaire, ni nobiliaire, ni ministérielle, ne pouvait exister. Par conséquent les élémens de la moindre résistance étaient inconnus. Il y avait égalité uiverselle devant celui qui tenait le sceptre;

le grand empire présentait deux êtres complets dans leur condition, le sujet et le maître. C'était une grande fatalité, mais sans laquelle Napoléon ne pouvait exister. Il en était dominé lui-même, et il y succomba deux fois. Les décrets de Lyon ne furent que les échos du passé. La tendre popularité de ses adieux aux habitans de cette importante cité les livrait comme de nouveaux oracles à l'ivresse de la multitude.

« Lyonnais, leur dit-il le 13 mars, au moment de quitter vo»tre ville pour me rendre dans MA capitale, j'éprouve le besoin de >> vous faire connaître les senti>>mens que vous m'avez inspirés. » Vous avez toujours été au premier »rang dans mes affections. Sur le »trône ou dans l'exil vous m'avez >> toujours montré les mêmes sen>> timens; le caractère élevé qui » vous distingue, vous a mérité » toute mon estime. Dans des mo>> mens plus tranquilles, je revien

drai pour m'occuper de vos ma»nufactures et de votre ville. Lyonnais, je vous aime. » Et les cris de vive la nation! vive l'empereur! accueillirent tumultueusement les adieux de Napoléon.

La veille de son départ Napoléon apprit que le maréchal Ney avait un commandement. Il chargea le général Bertrand de lui écrire ce qui venait de se passer, et de lui dire qu'il serait responsable de la guerre civile. «Flattez»le, mais ne le caressez pas trop; il croirait que je le crains et se fe»rait prier. »

Le 13, Napoléon coucha à Châlons, où il reçut un envoyé de

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Paris. Il apprit que la garde nationale était disposée à défendre le roi, et que le roi avait déclaré qu'il ne quitterait point les Tuileries.... J'en doute fort, dit Napoléon, quand je serai à 20 lieues » de Paris, les émigrés l'abandon>> neront comme les nobles de Lyon » ont abandonné le comte d'Artois. La garde nationale crie de »loin; quand je serai aux barriè»res, elle se taira; son métier » n'est pas de faire la guerre civi»le. Retournez à Paris; dites à >> mes amis de ne point se compromettre, et que dans dix jours »>ines grenadiers seront de garde » aux Tuileries. »

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Le 14, Napoléon arriva à Châlons. Le maire ne parut point; on l'envoya sermoner par un affidé, auquel il objecta son serment au rai, et l'abdication. Cependant il se rendit aux raisons qui combattirent son opinion, et le lendemain il fut destitué. Cette anecdote du voyage de Napoléon dut prouver que le temps même de la réflexion n'était plus accordé dès le 14 avril pour se soumettre et redevenir son sujet, tant à l'insu de la nation il avait fait de chemin vers le pouvoir absolu, tout en marchant à journées d'étapes sur la capitale encore occupée par le roi, et défendue par des armées qu'il allait rencontrer. Le lendemain, il reçut l'ordre du jour du maréchal Ney du quartier-général de Lons-le-Saulnier. Soldats, disait le maréchal, je vous ai souvent menés à la victoire, maintenant je vais vous conduire à celte phalange immortelle que l'empereur Napoléon conduit à Paris, el qui y sera sous peu de jours; Vi

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ve l'empereur! L'exemple du maréchal Ney donnait le reste de l'armée à Napoléon. Le 18, Napoléon l'embrassa à Auxerre. «Quels gé»néraux avez-vous avec vous? jui » dit Napoléon. Lecourbe et Bourmont. En êtes-vous sûr? >> -De Lecourbe oui, sire, mais » moins de Bourmont. -Ne crai»gnez-vous pas que Bourmont ne remue?-Non, sire; d'ailleurs il »> ne trouverait personne pour le » seconder. N'importe, je ne » veux point lui laisser la possibi»lité de nous inquiéter. Vous or» donnerez qu'on s'assure de lui »jusqu'à notre entrée à Paris. J'y » serai du 20 au 25, et plus tôt :... »je ne voudrais pas qu'une tache » de sang souillât mon retour...” Le soir, Napoléon fit embarquer une partie de son armée. Malgré les avis qu'il recevait, soit par les correspondances interceptées, soit autrement, des projets sinistres tramés contre ses jours, il se perdait lui-même dans la foule qui se pressait autour de lui à Auxerre, et il popularisait ainsi sa propre confiance. Cependant l'ordonnance royale du 6 mars portait : « Napoléon Bonaparte est déclaré traitre et rebelle pour s'être introduit à main armée dans le département du Var. Il est enjoint à tous les gouverneurs, commandans de la force armée, gardes nationales, autorités civiles, et même aux simples citoyens, de lui courir sus, de l'arrêter et de le traduire incontinent devant un conseil de guerre, qui, après avoir reconnu l'identite, provoquera contre lui l'application des peines portées par la

loi.»

Les autres articles appliquaient

les mêmes dispositions à toutes les autorités et tous les individus civils et militaires qui auraient pris part à l'entreprise de Napoléon. Il était donc autorisé, soit à craindre pour ses jours, soit à croire à des vengeances contre les royalistes de la part de ceux qui, se déclarant ses partisans, mettraient ainsi leur vie en danger. Il ne s'arrêta toutefois qu'à cette dernière inquiétude, et il écrivait à un général : « On m'assure que » vos troupes, connaissant les dé»crets de Paris, ont résolu par représailles de faire main-basse » sur les royalistes qu'elles rencon>>treront Vous ne rencontrerez » que des Français. Je vous dé»fends de tirer un seul coup de » fusil... Dites à vos soldats que je »> ne voudrais pas entrer dans ma » capitale à leur tête, si leurs ar»mes étaient teintes du sang fran»çais. » Les troupes que Napoléon rencontra sur sa route vinrent à lui et prirent rang dans son armée..

Tandis que Napoléon marche sur Paris à la tête d'une armée française, que la stupeur et l'enthousiasme improvisent sur sa route, le congrès de Vienne renouvelait le 13 mars l'ordonnance royale du 6, et publiait la déclaration suivante.

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sentimens que cet événement >> leur a fait éprouver. En rompant ainsi la convention qui l'avait »établi à l'île d'Elbe, Bonaparte détruit le seul titre légal, auquel » son existence se trouvait atla>> chée. En reparaissant en France » avec des projets de troubles et » de bouleversemens, il s'est privé »> lui-même de la protection des »lois, et a manifesté à la face de l'univers, qu'il ne saurait y avoir »ni paix ni trève avec lui. Les »puissances déclarent en consé»quence, que Napoléon Bonapar»te s'est placé hors des relations » civiles et sociales; et que, com» me ennemi et perturbateur du » repos du monde, il s'est livré à »la vindicte publique; elles décla

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rent en même temps que ferme»ment résolues de maintenir in»tacts le traité de Paris du 30 mai 1814, et les dispositions sanction»nées par ce traité, et celles qu'el»les ont arrêtées ou qu'elles arrêteront encore pour le compléter Det le consolider; elles emploie»ront tous les moyens et réuniront >> tous leurs efforts pour que la paix générale, objet des voeux de l'En»rope, ce vou constant de leurs » travaux, ne soit pas troublée de »> nouveau, et pour la garantir de >> tout attentat qui menacerait de replonger les peuples dans les » désordres et les malheurs des ré»volutions; et, quoique intime»ment persuadés que la France » entière se ralliant autour de son » souverain légitime fera inces»samment rentrer dans le néant » cette dernière tentative d'un dé»lire criminel et impuissant, tous » les souverains de l'Europe, ani

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més des mêmes sentimens et

guidés par les mêmes principes, » déclarent que si, contre tout cal>> cul, il pouvait résulter de cet é» vénement un danger réel quel» conque, ils seraient prêts à don>>ner au roi de France et à la na>>tion française, ou à tout autre gouvernement attaqué, dès que la » demande en serait formée, les » secours nécessaires pour rétablir » la tranquillité publique et à faire » cause commune contre tous ceux » qui entreprendraient de la com>> promettre. Cette déclaration rendue publique était signée par les plénipotentiaires d'Autriche, d'Espagne, de France, de la Grande-Bretagne, du Portugal, de la Prusse, de la Russie et de la Suède. Ainsi Napoléon qui, après Moskou, était rentré en Allemagne entre deux défections, celle du général York et du prince Schwarzenberg, qui avait perdu la bataille de Léipsick par celle des Saxons et des Bavarois, qui avait dû, en 1814, sa ruine totale à deux autres défections, celles des maréchaux Augereau et Marmont, allait rentrer à Paris et marchait en France entre deux proscriptions.

Ce manifestè, cet arrêt commun de toutes les puissances, devint pour elles un nouveau lien. La nécessité réunit subitement ceux que l'intérêt avait déjà divisés. L'entreprise trop prématurée de Napoléon resserra le faisceau des cabinets, qui allait, disaiton, se briser. On parlait d'une convention secrète, qui unissait déjà l'Angleterre, l'Autriche, et la France avec toutes les vastes dépendances de leurs alliés et des trônes de famille, contre la Russie et la Prusse. L'apparition de l'en

nemi commun, la peur historique de Napoléon, rapprochèrent soudain les politiques de Vienne, effrayés du murmure des âmes que l'on s'était partagées. Un nouveau pacte, qui depuis s'est appelé SAINTE-ALLIANCE, naquit de cette perplexité des cabinets. Si Napoléon s'est reproché d'être descendu trop tôt en France, lui seul aussi a pu s'en justifier, en alléguant que le congrès avait résolu son enlèvement de l'île d'Elbe, et sa déportation à Sainte-Hélène. Alors son entreprise n'a été que l'effet d'une résolution, dont son salut personnel était le seul objet.

Le 20 mars, à minuit, le roi part du château des Tuileries. A 4 heures du matin Napoléon arrive à Fontainebleau: il revoit, sans émotion apparente, ce théâtre de son abdication, qu'il ne regarde plus que comme une anecdote rayée de sa vie, et qu'il se promet bien de faire oublier. A 9 heures du soir, il est à Paris. La foule le porte dans les escaliers du palais, jusque dans la salle des Marechaux. Mais, jusqu'aux Tuileries, il a traversé une population presque silencieuse, en comparaison de la joie triomphale qui l'a accueilli sur sa route depuis Lyon jusqu'à Paris. On a avancé que œ n'était point incognito ni la nuit qu'il devait rentrer dans la capitale. Cet homme si confiant pendant les périls de son voyage, si habile à saisir la faveur du peuple, à interprêter la fortune, si intelligent sur ses intérêts, si fort de sa propre valeur contre la malveillance elle-même, aurait-il une fois, et dans une circonstance aus

si importante, désespéré de son empire sur la multitude et sur lui? Non, sans doute, et quoiqu'on l'ait répété, Napoléon ne manqua point son entrée dans la capitale. Il eut une grande raison pour y arriver le 20 à la nuit, au lieu du 21 en plein jour. On apprenait en France 24 heures plus tôt la nouvelle de son succès; et ce succès n'était prouvé que par l'arrivée à Paris. Par cela seul, il en imposait à ses ennemis,qui auraient eu un jour de plus pour travailler les troupes nombreuses qui étaient dans la capitale, et dont les chefs dévoués à la cour disposaient exclusivement. Personne mieux que Napoléon, et notamment dans une telle circonstance, ne connaissait le prix du temps et son emploi. Il surprit donc le 20, à 9 heures du soir, la fidélité des casernes qu'il aurait peut-être eue à combattre le lendemain. Le lendemain, il était déjà établi; il régnait. Les grenadiers de l'île d'Elbe, les généraux Drouot, Bertrand, Cambronne, n'étaient plus au palais que les trophées d'une victoire, qui avait duré 20 jours, et dont Paris était le repos...... et le terme!...

Cependant les paroles de Napoléon étaient toutes populaires. Le jour et le lendemain de son arrivée, et en présence des ancieunes puissances et des voltigeurs de sa cour, de ceux surtout qui n'avaient presque pas quitté le palais depuis son départ, il affectait de dire: «Ce » sont les gens désintéressés qui

» m'ont ramené à Paris : ce sont les » sous-lieutenans et les soldats qui sont tout fait c'est au peuple,

»c'est à l'armée que je dois tout. »

Le 21 mars, Napoléon, qui malgré sa nouveaute avait la routine des rois, rappelle presque tout son ministère. Il n'y eut de nouveaux choix que celui du comte Carnot, à qui il donna l'intérieur pour populariser son gouvernement, et du prince d'Ekmühl, qui fut nommé à la guerre, à cause de sa belle défense de Hambourg. Ce dernier choix fut aussi peu populaire que celui du duc Decrès, rappelé à la marine, et que celui du duc d'Otrante, rappelé à la police. Il n'en fut pas de même du duc de Gaëte et du comte Mollien, à qui les finances et le trésor forent rendus. Il y avait un portefeuille nécessairement vide, depuis la déclaration du congrès européen à Vienne, c'était celui des affaires étrangères; le duc de Vicence le refusa. Mais Napoléon, à qui une voix intègre était utile dans son conseil, revint à la charge, et le duc de Vicence accepta le 23. La secrétairerie d'état revenait de droit à l'inaltérable dévouement du duc de Bassano. Tel fut le ministère; sa composition devait déplaire il était loin de présenter à l'opinion, aux périls, aux intérêts, aux besoins du moment, une garantie compacte, une solidarité morale, telle que la nation avait le droit de l'exiger et de l'attendre de Napoléon, qu'elle avait accueilli, mais qu'elle n'avait point rappelé. Le commandement général de la gendarmerie fut donné au duc de Rovigo, ex-ministre de la police, ancien aide-de-camp de l'empereur. M. de Montalivet, ex-ministre de l'intérieur, fut intendant de la liste civile. M. Molé, qui avait re

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