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nèrent leurs efforts sur d'autres points de l'île, commençant à s'apercevoir qu'ils pourraient nous disputer plus ou moins longtemps notre possession, mais, qu'en définitive, elle ne deviendrait pas pour eux un second New- Foundland. Nous retrouvons ensuite Vedel en Italie, lors des magnifiques campagnes de 1796 et 97, qui changent tout l'aspect de l'échiquier politique de l'Europe. Il y déploya sa vaillanee et son intelligence accoutumées au passage du Pô, à celui de l'Adda, aux deux affaires de Lonado et de Salo. De plus, il fut chargé de plusieurs missions importantes: à lui seul incomba, preuve de la confiance qu'avait en lui l'illustre général en chef, la tâche d'aller en Tyrol, à la recherche de la division Augereau. Cela ne se pouvait qu'en s'enfonçant à l'intérieur de la partie orientale de la province, et après avoir, ou forcé le passage, ou passé à la sourdine entre des colonnes autrichiennes. Les circonstances l'amenèrent au premier parti. Un gros détachemént d'Autrichiens voulut lui barrer le passage; infanterie et cavalerie furent culbutées en peu d'instants; il enleva de plus leur poste de réserve, et de tous les antagonistes, 400 restèrent prisonniers de guerre en ses mains. Poussant plus loin après ce succès, il arbora le drapeau français à Feltre, puis sur les murs d'Udine, où nul n'avait encore pénétré. La division Augereau, à laquelle il s'était ainsi mis à même de donner la main, ayant débouché du Tyrol, il se rabattit sur le gros de l'armée. On sait quels événements suivirent tant de hauts faits d'armes, dont, il est aisé de le voir, Vedel eut une bonne part. Les préliminaires de

Campo-Formio donnèrent d'abord l'espoir de la paix; puis, à peine Bonaparte parti, Bonaparte en Egypte, l'Autriche fit massacrer les plénipotentiaires français, et la guerre recommença. Le 11 septembre 1798, il opérait sur Sanguinetto, n'ayant avec lui que vingtcinq chasseurs à cheval, une diversion favorable au mouvement général de l'armée, et il atteignait ce village après avoir, avec des forces numériquement si faibles, combattu trois escadrons échelonnés sur la route. La bataille de Rivoli suivit bientôt. Vedel y commanda l'artillerie de la septième demi-brigade légère, et, par ses manœuvres hardies et savantes, il s'empara de la chapelle San-Marco, poste important, clef de position, dont le général autrichien sentità l'instant combien la perte était grave pour ses plans, mais dont en vain il essaya de se remettre en possession. Toutes ses attaques échouèrent contre la solidité de la défense; Vedel était partout, donnant, variant, proportionnant les ordres selon les circonstances; il fut atteint grièvement, mais, nous l'avons dit, il maintint sa position. C'était sa première blessure, mais ce ne fut pas la seule dont il put s'honorer dans cette campagne. Chargé, quelque temps après la grande journée de Rivoli, d'aller, à la tête des grenadiers de la division Grenier, attaquer les retranchements autrichiens, à la gauche de Bussolengo, il déploya, dans l'exécution de cet ordre, l'entrain le plus vif, la valeur la plus opiniâtre et, par sa vigueur décisive comme par l'intelligence de tous ses mouvements, il mérita d'être mentionné dans l'ordre du jour de l'armée en revanche, balles et boulets l'avaient tou

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ché; son cheval avait été tué sous lui, lui-même avait une jambe cassée, et il fut laissé des heures pour mort sur le champ de bataille. On le releva cependant, et le grade de chef de demi-brigade (tel était alors le titre officiel) fut la récompense du dévouement et du courage qu'il venait de faire éclater. Ici se termine, en quelque sorte, la première partie de la carrière militaire de Vedel. Le voilà colonel; huit ans se sont passés depuis qu'il a reçu son brevet de lieutenant; huit autres années (de 1799 à 1807) vont le porter au grade de général de division. Pendant les premiers mois de 1799, il est encore en Italie, avec l'armée d'Italie. Un peu plus tard, il passe avec sa demi-brigade à l'armée des Grisons, dont les mouvements se lient toujours à ceux de l'armée d'Italie, mais qui n'en forment pas moins, pour le moment, un corps à part. Les événement marchent, le général en chef d'Egypte a fait sa réapparition en Europe, Paris a vu le 148 brumaire et l'Italie avec Marengo. Vedel, le 10 novembre 1800, est un des quatre cents hommes d'élite qui, sous les ordes du général de brigade Veaux, marchent sur les redoutes autrichiennes au mont Tonal, et défendent les passages de Val-di-Sole. Après l'inexécution de la clause du traité d'Amiens, par laquelle le cabinet de Saint-James avait promis de rendre Malte à la France, et, quand les Angiais ne plaisantaient que du bout des lèvres des plans de descente en Angleterre, il fit partie du camp de Boulogne, et il n'eût pas été des moins charmés de renouer connaissance, en leur île, avec les habits rouges qu'il avait canonnés dans l'île de Corse. Le

destin en ordonna autrement. Les insulaires, moyennant banknotes et livres sterling, détournèrent l'orage sur d'autres bords, et déterminèrent les naïves têtes fortes de Schoenbrunn, à tirer pour eux les marrons du feu. L'Autriche, pour la troisième fois depuis treize ans, déclara la guerre à la France. Comme nous ne nous étions encore avancés (en 1797 et en 1800) qu'à quelque vingt lieues de Vienne, l'héritier des Habsbourg tenait apparemment à ce que les hussards français lui rendissent visite dans la capitale. Vedel, sitôt que les hostilités devinrent inévitables, fut compris dans le cinquième corps d'armée que commandait Launes. Il eut part à la prise d'Ulm; c'est lui qui s'empara des redoutes avancées, parmi lesquelles, notamment, celle de Frauensberg était un point d'extrême importance pour le succès de la journée. Ce succès, il est vrai, il faillit le compromettre en voulant le pousser trop loin, sans assez tenir compte des circonstances. Voyant les défenseurs de la redoute opérer la retraite, il lança ses artilleurs; en changeant la retraite en déroute, ceux-ci purent, avec les fuyards, franchir les portes de la place, et, secondés par les tirailleurs du 51 de ligne, faire douze cents prisonniers, qu'on désarma sur-le-champ et dont les armes furent disposées sur place en faisceaux. Tout cela eût été fort bien si les bastions n'eussent pas encore contenu de sept à huit mille hommes, ou si du gros de l'armée on fût venu donner appui aux quatre cents de Vedel et aux quelques tirailleurs, ses compagnons de péril. Il n'en fut rien. Il en résulta que, ne voyant rien venir et protégés, virtuellement du moins,

par les nombreux camarades dont il vient d'être parlé, les prisonniers revinrent bientôt de leur stupéfaction, se comptèrent, et soudain, tombant sur leurs armes qu'ils avaient à deux pas d'eux, recommencèrent la lutte avec l'avantage du nombre et l'assurance d'un prompt renfort au cas où le besoin s'en ferait sentir. Cerné de toutes parts, Vedel resta prisonnier. Heureusement il fut, au bout de quelques jours, compris dans un cartel d'échanges, et il ne tarda pas à coopérer derechef à l'exécution des grands plans de l'empereur. Le 30 novembre (trois jours donc avant Austerlitz), il tint seul avec son régiment la campagne en présence de toute l'armée russe, qui venait s'adjoindre aux Autrichiens. Le jour même de la grande bataille, il fut chargé d'aller se poster à Santon, point singulier de la ligne stratégique, où il devait servir de pivot à la gauche de l'armée. Il eut, soit pour en prendre possession, soit pour s'y maintenir, une force de cinq à six mille Russes à contenir. Il fit mieux, il les repoussa, et l'empereur fut si charmé de la façon dont il s'était acquitté de sa tâche, qu'il le nomma général de brigade. C'est en cette qualité que nous allons le voir à présent porter deux ans les armes contre la monarchie prussienne. Pendant la campagne au sein des provinces allemandes, il a part à la bataille de Saalfeld; le 10 octobre 1806, il se signale dans les plaines d'Iéna. L'empereur, en ce jour où la lutte devient capitale, a voulu retenir sous ses ordres immédiats et comme partie de sa réserve la brigade de Vedel, en attendant que sa garde arrive conduite par Lefebvre, et, quand cette

dernière est là, Vedel, par ses ordres, va renforcer successivement plusieurs points, ou menacés, ou trop peu garnis dans les commencements; Vedel enlève plusieurs positions à la droite de l'ennemi, lui fait nombre de prisonniers et le poursuit au galop jusqu'aux portes de Weimar. Le 26 décembre suivant, à l'affaire si chaude de Pultusk, l'a-propos, la prestesse, la multiplicité des attaques signalent de même la brigade Vedel, qui, lancée par son chef, exécute plusieurs charges brillantes, enfonce les deux premières lignes russes et finit par rester maîtresse d'une batterie de 12 canons. Ce ne fut pas sans payer son succès de quelques. pertes: Vedel lui-même fut atteint de deux blessures, l'une au genou gauche, en dépit de laquelle il continua de donner ses ordres avec la même sérénité, toujours sur le champ de bataille, l'autre par un coup de biscaïen, qui le renversa sur le sol : heureusement la fusillade et la canonnade allaient faiblissant; la victoire avait prononcé, comme d'habitude, en faveur des Français. Cette fois d'ailleurs il ne fut pas laissé pour mort parmi les cadavres, et sa guérison, marcha vite. . ., moins vite pourtant qu'un nouvel appel du maître à sa capacité toujours en haleine. Il fut nommé gouverneur de Nogat et de la place de Marienbourg, ce qui, vu les circonstances et l'imminence d'hostilités nouvelles, n'était rien moins qu'une sinécure. Grâce à des mesures habilement combinées, il sut en peu de temps relever les fortifications de la place et pourvoir à l'approvisionnement de l'armée cantonnée aux environs après la journée d'Eylau; -de telle sorte que, n'eût-il rien fait de plus, san

exagération aucune, il peut être affirmé que son concours pendant la campagne au sein des provinces slaves (1807) ne fut guère moins utile à la cause commune qu'en 1806. Mais à ces opérations d'administrateur ne se bornèrent pas ses services en cette mémorable année. Relayé à Marienbourg, où, dorénavant, l'essentiel étant accompli, les difficultés étaient devenues minimes, il reprit un commandement actif et fut chargé d'organiser et commander par intérim la seconde division du corps de réserve qu'avait sous ses ordres le maréchal Lannes. On le vit, à la bataille de Gustad, poursuivre les Russes à la tête de cette division, dont toutefois il dut bientôt abandonner le commandement au général Verdier, venu de Naples, mais en conservant celui de sa brigade, qui comprenait le 3 de ligne et le 12 léger. Le 11 juin, un beau fait d'armes le recommanda de nouveau à la faveur impériale: un ordre lui vient, le 10, à dix heures du soir, d'après lequel il faut qu'il chasse les Russes de leurs redoutes, où tout le jour ils ont tenu contre toutes les attaques; il part au plus vite, se trouve le matin devant les redoutes, et, après un court intervalle de repos, procédant à l'attaque, il emporte, non sans peine, non sans perte, non sans deux blessures encore, mais enfin il emporte à la baïonnette toutes les lignes et tous les forts des Moskovites, qui, trop décimés pour tenir longtemps, prennent le parti d'évacuer Heilbourg. Ce mouvement et ce succès furent un des préliminaires de la décisive bataille de Friedland, qui, quatre jours après, acheva de dissoudre la puissance prussienne, et fit penser au

Tzar que mieux valait être l'ami que l'ennemi de la France, et qu'au moins il fallait feindre l'amitié, puisque le colosse ne pouvait tomber que par l'imprévu ou par la trahison. Vedel eut bonne part aussi de l'honneur de cette sanglante journée; chargé d'aller renforcer le centre, il fit plusieurs manœuvres décisives, il tint la ligne d'attaque depuis l'aurore jusqu'à onze heures du soir, et à diverses reprises il fut félicité par l'empereur en personne, dont l'oeil avait suivi tous ses mouvements. Nul, après cela, ne fut étonné de sa promotion au grade si bien mérité de général de division, et même l'on fut unanime à reconnaître qu'elle constituait en ce moment une distinction d'autant plus flatteuse, qu'à l'issue de cette seconde, si rapide et si terrifiante campagne contre les héritiers de Frédéric II, Napoléon fut loin d'en'être prodigue: deux officiers généraux seuls l'obtinrent, Ruffen et Vedel. Il reçut en nême temps les insignes de commandeur de la Légion d'honneur. Il avait été créé comte de l'Empire lors de l'institution des majorats. Voilà de tout point certes un commencement de superbe existence militaire, et nous n'avons encore traversé que deux périodes de la vie de Vedel, abstraction faite de ces premières années d'adolescence sur lesquelles il a fallu glisser. La troisième va tout changer de face. Mais, on le pressent, c'est ici que l'on court risque, lorsque l'on a pris parti d'avance, de se méprendre sur les faits en les déplaçant et en outrant le appréciations favorables ou contraires. Dépouillé, quant à nous, de toute idée préconçue, nous allons retracer des détails exacts, et nous

énoncerons ce qui nous semble en résulter incontestablement. Le traité de Tilsit avait rendu la paix à l'’Europe septentrionale et orientale; la grande armée s'était dissoute, Vedel était de retour en France. Mais à peine assoupie au delà de l'Oder, la guerre allait sévir au-delà des Pyrénées. Du Nord, où momentanément nos troupes n'avaient que peu de chose ou rien à faire, Vedel avait été avec sa division dirigé sur l'Espagne immédiatement après la fameuse entrevue de Bayonne (2 mai 1808), et il faisait partie du corps central, qui, sous Moncey et Murat, occupait la Nouvelle-Castille. Du 15 au 20 mai, ordre vint d'aller s'assurer du midi de l'Espagne, où tout était encore tranquille à la surface, bien que l'incendie fermentât dans les flancs du volcan, et de s'établir à Cadix, précaire asile des débris de notre flotte trahie par la fortune à Trafalgar. Trois divisions, sous un général de division faisant en quelque sorte les fonctions de commandant d'un corps d'armée, devaient former le noyau de la force d'opération à laquelle on comptait que, d'une part, viendraient se joindre au moins les trois régiments suisses échelonnés à Tortose, à Carthagène, à Malaga; que, de l'autre, Kellermann, de son quartier d'Elva, serait à même de prêter la main. C'est Dupont qui commandait ainsi : Vedel n'avait, sauf le cas de circonstances exceptionnelles, qu'à suivre ponctuellement des ordres donnés. Dupont partit en tête, n'emmenant que la division Barbou, laquelle, se composant de douze mille hommes au plus, surpassait en nombre, à elle seule, le total des deux autres, Vedel n'en comptait que six mille, et Frére,

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mier à quatre-vingts ou quatrevingt-dix kilomètres de Madrid, en deçà pourtant de la chaîne marianique (à Tolède), le second au nord de Vedel et tout près de la capitale. De quelque part que vint l'ordre et quel que pût en être le mérite au point de vue militaire, il est clair que Vedel ne pouvait qu'obéir. La disposition, d'ailleurs, eût été irrépréhensible, si la guerre qui se préparait eût été la guerre normale, si les insurrections ne se fussent à chaque heure succédé de proche en proche, et si les trois régiments suisses n'eussent non-seulement abandonné le drapeau français, mais passé à l'ennemi. Voilà ce dont il eût été à souhaiter que se fût douté, moins comme éventualité à toute force possible, soit Dupont, soit le haut état-major paradant à Madrid. Mais comme jamais, depuis quinze ou seize ans de guerre, pendant lesquels la France n'avait eu que des gouvernements et leurs troupes à combattre, rien d'analogue n'avait eu lieu et comme la dernière tentative avait été réprimée immédiatement, il ne venait à l'idée de personne, à Vedel pas plus qu'aux autres, que des rustres, des boutiquiers et des piliers de sacristie pussent attaquer les vainqueurs d'Austerlitz et d'Eylau. D'ailleurs, ce n'est pas à lui surtout qu'il incombait ici de prévoir. Nul ordre nouveau ne survenant de quelque part que ce fût, il resta près d'un mois immobile dans sa position, tandis qu'au delà des monts il eût par le fait seul de son

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