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l'eau jusqu'au ventre. Il y en eut même qui nagèrent. C'était, disait-on, l'endroit où Moïse passa avec les Israélites pour échapper à l'armée de Pharaon.

Après quelques heures de marche sur des sables mouvans, on atteignit les sources de Moïse situées à peu de distance de la mer. On trouva que l'eau de ces sources était légèrement saumatre, et néanmoins potable. En considérant les décombres d'anciennes fabriques et les vestiges de fondations d'aqueducs, de citernes, et d'une petite enceinte fortifiée, on ne put pas douter qu'il n'eût existé autrefois dans cet endroit, ainsi que l'avaient pensé différens voyageurs, un grand établissement d'aiguade qui pouvait appartenir au temps où les Vénitiens faisaient le commerce des Indes par la Mer-Rouge. Les sources étaient au nombre de six, et leurs eaux étaient contenues dans de grands réservoirs d'où elles étaient conduites par un aqueduc jusqu'au ri-. vage de la mer. Ce fut Bonaparte qui le découvrit, et, pour s'assurer de son état, il y fit faire des fouilles à des distances très - rapprochées, jusqu'à l'aiguade, et l'on reconnut qu'il était seulement encombré et susceptible d'être réparé à peu de frais. Il donna ses instructions pour en faire la topographie et le nivellement, et pour étudier tous les moyens de rendre ces sources utiles '.

On dit qu'à son arrivée sur la rive arabique,

Elles ont été décrites par Monge. Les bâtimens qui arrivent à Sucz et les habitans de la ville viennent y chercher de l'eau.

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Bonaparte reçut une députation des cénobites du Mont-Sinaï, qui venaient le remercier de la protection qu'il leur avait accordée par son arrêté du 29 frimaire, et le supplier de vouloir bien s'inscrire sur l'antique registre de leurs garanties; qu'il écrivit son nom à la suite de ceux d'Aly, de Saladin, d'Ibrahim et de quelques autres. Ce fait qui, d'ailleurs, paraît peu vraisemblable à cause de la distance du Kaire au Mont-Sinaï, et du peu de temps qui s'était écoulé entre l'arrêté du frimaire et le 7 nivôse,. est tout à fait inexact. On revint à Suez le même jour. Une partie de ceux qui avaient accompagné Bonaparte prit les devans pour contourner par terre la pointe du golfe. Le général en chef, pour abréger, voulut reprendre la route par laquelle il était venu. Il faisait nuit quant il arriva au gué. La marée montait et rendait ce chemin hasardeux. Le guide arabe dit qu'il connaissait un passage plus facile; on le tenta. Mais l'Arabe perdit la tête et égara les Français dans un marais. Le général en chef courut quelque danger. S'il eût péri, c'eût été de la même manière que Pharaon, ce qui n'eût pas manqué, dit gaîment Napoléon, de fournir à tous les prédicateurs de la chrétienté un texte magnifique contre lui. Le général Caffarelli se trouva dans le plus grand embarras. Il en fut heureusement

'Las Cases, tome 1, page 265.

* Idem, page 267.

« Nous avons passé la Mer-Rouge à gué; le retour a failli nous coûter la vie. » Lettre du chirurgien en chef Larrey. ( Moniteur du 30 floréal an vII.)

tiré par la présence d'esprit et le courage d'un guide à cheval.

Le 10, on partit de Suez; le gros de la caravane se dirigea sur Ageroud, et le général en chef, accompagné des généraux et de Monge, se porta au nord dans l'espoir de retrouver sur la plage, au fond du golfe, les vestiges de l'ancien canal des deux mers. On retrouva en effet la tête de ses digues, le général en chef les remarqua le premier. Elles étaient peu sensibles à leur naissance à cause des sables qui avaient comblé le canal dans quelques parties. Il en suivit les traces sur environ cinq lieues. C'était là le terme de ses vestiges, parce qu'à cette distance il débouchait dans les lacs amers. Satisfait de cette découverte et voyant la nuit s'approcher, Bonaparte voulut rejoindre la caravane à Ageroud. Il prit les devans avec Berthier, et accompagné de deux guides à cheval. La position de ce lieu était inconnue, et, pour ne pas s'égarer, Bonaparte se dirigea du côté où le soleil se couchait. Après un trajet de trois lieues, il arriva heureusement à Ageroud et rejoignit la caravane chargée de l'eau et des vivres. Il eût couru plus de dangers, si la nouvelle de son voyage à Suez n'eût écarté les Arabes de ces parages. Pour signaler sa présence et le lieu du bivouac aux officiers qui étaient restés en arrière, dans l'obscurité de la nuit, il fit tirer le canon, allumer des feux sur les tours du château, et porter sur quelques points élevés de la route qu'il venait de parcourir des fanaux dont les caravanes sont toujours munies pour éclairer leur

marche dans la nuit. Ces fanaux sont fort simples c'est un réchaud cylindrique dans lequel on entretient un feu vif et brillant, en y brûlant des morceaux très-secs de sapin. Ces réchauds sont fixés à la partie supérieure d'un bâton de cinq à six pieds de hauteur qu'on fiche en terre lorsqu'on veut s'arrêter. Si la caravane marche de nuit, elle a à sa tête plusieurs hommes qui portent de pareils réchauds, qu'ils ont soin de tenir élevés, afin que leur flamme soit aperçue de chaque voyageur '.

Tout le monde fut rallié dans la soirée. Le lendemain, la caravane se divisa en deux parties, l'une, composée de marchands, prit la route du Kaire, l'autre se dirigea vers Belbeïs. Le général en chef qui, avec un piquet de cavalerie, précédait sa troupe, donna sur'une troupe d'Arabes conduisant des chameaux. On reconnut qu'ils étaient de la tribu des Billys, et on cessa la poursuite, parce qu'on était en paix avec eux.

La troupe continuait sa route au milieu d'un désert immense. « Que vous semble de tout ceci ? citoyen Monge, dit le général en chef, interpellant ce mathématicien. Mais, citoyen général, je pense que si jamais on voit ici autant de voitures qu'à l'Opéra, il faudra qu'il se soit passé de fameuses révolutions sur le globe. » Il y en avait cependant une à six chevaux, c'était celle du gé

'C'est ainsi que Dubois-Aymé, dans son mémoire sur le séjour des Hébreux en Égypte, explique les miracles de la colonne de feu et de la nuée.

Las Cases, tome v, page 78.

néral en chef qui marchait en avant de la caravane et dont il ne se servit pas, car il Voyagea toujours à cheval; elle étonnait fort les Arabes.

Napoléon disait que le désert avait toujours eu pour lui un attrait particulier. Il ne l'avait ja

mais traversé sans une certaine émotion. C'était pour lui l'image de l'immensité. Il ne montrait point de bornes, n'avait ni commencement ni fin; c'était un Océan de pied ferme. Ce spectacle flattait son imagination et il se complaisait à faire observer que Napoléon veut dire lion du désert'.

Bonaparte arriva à Belbeïs le 12 nivôse au soir; il employa la journée du 13 à visiter les fortifications, les divers établissemens, et passa la revue des troupes. On aperçut du haut des remparts une troupe d'Arabes de la tribu des Soharrah, ennemis acharnés des Français, qui venaient souvent inquiéter les communications et communications et ravager le Charqyeh. Le chef d'escadron Croisier, aide-decamp du général en chef, leur donna la chasse leur prit 9 hommes et 30 chameaux chargés de dattes.

Le même jour, le général en chef écrivit au divan du Kaire.

<«< J'ai reçu la lettre que vous m'avez écrite; je l'ai lue avec le plaisir que l'on éprouve toujours lorsqu'on pense à des gens que l'on estime et sur l'attachement desquels on compte.

Dans peu de jours, je serai au Kaire.

Je m'occupe dans ce moment-ci à faire faire les

1 Las Cases, tome v, page 78.

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