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parte lui avait prescrit, et qu'il n'y avait pas un instant à perdre'.

A la réception de ces renseignemens, Bonaparte se décida à partir. Le 30, il écrivit au divan du Kaire qu'il partait le lendemain pour Menouf d'où il ferait différentes tournées dans le Delta, afin de voir par lui-même les injustices qui pouvaient être commises, et prendre connaissance des hoinmnes et du pays. Il lui recommandait de maintenir la confiance parmi le peuple. « Dites-lui souvent, ajoutait-il, que j'aime les Musulmans, et que mon intention est de faire leur bonheur. Faites-leur connaître que j'ai pour conduire les hommes les plus grands moyens, la persuasion et la force; qu'avec l'une, je cherche à me faire des amis; qu'avec l'autre, je détruis mes ennemis. » Il recommandait enfin au divan de lui donner de ses nouvelles, et de l'informer de la situation des choses le plus souvent possible '.

Bonaparte écrivit aussi à Poussielgue pour lui annoncer son départ; lui recommanda de pousser vivement la rentrée des fermages et des contributions, de correspondre avec lui à Menouf, de vivre en bonne intelligence avec les cheyks, de maintenir la paix au Kaire, de faire dans tout ce qui le concernait tout ce qu'il jugerait à propos, en prenant toujours la voie qui approcherait le moins de la nouveauté. « Je recommande, lui mandait-il en finissant, au général Dugua de frap

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per ferme au premier événement; qu'il fasse couper six têtes par jour; mais riez toujours. »

Bonaparte annonça à son état-major qu'il eût à se préparer pour un voyage de huit jours. Cependant les préparatifs qui se faisaient chez le général en chef étaient beaucoup plus considérables que ceux qu'on avait faits pour la campagne de Syrie. Son secrétaire Bourienne emballait tous les papiers. A 14 heures du soir, plus de 20 chameaux recevaient leur charge dans la cour du quartier-général. A minuit, Bonaparte partit, et s'embarqua à Boulaq sur le bateau armé de six pièces de canon qui lui servait à naviguer sur le Nil.

Le lendemain, il y eut au Kaire grande rumeur à l'Institut. On y dit hautement que Bonaparte était parti pour retourner en France. En un instant cette nouvelle se répandit dans toute la ville. Les commissions de savans refusèrent de partir pour la Haute-Égypte. Fourier envoya son refus par écrit à Dugua. Ce général, en informant Bonaparte de cette nouvelle à laquelle il ne croyait pas, lui demandait en grâce de ne pas rester aussi longtemps sans lui écrire qu'il l'avait fait dans les expéditions de Syrie et d'Abouqyr *.

Arrivé à la pointe du Delta, appelée BadelBaqarah (ventre de la vache), Bonaparte fit suivre la branche de Rosette et se rendit à Menouf chez le général Lanusse.

Lettre du 30 thermidor.

Lettres de Dugua, du 1er. fructidor.

Au diner, ce général dit à Bonaparte : « On prétend, mon général, que vous allez vous embarquer à Alexandrie pour retourner en France. Si cela est vrai, j'espère que, rentré dans notre patrie, vous n'oublierez pas l'armée d'Égypte Le général en chef répondit que c'était un faux bruit ; que son voyage n'avait d'autre but que de visiter le Delta et la province de Damiette qu'il ne connaissait pas encore. « Si vous allez à Damiette, ajouta Lanusse, la route la plus naturelle et la plus directe est le canal de Menouf; en le prenant, vous aurez l'avantage de traverser dans son entier le Delta. » Bonaparte répliqua qu'il avait besoin d'aller d'abord à Rosette, et que de là il se rendrait directement à Damiette par le lac de Bourlos.

Toujours plus persuadé que Bonaparte retournait en France, Lanusse n'insista pas davantage.

Le général en chef écrivit à Dugua que, désirant s'assurer lui-même des mouvemens de la côte, il allait voir s'il lui serait possible de descendre par les canaux jusqu'à Bourlos; il l'invitait à lui adresser ses dépêches à Rosette, et des duplicata à Menouf et Damiette, s'il y avait quelque chose de très-urgent.

Il écrivit au général Kléber sur divers objets de service courant, lui annonça qu'il se rendait à Rosette. « Vous recevrez, lui mandait-il, cette lettre le 3 ou le 4; partez, je vous prie, sur-lechamp pour vous y rendre de votre personne, si vous ne voyez aucun inconvénient à vous absenter de Damiette; sans quoi envoyez-moi un de vos TOME II. - GUERRE D'Égypte.

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aides-de-camp. Je désirerais qu'il pût arriver à Rosette dans la journée du 7. J'ai à conférer avec vous sur des affaires extrêmement importantes '. »

Après un séjour de 24 heures à Menouf, le général en chef partit pour Rahmanieh où il débarqua. Il y trouva ses équipages, monta de suite à cheval et continua sa route vers Alexandrie. Le soir, il fit halte au village de Berket; on dressa des tentes; il y passa la nuit.

Jusque-là, Bonaparte et le peu de personnes qui étaient dans sa confidence, comme Bourienne, Berthier, Denon, Monge et Berthollet, avaient gardé leur secret. Cependant depuis qu'on avait quitté le Nil et la direction de Rosette, personne ne doutait plus du but de ce voyage. A Berket, on cessa donc de dissimuler. On se livra ouvertement à la joie qu'excitait dans tous les cœurs l'espoir de revoir la patrie après 18 mois d'absence. Un détachement qui se rendait d'Alexandrie à Rahmanieh annonça en passant que deux frégates étaient à l'ancre hors du port neuf et qu'elles n'attendaient pour mettre à la voile que l'arrivée de Bonaparte. Il reçut en route toutes les lettres de Gantheaume postérieures à celle du 27 thermidor. Elles annonçaient que la mer était libre, que tout était prêt.

Le 5, on ne s'occupa plus que de l'embarquement. Bonaparte envoya au général Menou l'ordre de venir de Rosette le trouver au bord de la mer. L'armement des frégates avait été trop public à

'Lettre du 2 fructidor.

Alexandrie pour ne pas y donner l'éveil sur leur destination. L'ordonnateur de la marine Leroy avait écrit, le 30 thermidor, au général en chef pour lui demander la permission de s'embarquer avec lui. Il y avait de l'inconvénient à passer par cette ville; cela n'était pas nécessaire; Bonaparte s'arrêta donc au puits de Beîdah, qui en est éloigné de 3 lieues.

C'est là que, sur le sable, à l'ardeur brûlante du soleil, Bourienne tira à part l'aide-de-camp Merlin et lui donna à copier l'instruction que Bonaparte adressait à Kléber en lui remettant le commandement de l'armée. Cette pièce, devenue depuis si célèbre, et dans le fait l'une des plus importantes pour l'histoire de l'expédition d'Égypte, était ainsi conçue :

Alexandrie, 5 fructidor an vII.

Au général Kléber..

Vous trouverez ci-joint, citoyen général, un ordre pour prendre le commandement en chef de l'armée. La crainte que la croisière anglaise ne reparaisse d'un moment à l'autre, me fait précipiter mon voyage de deux ou trois jours.

J'emmène avec moi les généraux Berthier, Andréossy, Murat, Lannes et Marmont et les citoyens Monge et Berthollet.

Vous trouverez ci-joint les papiers anglais et de Francfort jusqu'au 10 juin. Vous y verrez que nous avons perdu l'Italie, que Mantoue, Turin et

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