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au général Lanusse, de se rendre à Menouf, et à Kléber de s'en aller à Damiette. Il mandait à Dugua, en l'informant de ces dispositions : « Je reste à Alexandrie quelques jours pour débrouiller ce chaos. Au moindre événement, je puis être au Kaire dans trois jours '. ».

Plus de 4,000 Turcs s'étaient jetés dans le fort d'Abouqyr; ils n'avaient presque pas de vivres. On les somma de se rendre; le fils du pacha, son kiaya, les officiers voulaient capituler; mais les soldats s'y refusèrent; il fallait donc les assiéger. « La moitié de la garnison, écrivait Bonaparte à Menou, en lui mandant de rester dans sa position jusqu'à ce que le fort fût pris, veut se rendre, l'autre moitié aime mieux se noyer. Ce sont des animaux avec lesquels il faut beaucoup de patience. Au reste, la reddition ne nous coûtera que des boulets. » Malheureusement elle coûta aussi des hommes. Lannes fut chargé du siége.

Les batteries françaises tirèrent sur le fort; mais leur feu ne suffisant pas pour le réduire, Bonaparte envoya à Alexandrie un renfort de 12 pièces de siége, ordonna de raser les maisons attenant au fort, de tirer 120 bombes par mortier dans 24 heures, et d'éloigner les chaloupes canonnières de l'ennemi 3.

D'autres batteries furent placées sur la droite et la gauche de l'isthme, quelques chaloupes ca

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nonnières furent coulées bas; une frégate fut démâtée et forcée de prendre le large.

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L'ennemi, commençant à manquer de vivres, fit une sortie et s'introduisit dans quelques maisons du village, Lannes y courut et fut blessé à la jambe; Menou le remplaça dans la conduite du siége; un aide-de-camp de Rampon fut tué; la 32°. eut 60 hommes hors de combat, parmi lesquels 9.tués; la 13. perdit aussi 13 hommes. Les officiers généraux disaient que les Turcs entendaient mieux la guerre des maisons que les Français; qu'elle faisait perdre beaucoup de monde en détail; que la troupe se décourageait. Menou défendit donc les attaques partielles et les brayades des tirailleurs jusqu'à ce que toutes les batteries fussent prêtes. C'était l'intention de Bonaparte.

Le 11, l'ennemi avait fait de grands progrès et s'était emparé de presque tout le village. Les assiégeans en reprirent une partie, et, à mesure qu'ils avançaient, faisaient des retranchemens et crénelaient les murs. L'ennemi était audacieux et les troupes de siége manquaient d'énergie. Il avait débouché à la poterne qui donnait sur la mer, et reçu de l'eau et quelques vivres. Il s'empara des équipages du général Menou, tua son meilleur cheval, et ne lui laissa pas une chemise '.

L'attaque du fort était donc devenue une affaire beaucoup plus sérieuse qu'on ne se l'était imaginé. Persuadé qu'il se rendrait aux premiers coups de canon, on avait négligé de resserrer

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Lettre de Menou à Bonaparte, du 12 thermidor.

d'abord la garnison, de manière à empêcher les sorties et à prévenir ses attaques. L'artillerie ne travaillait pas. Faultrier était très-mal secondé ; il avait un directeur de parc qui se croyait au parc de Meudon et qui ne se donnait aucun mouvement. Enfin, il semblait que les uns eussent oublié ce qu'ils savaient de l'art de la guerre, et que les autres eussent perdu leur ancien courage, «Il faut, écrivait Junot au général en chef, en lui transmettant ces observations sévères, que vous sachiez la vérité. Tout le monde ne vous la dit pas, et je crois qu'il est instant que vous la

connaissiez *. »

Mais le même jour, le général Davoust, étant de tranchée, fit une attaque vigoureuse, et, après avoir tué une grande quantité de Turcs dans les maisons, reprit le village tout entier jusqu'au fort, une pièce de 8 et deux pièces de 16. Sur-lechamp on retrancha toute la tête du village. Cette guerre de chicane avait déjà coûté aux assiégeans 280 hommes, presque le double de ce qui avait péri à la bataille d'Abouqyr.

Ce fut Davoust qui, par ses sages dispositions, décida principalement la reddition du fort. A compter de ce moment, le siége cessa d'être meurtrier pour les assiégeans; ce ne fut plus qu'une affaire de canons et de mortiers, ainsi que Bonaparte n'avait cessé de le recommander aux généraux.

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Le 15, le général Robin était de tranchée; les batteries françaises étaient sur la contrescarpe; les mortiers faisaient un feu très-vif; le fort n'était plus qu'un monceau de pierres. L'ennemi n'avait plus de communication avec l'escadre; il mourait de faim et de soif. Il prit le parti, non de capituler, car les Turcs ne capitulent pas, mais de jeter ses armes, et de venir en foule embrasser les genoux du vainqueur. On fit 1,814 prisonniers, parmi lesquels le fils du pacha, son kiaya, un effendi, Osman-Roguey, Osman-Kiriehel - Teaouchieh, ex-commandant de Berembal. 400 Turcs se jetèrent à la mer plutôt que de se rendre aux Français. Des 1,814 prisonniers, il en mourut presque subitement 400 des souffrances qu'ils avaient éprouvées pendant le siége et pour s'être gorgés d'eau et de pain en sortant du fort. 700 Turcs avaient été tués hors du fort pendant le siége. On y trouva en outre 1,400 cadavres. Total de ce qui s'était réfugié dans le fort après la bataille, 4,314 '.

Les prisonniers de distinction furent réservés pour arriver en même temps que Bonaparte au Kaire où des logemens leur furent préparés dans la citadelle; les autres furent répartis sur divers points pour être employés à des travaux.

Osman-Kirieh et Osman-Roguey furent accusés d'avoir informé Mourad-Bey de l'arrivée de la flotte turque et d'avoir cherché à soulever la pro

Lettre de Menou à Bonaparte, du 17 thermidor.

vince du Bahyreh; Bonaparte ordonna qu'ils fussent jugés. Osman-Kirieh fut décapité à Alexandrie, et Osman-Roguey à Rosette..

Le général en chef, regardant la place d'Abouqyr comme un poste important, en donna le commandement à l'adjudant-général Jullien, ne croyant pas pouvoir la confier en de meilleures mains '.

Quant au fort, Bonaparte ne voulait le conserver que comme batterie; il désirait un centre de force qui protégeât cette batterie et celle du phare. Il chargea le chef de bataillon, du génie Bertrand, qui s'était distingué au siége, de lui présenter un projet. Cet officier proposa d'établir un fort sur une hauteur qui avait été occupée par la gauche des Turcs, éloignée de la mer de 250 toises, de 400 du lac Madieh, et, élevée au-dessus de la mer de 60 pieds '.

En attendant, le général, en chef donna l'ordre à Menou de faire sur-le-champ démolir les deux villages, de renvoyer toute l'artillerie de siége à Alexandrie, excepté 4 pièces de 24 et 2 mortiers à la Gomère qui resteraient à Abouqyr; de faire évacuer sur le Kaire, par Rosette, toutes les pièces de 3 et de 4 prises sur les Turcs, excepté 2 qui resteraient à Abouqyr et 2 à Rosette; de faire rétablir le ponton servant, au passage du lac

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Lettre à Menou, du 9 thermidor.

Las Cases, tome 1, page 178, fait raconter par Bertrand que Bonaparte donna l'ordre à l'officier de ses guides, Hercule, de charger avec 25 hommes un millier de cavaliers turcs. Or, il n'y avait pas 300 chevaux dans l'armée turque,

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