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imprévue et prématurée de Syrie, que s'il tentait quelque chose, cela serait découvert et facile à repousser. « L'ennemi se présentant devant Alexandrie, écrivait-il, ne descendra pas au milieu de la place; ainsi vous auriez le temps de rappeler les détachemens que vous enverriez pour soutenir le général Destaing. >>

Ce n'était pas le seul point sur lequel, dans la correspondance de Bonaparte avec ce général, on remarquait quelque aigreur. Il ne concevait pas, par exemple, comment un brick anglais, croisant seul devant Alexandrie, était maître de la mer; pourquoi Dumanoir ne faisait pas sortir, ainsi qu'il y était autorisé, des bricks et une frégate? Il reprochait à Marmont d'avoir laissé embarquer pour la France, sans permission, une grande quantité d'employés et d'officiers de santé; et lui donnait tort dans des discussions mal entendues et impolitiques d'autorité qu'il avait eues avec l'ordonnateur Laigle, et dont le résultat avait été de nuire aux approvisionnemens d'Alexandrie.

Quant à des intrigues de Sidney Smith, « c'est un jeune fou, répondit Bonaparte, qui veut faire sa fortune, et cherche à se mettre souvent en évidence. La meilleure manière de le punir est de ne jamais lui répondre. Il faut le traiter comme un capitaine de brûlot. C'est, au reste, un homme capable de toutes les folies, et auquel il ne faut jamais prêter un projet profond et raisonné. Ainsi, par exemple, il serait capable de faire faire une descente avec 800 hommes. Il se vante d'être entré

déguisé à Alexandrie. Je ne sais si ce fait est vrai, mais il est très-possible qu'il profite d'un parlementaire pour entrer dans la ville, déguisé en matelot ».

I

Bonaparte envoya encore Murat avec 300 hommes de cavalerie, trois compagnies de grenadiers de la 69°. et deux pièces d'artillerie, pour aider, pendant huit ou dix jours, le général Destaing à soumettre le Bahyreh. Trois cents Arabes Ouadis se réunirent à Murat; la tribu envoya des députés au général en chef; ils prétendaient n'être entrés pour rien dans les troubles de cette province. « Quoique ces scélérats, écrivit-il à Marmont, eussent bien mérité que je les fisse fusiller, j'ai pensé qu'il était bon de s'en servir contre la nouvelle tribu qui paraît décidément être leur enne

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Quoique Bonaparte n'eût pas paru croire à une entreprise sérieuse de l'ennemi sur les côtes, un concours de circonstances lui fit changer d'opinion. Les Mamlouks, par des mouvemens qui semblaient combinés et tenir à un plan, cherchaient à gagner la Basse-Égypte, pour se réunir aux Arabes rassemblés dans le Bahyreh, et favoriser un débarquement.

Le 12 messidor, Friant, qui poursuivait sans relâche Mourad-Bey, écrivit, écrivit, de Beny-Soueyf,

à

Lettres de Bonaparte à Destaing et Marmont, des 29 prairial, et 8 messidor.

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Bonaparte, que ce bey fuyait dans le Bahyreh. Le général en chef donna l'ordre à Desaix de faire partir tout de suite, pour le Kaire, tous les escadrons ou hommes montés des 9o. de hussards, 3., 14°. et 15°. de dragons. « Il me paraît, lui écrivit-il, qu'il se trame quelque chose dans le Bahyreh; plusieurs tribus d'Arabes et quelques centaines de Maugrabins s'y sont rendus de l'intérieur de l'Afrique. Mourad-Bey s'y rend aussi. Si ce rassemblement prenait de la consistance, il pourrait se faire que les Anglais et les Turcs y joignissent plusieurs milliers d'hommes. Nous n'avons encore devant Damiette, ni Alexandrie aucune croisière ennemie. J'attache une importance majeure à la prompte exécution de ce mouvement de cavalerie '. >>

Depuis trente-neuf jours, Friant harcelait Mourad-Bey sans quitter ses traces d'un seul instant, et sans lui laisser le moindre repos.

« La rapidité et la précision de votre marche, lui écrivit Bonaparte, vous ont mérité la gloire de détruire Mourad-Bey. Le général Murat, qui est depuis cinq à six jours dans le Bahyreh, et que j'ai prévenu de l'intention où était MouradBey de s'y rendre, vous le renverra probablement. Je désire que vous ajoutiez aux services que vous n'avez cessé de nous rendre, celui bien majeur de tuer ou de faire mourir de fatigue

'Lettre du 14 messidor.

Mourad-Bey. Qu'il meure d'une manière ou de l'autre, je vous en tiendrai compte 1. »

Ce bey, alors malade, se tenait à la fontaine de Rayan, à 12 lieues de Médineh-Fayoum et à quatre journées des lacs Natron. Friant se disposait à le poursuivre. Bonaparte lançait aussi contre lui le général Lanusse, commandant du Menoufyeh. « Je désire fort, lui mandait-il, que vous ayez la gloire de prendre Mourad-Bey; elle serait due à votre activité et aux services que vous avez rendus pendant notre absence ( en Syrie). »

Le général en chef lui annonçait que sous peu de jours il se rendrait à Menouf, pour de là reconnaître l'emplacement d'un fort à bâtir au Ventre de la Vache ".

Friant se mit en marche, le 18, sur la fontaine de Rayan. Mourad-Bey ne l'y attendit pas. Après avoir feint de retourner dans la Haute-Égypte, il fit une contre-marche dans la nuit, coucha, le 22, à Zaoë, et passa, le 23, à 4 heures après midi, à Abousir, à 3 lieues de Gizeh, pour se porter aux lacs Natron. Il n'avait avec lui que 200 Mamlouks, moitié à cheval, moitié sur des chameaux, et 50 à Go Arabes; il était dans un grand délabrement, et vivement poursuivi par Friant qui lui avait enlevé quelques chameaux 3.

En apprenant cette nouvelle, Bonaparte en

'Lettres des 15 et 17 messidor.

Lettre du 17 messidor.

5 Lettre de Bonaparte à Lanusse, du 24 messidor.

voya Junot aux Pyramides, et des hommes de toutes parts pour être instruit de la marche de Mourad-Bey. Le général Murat, après être allé aux lacs Natron, le 23, où il n'avait trouvé personne, en partait lorsque le bey se dirigeait de ce côté, et arrivait à Terraneh. Bonaparte lui écrivit : « Si le bonheur eût voulu que vous fussiez resté 24 heures de plus aux lacs Natron, il est très-probable que vous nous apportiez sa tête. Vous vous conduirez selon les nouvelles que vous recevrez; vous vous rendrez aux lacs Natron, ou sur tout autre point du Bahyreh où vous penserez devoir vous porter pour nous débarrasser de cet ennemi si redoutable et aujourd'hui en si mauvais état. Le général qui aura le bonheur de détruire Mourad-Bey, aura mis le sceau à la conquête de l'Égypte. Je désire bien que le sort vous ait réservé cette gloire' ».

En même temps Bonaparte donna l'ordre au général Menou de partir aussi à la poursuite de Mourad-Bey, de passer par les couvens des Syriens, de remonter la vallée du Fleuve-Sans-Eau, de rejoindre les troupes de Desaix postées dans le Fayoum, et de revenir au Kaire par les pyramides de Saqarah et de Gizeh.

Mais Mourad-Bey, apprenant près des lacs Na tron que les Français l'y avaient précédé, n'y trouvant aucun rassemblement, ne recevant aucune nouvelle de débarquement, et jugeant bien

'Lettre du 24 messidor.

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