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chef de brigade « J'ai reçu votre mémoire historique sur vos compagnies de grenadiers. Votre tort est de ne vous être pas donné les sollicitudes nécessaires pour purger ces compagnies de 15 à 20 mauvais sujets qui s'y trouvaient. Aujourd'hui, il ne faut penser qu'à organiser ce corps et le mettre en état de soutenir, aux premiers événemens, la réputation qu'il s'était acquise en Italie ».

<< J'ai reçu les notes que vous m'avez remises, écrivit-il au capitaine des grenadiers Baille de la même demi-brigade; elles me prouvent que votre compagnie n'était pas avec les deux autres au moment où je fus mécontent d'elles, ce qui m'a porté à leur défendre de porter des palmes à leur entrée au Kaire, et qu'elle venait au contraire d'être envoyée par le général Rampon à l'attaque d'un poste où elle a montré le courage, l'impétuosité et la bravoure qui doivent distinguer les grenadiers '. »

L'expédition maritime que Bonaparte avait ordonnée, pendant son voyage à Suez, pour occuper Qosseïr, n'avait pu être commandée par le contre-amiral Gantheaume, puisque le général en chef l'avait appelé à lui avant son départ pour la Syrie. Le lieutenant de vaisseau Collot en fut chargé. Il avait ordre de s'emparer des richesses que les Mamlouks faisaient embarquer tous les jours dans ce port; d'y créer un établissement de défense, d'y laisser une croisière, et d'écrire partout pour

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y attirer le commerce. Il lui était recommandé, aussitôt après son débarquement, d'en prévenir Desaix en lui envoyant des Arabes dans la HauteÉgypte; ce général devait, de son côté, expédier d'Esné des émissaires à Qosseïr, pour être instruit de l'arrivée de Collot, correspondre avec lui, et lui envoyer des vivres s'il en avait besoin '.

La flottille partit de Suez, le 12 pluviôse, avec un très-bon vent; elle était composée de quatre chaloupes canonnières, et portait 80 hommes de débarquement. Elle arriva devant Qosseïr le 19; mais il était trop tard. Une troupe nombreuse d'Arabes de Gedda et d'Yambo, commandée par le schérif Hassan, y avait débarqué, pour aller au secours de Mourad-Bey. Voyant la côte cou verte d'une grande quantité de gens armés, Collot fit approcher ses chaloupes pour reconnaître si cette troupe était amie ou ennemie. Reçue par une vive décharge d'artillerie, la flottille répondit par une bordée de toute la sienne. Les courans et les vents portaient les bâtimens à terre; ils durent s'embosser; mais la chaloupe- le Tagliamento, que montait Collot, prit feu presque aussitôt et sauta en l'air. Cinquante-sept hommes périrent dans cette explosion. Quelques-uns, parvenus à se sauver sur le rivage, y furent massacrés. Les trois autres bâtimens coupèrent alors leurs câbles et retournèrent à Suez.

Ce revers inattendu aigrit le général en chef contre la marine; elle avait encore en ce point

Lettre de Bonaparte à Desaix, du 15 pluviôse.

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déçu ses espérances. De retour au Kaire, il në put retenir son humeur, et ce fut le texte d'une lettre énergique qu'il écrivit au Directoire.

« La République n'aura jamais de marine tant que l'on ne refera pas toutes les lois maritimes, lui écrivit-il. Un hamac mal placé, une gargousse négligée, perdent toute une escadre. Il faut proscrire les jurys, les conseils, les assemblées, à bord d'un vaisseau; il ne doit y avoir qu'une autorité, celle du capitaine, qui doit être plus absolue celle des consuls dans les armées roque maines.

Si nous n'avons pas eu un succès sur mer, ce 'n'est ni faute d'hommes capables, ni de matériel, ni d'argent, mais faute de bonnes lois. Si l'on continue à laisser subsister la même organisation maritime, mieux vaut-il fermer nos ports; c'est y jeter notre argent 2. »

Lorsque la nouvelle de la retraite de l'armée française se répandit en Syrie, la consternation y fut générale. Les Druses, les Mutualis, les partisans du cheyk Daher et tous les chrétiens de la Palestine n'obtinrent la paix de Djezzar que de grands sacrifices d'argent. Il fut moins cruel que par le passé. Presque toute sa maison militaire avait péri à Saint-Jean-d'Acre et ce vieillard survivait à tous ceux qu'il avait élevés. La peste qui faisait de grands ravages dans cette ville augmentait encore ses malheurs et portait un

par

'Lettre de Bonaparte à Desaix, du camp d'Acre, 30 germinal. Lettre du 1er, thermidor.

dernier coup à sa puissance : il ne sortit point de son pachalic. Phélippeaux, après avoir, par la défense de Saint-Jean-d'Acre, attaché à son nom une triste célébrité, y mourut de la peste peu de jours après la retraite des Français. Ismaël, pacha de Jérusalem, reprit possession de Jaffa. Ibrahim-Bey, avec 400 Mamlouks qui lui restaient, alla prendre position à Gaza.

En Europe, l'expédition d'Égypte exerçait depuis plusieurs mois tous les esprits, et donnait lieu à de nombreuses conjectures. Dans les premiers jours de l'arrivée de l'armée d'Orient sur le sol de l'Égypte, an début de la campagne, la correspondance des officiers avec la France était empreinte de leur dégoût, de leurs regrets, et de leur espoir de quitter une terre maudite pour retourner aux délices et aux jouissances de leur belle patrie. Une grande quantité de ces lettres avaient été interceptées par les croisières ennemies, surtout après le combat naval d'Abouqyr. En les lisant, le cabinet anglais avait triomphé de cette explosion de sentimens qui semblaient présager de la mollesse, de la défection dans l'armée, et peut-être sa ruine. Il avait fait parmi ces lettres un choix des plus amères, et, sans respect pour des confidences familières étrangères à la politique et à la guerre, il les avait publiées avec des notes qui donnaient à ce recueil de caractère d'un libelle officiel contre l'armée d'Orient, son chef et la nation française. Il était curieux d'entendre les usurpateurs de l'Inde, les oppresseurs des peuples et des rois, les envahisseurs des états et des trésors

de Tippo-Saïb, faire un crime aux Français d'êtrè venus porter la guerre chez un peuple paisible, digne de l'intérêt et de l'estime de toute l'Europe, et prédire d'un ton prophétique que cette armée de brigands, que ce scélérat de Bonaparte, succomberaient sous les coups des humains Mamlouks et des vertueux Arabes; enfin qu'il ne sortirait pas de l'Égypte un seul soldat français. Ces lettres, vraies ou fausses, rapportées fidèlement ou mutilées, les commentaires injurieux, les prédictions sinistres qui les accompagnaient, répandirent la joie dans les cabinets coalisés contre la République et chez tous ses ennemis. Ils ne prévoyaient pas que cette publication serait le plus bel éloge de l'armée d'Orient, de son chef, et le plus grand hommage qu'ils pussent leur rendre. Dans une de ces lettres, écrite le 21 messidor an vi, par l'ordonnateur de l'escadre Joubert, on lisait : « Quand les officiers et les soldats virent Alexandrie et les déserts qui l'environnent, ils furent frappés dé stupeur; mais Bonaparte ranima tout. » En effet, cette armée de mécontens exaspérés, conduite par un général que tant de hauts faits avaient illustré, conquit l'Égypte, et s'y maintint pendant trois ans, à force de sacrifices, de privations, de persévérance et de prodiges.

Mais tandis que les ennemis de la République prédisaient hautement la ruine de l'armée d'Orient, en France, au contraire, on ne rêvait que prospérités et expéditions encore plus lointaines. On faisait marcher Bonaparte et la moitié de son armée à Suez où il trouvait l'amiral Richery avec

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