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sulmans blessés et les parens des morts murmurèrent, et firent de vifs reproches à l'ange ElMohdy qui les avait assurés qu'ils seraient à l'abri des balles. Il apaisa leurs murmures en disant qu'aucun de ceux qui avaient marché en avant avec confiance n'avait péri; mais que ceux qui avaient reculé parce que la foi n'était pas entière dans leur cœur, avaient été punis par le prophète. Cet événement, qui devait ouvrir les yeux sur son imposture, consolida son pouvoir; il régna alors à Damanhour. Il était à craindre que l'esprit de révolte ne gagnât les provinces environnantes et qu'elles ne se soulevassent; mais une proclamation des cheyks du Kaire arriva à temps et empêcha une insurrection générale. Le général Lanusse, après avoir battu l'émir-haggi dans le Charqyeh, traversa le Delta avec sa colonne mobile et entra dans le Bahyreh. Il rencontra l'ange El-Mohdy le 19 floréal (8 mai), le combattit, passa au fil de l'épée 1,500 hommes, au nombre desquels se trouva l'ange El-Mohdy luimême. Lanusse entra ensuite à Damanhour, et, pour punir les habitans de leur révolte, il brûla la ville, après l'avoir livrée au pillage '.

Pendant ce temps-là, les Anglais étant entrés avec plusieurs vaisseaux dans la Mer-Rouge, faisaient une tentative contre Suez. La canonnade s'engagea; mais ayant reconnu que la ville était

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Lettre de Bonaparte au Directoire, du 2 messidor.-Mémoires de Napoléon, Gourgaud, tome II, page 318.

munie d'une nombreuse artillerie, ils se retirèrent et ne parurent plus.

Quelques partis de Mamlouks, chassés du Sayd par Desaix, étaient descendus dans la BasseÉgypte où ils cherchaient à soulever les Arabes et les fellah; poursuivis et battus plusieurs fois par le chef de brigade Destrée, ils étaient descendus dans le Charqyeh. Dugua ordonna au général Davoust de s'y porter. Il attaqua Elfy-Bey et les Arabes Billys, le 19 floréal; Elfy-Bey, après avoir perdu ses trois principaux kachefs et une grande partie de son monde, s'enfonça dans les déserts. Tous les mouvemens qui avaient eu pour but de troubler la tranquillité de l'Égypte, tenaient à un grand plan conçu par les Anglais. Ne pouvant eux-mêmes rien entreprendre contre les Français, ils cherchaient par leur or et par leurs intrigues à leur susciter des ennemis sur tous les points. Nulle circonstance ne semblait plus propre à seconder leurs vues que l'absence de Bonaparte et d'une grande partie de ses troupes ; mais ce qui restait encore en Égypte de cette admirable armée était inspiré par le génie de son général et suffit pour déjouer tous les efforts de ses nombreux ennemis. Au milieu de l'incendie qu'ils avaient, allumé, la ville du Kaire resta calme, grâce aux bonnes dispositions des habitans, aux sages mesures et à l'habileté du général Dugua et de Poussielgue. Cet administrateur visitait les principaux habitans et surtout les chefs de la religion qui se trouvaient fort honorés de ces égards

du visir de Bonaparte c'était le titre qu'ils lui donnaient. Leur confiance en lui était si grande qu'ils soumettaient leurs différens à sa décision; les soldats et les autres Français établis au Kaire, se mêlaient aux habitans dans leurs fêtes. Excepté les provinces de Beny-Soueyf, Charqyeh et Bahyreh, le reste de l'Égypte, influencé par les cheyks et les ulémas, demeura soumis et fidèle, et offrit l'aspect d'une province française. Sidney Smith vit échouer toutes les tentatives qu'il avait faites pour soulever la population de cette contrée. Oubliant ce qu'il devait au caractère des officiers français, il fit imprimer un grand nombre de circulaires et de libelles diffamatoires qu'il envoya aux généraux commandant en Égypte, leur assurant le passage s'ils voulaient se rendre en France pendant que le général en chef était en Syrie. L'armée resta inébranlablement attachée à son drapeau; Dugua repoussa avec indignation les insinuations de ce commodore et défendit à tous les généraux qui étaient sous ses ordres de communiquer avec lui.

On a vu que depuis son arrivée en Égypte, Bonaparte n'avait cessé d'entretenir des relations pacifiques avec le sultan de la Mekke, d'offrir et d'accorder protection à son commerce. Pendant la campagne de Syrie, Poussielgue avait continué ces relations. Ce prince était intéressé à les maintenir. Il voulait vendre son café, et avoir des grains que l'Égypte seule pouvait lui fournir. En assurant Poussielgue de son amitié, le sultan Galib lui écrivait : « Tu sauras que depuis quelques

jours, il nous est arrivé des lettres du prince de l'armée française, notre ami Bonaparte. Nous avons lu et considéré celle qui était pour nous, et nous t'envoyons la réponse que nous te prions de lui faire passer. Quant aux lettres qu'il nous demandait de faire parvenir dans l'Inde, nous les avons expédiées sur-le-champ par un homme de confiance. Dans peu, s'il plaît à Dieu, vous en aurez les réponses '».

Galib écrivait à Bonaparte : « Nous avons reçu la lettre que vous nous avez adressée, et en avons compris le contenu. Nous avons pris connaissance des droits qui seront perçus en Égypte sur les marchandises venant par la Mer-Rouge, ainsi que de l'article par lequel vous avez la bonté de nous accorder la libre entrée de 500 fardes, et cette exception honorable en notre faveur, est une nouvelle de votre confiance en nous, que preuve nous mériterons de plus en plus par notre fidélité. Notre intention est de faire tout ce qui dépendra de nous pour inspirer aux commerçans la confiance et la foi dues à vos paroles et à la paix qui existe entre vous et nous, qui, s'il plaît à Dieu, ne sera jamais troublée.

Le retour de notre envoyé a dissipé tous les doutes qu'avaient fait naître de faux bruits répandus parmi les marchands de ce pays, sur la sûreté des spéculations en Égypte. La lettre, surtout, de votre visir, les attentions qu'il a eues pour nos compatriotes, et les soins qu'il a pris pour la

Lettre du 4 loréal (23 avril).

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sûreté de leurs marchandises ont produit un si
grand effet sur l'esprit des négocians, qu'ils ont
expédié sur-le-champ cinq bâtimens chargés en
partie pour notre compte, ainsi que vous pouvez
le voir
par les états ».

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Poussielgue faisait publier cette correspondance en Égypte par le divan du Kaire, dans la persuasion qu'elle y produirait un excellent effet sur l'esprit du peuple. Cependant des Arabes de Gedda et d'Yambo, sujets du sultan de la Mekke, avaient débarqué à Cosseïr, et, réunis aux Mamlouks de Mourad-Bey, ils avaient combattu le général Desaix. Poussielgue s'en plaignit à Galib qui, pour se justifier, lui écrivit une longue lettre : elle portait cette singulière suscription :

Au prince des princes les plus respectables et les plus magnanimes, le modèle de ses contemporains, dont les entreprises sont utiles, notre ami sincère et véritable, le ministre des finances Poussielgue, dont la sagesse aplanit le sentier raboteux de l'administration.

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<< Vous nous avez fait entendre par votre lettre,
lui mandait Galib, que nos sujets se sont mêlés à
vos ennemis; mais qu'il ne vous soit
caché que
pas
personne de ceux qui sont dans notre dépendance
n'a jamais eu aucune liaison ni aucune communi-
cation avec les gens dont vous faites mention:
peut-être sont-ce quelques Arabes des frontières
qui ont combattu contre vous». Galib deman-

' Lettre du 4 floréal ( 23 avril).
Lettre du 15 prairial (3 juin),
TOME II. - GUERRE D'Égypte.

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