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payeur de la cavalerie, qui se trouvait sous la tente du malade '.

Le général en chef, voulant donner à Desgenettes et à Larrey une marque de sa satisfaction, pour les services qu'ils avaient rendus à l'armée, leur accorda à chacun une gratification de 2,000 f. et les laissa libres de la toucher au Kaire ou à Paris. Larrey voulant faire jouir son épouse de cette somme, Bonaparte écrivit à Paris pour qu'elle lui fût payée'. Telles étaient, sous la République, les modestes récompenses accordées pour les plus grands services, aux premiers talens dans l'art de guérir, glorieux de leur dévoûment héroïque à l'humanité et au salut des défenseurs de la patrie.

Cependant, une nouvelle pénurie de munitions et surtout de poudre, s'étant fait sentir dans l'armée, on fut contraint de ralentir le feu de la batterie de brèche. Les Turcs, pendant ce temps-là, mettaient en œuvre des contre-mineurs, et poussaient une sape dont le but était de couper la communication du boyau des assiégeans avec la nouvelle mine. Pour détruire les nouveaux ouvrages de l'ennemi, Bonaparte ordonna une attaque dans la nuit du 15 au 16 floréal. A 10 heures du soir, plusieurs compagnies de grenadiers se jetèrent dans les ouvrages extérieurs de la place

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Desgenettes (Histoire médicale de l'armée d'Orient, P fait lui même le récit naif de cet acte de dévoûment.

'Lettre de Bonaparte à l'ordonnateur en chef, du 8 floréal. 3 Idem du 13.

$8),

et s'en emparèrent; l'ennemi fut surpris, égorgé, et trois canons furent encloués; mais le feu de la place, qui plongeait sur ces ouvrages, ne permit pas d'y tenir assez longtemps pour les détruire entièrement; l'ennemi y rentra le 16 et travailla à les réparer. Les assiégés faisaient tous leurs efforts pour cheminer sur le logement de la mine dont l'objet était de faire sauter la contrescarpe. Le 17 floréal, au point du jour, Djezzar tenta une nouvelle sortie et fut repoussé. Le soir, les Turcs débouchèrent par une sape ouverte sur le masque de la mine, parvinrent à s'en emparer, l'éventèrent, détruisirent les châssis et comblèrent le puits. Dans la nuit du 17 au 18 floréal (du 6 au 7 mai), Bonaparte ordonna de s'emparer de nouveau des places d'armes de l'ennemi, des boyaux qu'il avait établis pour flanquer la brèche, et de celui qui couronnait le glacis de la nouvelle mine; de surprendre et d'égorger tous les hommes qui s'y trouveraient; d'attaquer les ouvrages et de s'y loger. Un détachement de grenadiers pénétra sur les places d'armes et s'en empara, excepté le boyau qui couronnait le glacis de l'ancienne mine et prenait la tour à revers; mais l'ennemi, qui du haut de ses murs dominait toujours les ouvrages, fit pleuvoir sur les Français un feu terrible, et rendit vains tous les efforts de la valeur; on ne put travailler au logement, et il fallut rentrer dans la tranchée

Le 18 floréal, vers le milieu du jour, plusieurs voiles parurent à l'horizon. Au même instant, les vaisseaux anglais, stationnés devant le port d'Acre,

levèrent l'ancre, et, réunis à la flottille qui croisait devant Caïffa, sortirent du golfe de Carmel pour prendre le large. Le bruit se répandit toutà-coup dans l'armée que la flotte signalée avait été envoyée par le Directoire au secours de l'armée de Syrie, et qu'elle portait des renforts et des munitions. Le départ précipité de Sidney Smith fortifiait cette opinion; on pensa qu'il avait fui pour éviter de tomber au pouvoir de la flotte française. Les soldats, croyant avec empressement ce qu'ils désiraient avec tant d'ardeur, se livrèrent à une joie excessive; mais elle fut de courte durée. Bientôt, du sommet de la colline où elle était campée, l'armée vit distinctement le pavillon anglais réuni au pavillon ottoman, sur les mâts de la flotte qui s'avançait à pleines voiles vers le port d'Acre. C'était un convoi de 30 bâtimens turcs portant un corps considérable de l'armée de Rhodes, seul renfort que l'on eût pu en détacher pour aller au secours de Djezzar. Sidney Smith n'avait levé l'ancre que pour aller le reconnaître et entrer avec lui dans la rade.

On calcula d'après le vent que les nouveaux renforts ne pourraient être débarqués avant six heures. Bonaparte sentit alors que les destins de la campagne allaient se décider dans cette journée, et, voulant mettre à profit le faible sursis que lui laissait la fortune, il fit jouer avec vigueur toutes ses batteries, et ordonna d'attaquer la tour ruinée, espérant pouvoir enlever la place avant l'arrivée dé la flotte. Cet assaut fut terrible. Pleins 'd'une nouvelle ardeur, les soldats. conduits par

leurs généraux, se portèrent avec impétuosité sur la tour. Vial, Bon et Rampon se jetèrent dans la tranchée, et les ouvrages de l'ennemi furent emportés. Le feu meurtrier des remparts ne put arrêter leur courage; les places d'armes, les boyaux furent enlevés et détruits, et les Français parvinrent sur le sommet de la tour, après avoir passé sur les cadavres de leurs ennemis entassés parmi les décombres. La nuit étant venue, ils s'y retranchèrent pour y attendre le jour. Dans cet assaut, les Français eurent 80 hommes tués et près de 50 blessés.

Pendant la nuit, la flotte turque débarqua ses renforts, et ces troupes fraîches furent aussitôt réparties dans les divers postes de la ville. Jugeant qu'il était nécessaire de renforcer son armée de siége, afin de balancer le secours qu'avait reçu Djezzar, le général en chef envoya à Kléber l'ordre de lever son camp de Nazareth, et de venir le rejoindre sous Acre avec sa division. La poudre et les munitions que Bonaparte attendait de Gaza, arrivèrent, et fournirent le moyen de redoubler le feu des batteries.

Le 19 floréal, au point du jour, le combat recommença avec acharnement sur la tour carrée. Bientôt un énorme pan de muraille s'écroula avec fracas sous le feu de la batterie de 24, et sa chute ouvrit trois grandes brèches qui furent jugées praticables. Bonaparte alla lui-même les reconnaître, et fit battre la charge. Lannes eut ordre de conduire sa division à l'assaut. Il s'avança vers les murs, précédé de ses grenadiers, con

TOME II. - Guerre d'Égypte.

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duits par le général de brigade Rambault, et les autres divisions furent. disposées en colonnes d'attaque, pour le soutenir. Les grenadiers qui occupaient la tour dirigèrent une vive fusillade sur la brèche, pour empêcher les Turcs de se porter à sa défense. La division Lannes se jeta dans les ouvrages des assiégés, escalada le rempart, et l'intrépide Rambault, à la tête de 200 grenadiers, pénétra enfin dans la place. Mais, en marchant pleins de confiance dans les rues de la ville, ils furent arrêtés court par une nouvelle enceinte que Phélippeaux avait fait élever derrière les vieux murs. Alors un mouvement d'hésitation et de stupeur se manifesta dans les rangs des Français; il redoubla quand ils virent les Turcs réunis en colonne serrée, défilant dans le fossé pour prendre la brèche à revers, soutenus par le feu des maisons, des rues et du palais de Djezzar. Le corps, commandé par le général Rambault, continua de combattre avec ardeur sous la nouvelle enceinte qu'il tenta d'escalader; mais ceux qui avaient les derniers franchi la première enceinte, craignant d'être coupés du camp par les Turcs, reprirent le chemin de la tranchée, abandonnant deux canons et deux mortiers dont ils s'étaient emparés sur les remparts. Le général Lannes, placé en évidence sur la brèche, les excitait à tenir ferme, et faisait tous ses efforts pour arrêter ce mouvement rétrograde. Il parvint à leur rendre la confiance et reporta sa colonne en avant. Le général en chef qui, dès le commencement de l'attaque, avait réuni ses guides à pied près de lui dans la

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