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7 germinal'. Ce soldat, nommé Desbordes, couvert de blessures, condamné par là à ne pouvoir servir de longtemps, et désirant revoir sa patrie, avait demandé à Sidney Smith un sauf- conduit pour s'y rendre avec les prisonniers de sa na

tion *.

Les procédés réciproques de Bonaparte et du commodore semblaient donc conformes à l'honneur et aux usages suivis entre les nations civilisées. Il paraissait hors de doute que les Anglais se conduisaient avec humanité envers les soldats français qui tombaient en leur pouvoir. Cependant, chose étrange ces Anglais, qui contribuaient si puissamment à la défense de SaintJean-d'Acre, ne pouvaient obtenir, en retour de leurs services, que Djezzar-Pacha observât les mêmes usages qu'eux, à l'égard des Français tués ou faits prisonniers. Soit tolérance, soit impuissance de leur part, il est certain que sous leurs yeux les Turcs continuaient à se livrer à leurs excès habituels envers les prisonniers et les morts. Dans sa lettre à Bonaparte, Sidney Smith avouait du moins cette impuissance, en disant que Desbordes était le seul Français qu'il eût pu arracher de la main des Turcs'. De plus, Sidney Smith faisait tous ses efforts pour débaucher l'armée. Dans les diverses sorties de la garnison, il avait répandu parmi les troupes des proclamations, des libelles et de fausses nouvelles d'Eu

'Lettre de Sidney Smith, du 27 germinal.

Lettre de Desbordes à Sidney Smith, du 23 germinal. 3 Lettre de Sidney Smith, du 27 germinal.

rope; il faisait aux officiers et aux soldats les offres les plus séduisantes. Quelques-uns en furent ébranlés même, mais le plus grand nombre y resta sourd et les repoussa. Néanmoins, le général en chef jugea urgent de rompre avec la croisière anglaise des communications qui pouvaient produire un effet dangereux sur le moral de l'armée. Il écrivit au chef de l'état-major-général :

« Le commandant de la croisière anglaise devant Acre, ayant eu la barbarie de faire embarquer sur un bâtiment qui avait la peste les prisonniers faits sur les deux tartanes chargées de munitions qu'il a prises près de Caïffa; dans la sortie qui a eu lieu le 18, les Anglais ayant été remarqués à la tête des barbares, et le pavillon anglais ayant été au même instant arboré sur plusieurs tours de la place, la conduite féroce qu'ont tenue les assiégés en coupant la tête à deux volontaires qui avaient été tués, doit être attribuée au commandant anglais; conduite si opposée aux honneurs que l'on a rendus aux officiers et soldats anglais trouvés sur le champ de bataille, et aux soins que l'on a eu des blessés et des pri

sonniers.

Les Anglais étant ceux qui défendent et approvisionnent Acre, la conduite horrible de Djezzar, qui a fait étrangler et jeter à l'eau, les mains liées, plus de 200 chrétiens, naturels du pays, parmi lesquels se trouvait le secrétaire du consul français, doit également être attribuée à cet officier, puisque, par les circonstances, le pacha se trouve entièrement sous sa dépendance.

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Cet officier refusant d'ailleurs d'exécuter aucun des articles d'échange établis entre les deux puis sances, ses propos dans toutes les communications qui ont eu lieu et ses démarches depuis qu'il est en croisière étant ceux d'un fou, mon intention est que vous donniez des ordres aux différens commandans de la côte, pour qu'on cesse toute communication avec la flotte anglaise, actuellement en croisière dans ces mers 1. >>

L'opinion s'accrédita donc dans l'armée que Sidney Smith était effectivement devenu fou. Ce commodore, piqué jusqu'au vif, envoya en parlementaire un lieutenant porteur d'un cartel pour Bonaparte. En apprenant le défi fait à sa personne par un capitaine de vaisseau anglais, le conquérant de l'Italie et de l'Égypte ne put s'empêcher de rire. Il renvoya le parlementaire en lui disant que s'il s'agissait de combattre le grand Malborough, peut-être alors il y pourrait consentir; mais que si Sidney Smith avait réellement besoin de s'escrimer, Bonaparte consentirait à neutraliser quelques toises de terre sur la plage, et y enverrait un des bravaches de son armée.

Cette démarche de Sidney Smith, du moins très-bizarre, ne servit qu'à attirer sur lui du ridicule dans l'armée, et à confirmer l'opinion qu'elle avait conçue de ce commodore.

Le général en chef fut instruit qu'une tribu d'Arabes s'était établie aux environs du MontCarmel, inquiétait les communications des Fran

› Ordre du jour du 30 germinal.

çais avec Jaffa, et cherchait à communiquer avec les Anglais pour leur faire passer des provisions de bouche destinées à ravitailler Aere. I envoya contre eux l'adjudant-général Leturq, le 30 germinal, avec un corps de 300 hommes. Cet officier surprit les Arabes dans leur camp, en tua une soixantaine et leur enleva 800 boeufs qui servirent à la nourriture de l'armée.

En envoyant à Kléber des nouvelles, Bonaparte lui recommandait de veiller avec soin sur la ligne du Jourdain, de faire faire une note par les officiers du génie et de l'artillerie', sur le degré de défense dont seraient susceptibles les ponts de Jacoub et de Medjameh, de faire dessiner par un officier du génie un croquis du cours du Jourdain, depuis le pont de Jacoub jusqu'à quatre lieues plus bas que celui de Medjameh, avec la nature du terrain à une lieue sur l'une et l'autre rive '.

Les travaux du siége que le général en chef avait activés avant son départ du camp d'Acre, ne s'étaient point ralentis pendant son absence. En se promenant autour de la ville avec Murat, il s'écria, en lui montrant ces murailles qui l'arrêtaient depuis 40 jours : « Le sort de l'Orient est dans cette bicoque; la chute d'Acre est le but de mon expédition; Damas doit en être le fruit ». Le 1. floréal, les mineurs étaient parvenus sous l'axe de la grosse tour. Le 5, la inine joua et ne produisit point l'effet que les mineurs en attendaient. Un souterrain qui se trouvait sous la

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tour affaiblit la résistance, et une partie de l'effort se perdit en s'échappant du côté de la place. Cependant une portion de la muraille de terre s'écroula ainsi que la plus grande partie des trois voûtes de la tour. Le fossé, à dix toises de chaque côté, avait entièrement disparu sous les décombres. Le général en chef ordonna à une trentaine de grenadiers d'essayer de se loger dans la tour pour reconnaître comment elle se liait au reste de la place. Ils parvinrent à se loger au-dessous du premier étage; mais, fusillés par l'ennemi qui avait pratiqué des ouvertures aux voûtes supérieures, foudroyés par l'explosion de plusieurs barils de poudre enflammés que les Turcs avaient jetés sur la brèche, ils furent contraints de se re

tirer.

On continua de canonner la brèche pendant toute la journée du 6; le soir, on essaya encore de se loger dans le premier étage que l'ennemi uccupait toujours. Dans l'attaque de la veille, les assiégeans avaient remarqué que s'ils parvenaient à s'en emparer, ils auraient entrée dans la ville, en se jetant dans les maisons de gauche, situées au niveau de cet étage. Vingt-cinq hommes, commandés par le général Vaux, après avoir dépassé la première ligne des feux de rempart, pénétrèrent de nouveau dans la salle inférieure de la tour. Ils reculèrent d'abord devant des flots de matières enflammées que l'ennemi faisait pleuvoir sur eux à torrents; mais le général Vaux, excitant ses grenadiers par ses paroles et par son exemple, les ramena sur la brèche.

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