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Il ignorait la perte de son artillerie de siége, et arrivait devant Saint-Jean-d'Acre, plein de confiance dans le succès du siége qu'il allait entreprendre. Accompagné des généraux Dommartin et Caffarelli, il fit, le 29 ventôse, une reconnaissance plus exacte de la place. On résolut d'attaquer le front de l'angle saillant à l'extrémité la plus orientale de la ville. Le chef de brigade du génie, Samson, fut chargé de reconnaître, pendant la nuit, la contrescarpe. Il eut la main traversée par une balle; il n'en continua pas moins sa mission. Mais, obligé de marcher sur les pieds et les mains, la gêne de cette posture et l'obscurité ne lui permirent pas de reconnaître avec exactitude les fortifications. Il parvint à toucher le pied d'un mur qu'il crut être celui de la ville, et revint au camp, persuadé qu'elle n'avait ni fossés ni contrescarpe. Cette fausse indication compromit l'armée.

Le 30 ventôse, on ouvrit la tranchée à environ 150 toises de la place, en profitant des jardins, d'un aqueduc qui traversait le glacis, et des fossés de l'ancienne Ptolémaïs. On travailla aux batteries de brèche et aux contre-batteries. Calfarelli-Dufalga, pressé par l'impatience de Bonaparte, communiquait aux travailleurs le feu et l'activité de son caractère. Cet excès de zèle devint même funeste aux assiégeans; car les chemins couverts ne furent point perfectionnés, et les soldats de tranchée étaient obligés de marcher courbés pour n'être pas vus des assiégés.

L'armée n'avait vécu que de biscuit et n'avait point eu de pain depuis son départ du Kaire; les

TOME II.

GUERRE D'Égypte.

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provisions trouvées dans les magasins de Caïffa et dans le village de Chefamer, et celles qu'apportèrent les habitans suffirent à sa subsistance. Les moulins de Tanous et de Kerdanneh furent employés à moudre le blé qui venait de Caïffa. Un grand établissement de boulangerie fut fait au camp, près de la tente du général en chef. On s'occupa des hôpitaux; la principale ambulance fut établie dans les étables de Djezzar, seul local existant aux environs d'Acre. Les blessés et les malades y étaient fort mal; on manquait de fournitures et de médicamens.

Il se présenta une situation très-favorable pour un hôpital, le beau village de Chefamer, sur une hauteur bien exposée, entourée et couverte de végétation, avec de bonnes eaux, à trois lieues sud de Saint-Jean-d'Acre; là sont les sources de la Kerdanneh. Il y avait un vaste palais, bâti par le cheyk Omar-Daher, réunissant à la hardiesse et au grandiose, qui constituent l'architecture arabe, la solidité d'une forteresse. Cet édifice pouvait réunir 600 malades. Le général en chef ordonna qu'il y fût établi deux hôpitaux, un pour les fiévreux et l'autre pour les blessés. Un com. missaire des guerres, le médecin et le chirurgien en chef et le directeur des hôpitaux furent chargés de les organiser, et un bataillon y fut envoyé en garnison. On établit ensuite un nouvel hôpital dans un couvent situé sur le sommet du MontCarmel, et un troisième d'évacuation fut placé à Caïffa. Le général en chef en surveillait lui-même la tenue. « Je viens de faire la visite de l'hôpital,

écrivit-il à l'ordonnateur d'Aure. On y manque de marmites et de vases pour laver les plaies. Il ne faut pour les blessés que de l'orge et du miel pour faire la tisanne, et il n'y en a point. Ces malheureux qui ont tant de droits à notre intérêt souffrent, et cependant l'on vend journellement dans le camp de l'orge et du miel: Je vous requiers de faire acheter le plus promptement possible de l'orge, du miel et des vases qu'il est aisé de se procurer dans la montagne. Le linge et la charpie sont sur le point de manquer. Ordonnez également qu'on prenne des précautions pour cet objet. »***

Le 2

germinal, l'armée entendit une vive canonnade dans la direction de Caïffa. Les Anglais, pour s'emparer des dépôts que renfermaît cette ville, y tentèrent un débarquement. Le chef d'es cadron Lambert, avec sa garnison de 88 hommes, les laissa tranquillement débarquer, et, quard ils furent à une portée de fusil, il démasqua un obusier et un canon de 3. Il se porta au pas de course, à la tête de cette poignée d'hommes, sur les canots des Anglais, les força à se rembarquer, monta à l'abordage, leur tna ou blessa plus dé 100 hommes et les obligea à gagner le large. Une chaloupe du Tigre fut obligée de se rendre; on y fit 17 prisonniers; on y trouva 8 blessés et une caronade de 32. Les prisonniers furent employés à la manutention des vivres.

Sidney Smith réclama la bienveillance du commandant de Caïffa envers les prisonniers. Lambert lui répondit :

« L'intérêt que vous prenez aux prisonniers tombés hier en notre pouvoir, est assurément bien louable et bien mérité, tant par leur conduite que par le courage et la bravoure qu'ils ont montrés. Soyez assuré que nous avons eu pour eux tous les égards que se doivent naturellement des peuples faits pour s'estimer et s'admirer.

Le général en chef Bonaparte a demandé ce matin les prisonniers à son quartier-général ; il envoya la nuit dernière son chirurgien pour panser les huit blessés qui ne le sont pas dangereusement. Ce chirurgien les a accompagnés. Nous sommes très-sensibles aux bons traitemens qu'éprouvent nos camarades lorsqu'ils tombent entre vos mains. Je ne doute pas un instant que le général en chef ne réponde à vos désirs, en vous renvoyant les prisonniers que vous demandez '. »

Sidney Smith, s'étant momentanément absenté de la rade d'Acre, ne put recevoir cette lettre qu'à son retour, et s'empressa de répondre à Lambert pour lui témoigner sa vive reconnaissance de ses bons procédés envers les prisonniers anglais et des soins qu'on avait pris d'eux. « Je me réserve, lui écrivit-il, d'exprimer seulement au général en chef Bonaparte, combien je suis sensible à son attention personnelle à envoyer les secours de l'art à nos prisonniers blessés '. »

Le 14 germinal, Sidney Smith envoya son lieutenant et son secrétaire pour traiter de leur échange.

Lettre du 3 germinal. 'Lettre du 14.

On travaillait avec la plus grande activité à perfectionner les travaux du siége de Saint-Jeand'Acre. L'artillerie des assiégeans consistait en 4 pièces de 12, approvisionnées chacune à 200 coups, et 8 obusiers. La caronade de 32 que Lanibert avait prise à Caïffa fut un renfort précieux. On avait de la poudre, car le parc en avait apporté du Kaire, et on en avait trouvé à Gaza et à Jaffa; mais on manquait de boulets. On imagina une ruse ingénieuse pour s'en procurer. On faisait

de

temps en temps paraitre sur le bord de la mer quelques cavaliers ou des charrettes, ou bien on feignait d'y construire une redoute. Alors le commodore Sidney Smith faisait avancer ses vaisseaux le plus près possible de la côte, et faisait un feu

roulant de toutes ses batteries. Les boulets venaient tomber jusque dans le camp, où ils tuèrent même quelques hommes. Les soldats couraient les ramasser et les apportaient au parc d'artillerie où, d'après un ordre du jour du général en chef, on les leur payait cinq sous pièce. De cette manière, on s'en procura une grande quantité du calibre de 12 et de 32.

Lorsque le chef de brigade du génie Samson, revenu de sa reconnaissance nocturne, assura que l'enceinte d'Acre n'avait ni fossés ni contrescarpe, la chute de cette ville parut infaillible au général en chef et à l'armée. On espérait pouvoir, après trois jours de siége, planter l'étendard tricolore sur les tours de l'ancienne Ptoléraïs. Le 5 germinal (25 mars), on commença à battre en brèche. Le rempart s'écroula bientôt sous le feu de l'artille

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